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La crise du 737 MAX, un cauchemar pour Boeing quatre mois après

Boeing doit publier mercredi ses résultats du deuxième trimestre qui s'annoncent désastreux: l'avionneur devrait dévoiler la plus grosse perte de son histoire, en raison d'une charge de 5,6 milliards de dollars liée aux déboires du 737 MAX, son avion vedette cloué au sol depuis plus de quatre mois.

Où en est-on dans cette crise causée par la succession de deux accidents du 737 MAX avec les compagnies Ethiopian Airlines en mars (157 morts) et Lion Air en octobre (189 morts)?

- Quels résultats?

Il n'y aura pas de miracle: Boeing devrait annoncer une perte nette trimestrielle de plus de 3 milliards de dollars, selon les calculs de S&P Capital IQ.

Boeing n'avait jusqu'à présent perdu de l'argent que deux fois: 1,6 milliard de dollars au troisième trimestre 2009 et 234 millions au deuxième trimestre 2016.

Le chiffre d'affaires devrait chuter de plus de 20% car Boeing a suspendu les livraisons des 737 MAX, ce qui signifie qu'il ne reçoit pas de chèques des compagnies aériennes qui ne paient en intégralité que quand elles prennent possession de l'avion.

Les agences de notation Moody's et Fitch menacent d'abaisser la note de solvabilité de l'avionneur.

- Quelle est la facture du MAX?

Elle s'élève pour l'instant à quelque 8 milliards de dollars et ne comprend pas les indemnisations des familles de victimes, qui ont déjà porté plainte.

La charge de 5,6 milliards de dollars annoncée récemment par le constructeur est destinée à compenser les compagnies aériennes et les loueurs d'avions ayant dû annuler des milliers de vols.

Boeing ne va pas forcément leur verser de l'argent mais leur accorder, au cas par cas, des ristournes sur de futures commandes, offrir des services de maintenance, de formation...

Les coûts de production du 737 ont augmenté de 2,7 milliards de dollars, Boeing n'ayant par exemple pas pris de mesures de chômage technique en dépit d'une baisse des cadences de production, à 42 appareils par mois contre 52 avant la crise.

- D'autres mauvaises surprises?

Poursuivi en justice par des familles de victimes, Boeing a déjà mis en place un fonds d'indemnisation doté de 50 millions de dollars mais s'est engagé à leur en verser 100 millions. Ce montant pourrait exploser.

Il pourrait écoper également d'une amende des autorités américaines, notamment du ministère de la Justice qui a ouvert une enquête pénale sur le 737 MAX, selon des sources proches du dossier.

- Où en sont les enquêtes?

Celles sur les accidents d'Ethiopian Airlines et de Lion Air sont en cours.

Le ministère américain de la Justice s'interroge pour sa part sur le processus de décision lié au MCAS, le système anti-décrochage mis en cause dans les deux accidents, avec deux questions principales, selon des sources proches: les forces de vente de Boeing ont-elles poussé pour que le signal d'alerte de dysfonctionnement soit payant et qu'il n'y ait pas de formation spécifique des pilotes en dépit de la nouveauté de ce système?

- Où en est le correctif du MAX?

Boeing travaille toujours sur les modifications du MCAS.

Il planche aussi sur la formation adéquate des pilotes.

Il pourrait soumettre ses solutions en septembre aux régulateurs, selon des sources industrielles.

- Quand va revoler le MAX?

Boeing parle de "début du quatrième trimestre" 2019, c'est-à-dire en octobre.

Ce calendrier est très ambitieux, s'accordent les experts, mais "suggère que Boeing s'attend à ce que la FAA (l'agence de l'aviation américaine) et probablement le Canada réautorisent un retour en service" à ce moment-là, explique Ken Herbert chez Canaccord.

Cet expert doute que l'Europe et la Chine emboîtent le pas aux Américains, en raison de différents facteurs: la guerre commerciale entre Pékin et Washington, les tensions géopolitiques et les craintes de compagnies aériennes et de passagers à travers le monde.

Avant la crise du 737 MAX, une règle tacite voulait que les régulateurs s'alignent sur le feu vert de l'autorité d'origine de l'avion.

- Le MAX va-t-il changer de nom?

Conseillers en image et en communication sont unanimes: Boeing doit se débarrasser du nom MAX. La photo d'un appareil de Ryanair diffusée sur internet avec l'inscription "737-8200" a fini par alimenter les spéculations.

"Nous sommes ouverts à toutes les suggestions, des clients et des actionnaires, mais à l'heure actuelle nous n'avons pas de projet de changer le nom du 737 MAX", a répondu un porte-parole à l'AFP.

- Le MAX affecte-t-il d'autres programmes?

D'après des sources proches, la FAA a accentué son inspection du long-courrier 777X, remplaçant du 777 dont le vol test, prévu cet été, a été renvoyé à la fin de l'année pour un problème de moteur.

Quant au NMA (New Model Aircraft), nouvel avion de ligne de taille moyenne devant remplacer les 757 et 767 et que réclame par exemple United Airlines, "nous sommes toujours impliqués à un certain niveau, il y a une équipe dédiée à l'évaluation du modèle économique", explique à l'AFP Boeing.

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