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La mortalité routière en recul "historique" mais les 80 km/h toujours en suspens

L'année 2018 a été la moins meurtrière de l'histoire sur les routes de métropole mais malgré ce résultat "historique", l'avenir de la limitation de vitesse à 80 km/h, entrée en vigueur en juillet, reste en suspens en pleine crise des "gilets jaunes".

L'an dernier, 3.259 personnes ont trouvé la mort en métropole, soit neuf de moins que le précédent "record" de 2013. Avec 244 décès enregistrés outre-mer (où les 80 km/h ne s'appliquent pas partout) et donc un total de 3.503 morts, le bilan global dépasse toutefois celui de 2013 (3.427 morts).

Six mois après l'entrée en vigueur de l'abaissement très controversé à 80km/h, ce résultat "sans ambiguïté", selon le Premier ministre Edouard Philippe, marque une nette rupture. Depuis 2013, la France restait sur trois années consécutives de hausse entre 2014 et 2016 -- du jamais vu depuis 1972 -- puis une quasi-stagnation en 2017.

La situation avait convaincu le gouvernement d'abaisser la vitesse maximale autorisée au 1er juillet sur 400.000 km de routes secondaires à double sens sans séparateur central, déclenchant une tempête chez les automobilistes, les motards, élus et même certains ministres. L'objectif annoncé était de sauver "jusqu'à 400 vies par an".

Depuis juillet, 116 vies ont été épargnées sur les routes secondaires abaissées à 80 km/h, a dit le Premier ministre. Et ce bilan aurait pu être meilleur sans les dégradations de radars qui se sont multipliées depuis le début du mouvement des "gilets jaunes", estime le gouvernement.

"Nous avons pris une décision que nous savions impopulaire (...) Nous sommes fiers des résultats, de ces vies épargnées", a-t-il insisté.

Évoquant la contestation de cette mesure, qui a poussé l'exécutif à inclure ce thème dans le grand débat national, Edouard Philippe a jugé "légitime de discuter du sujet". "Mais il serait fou d'abaisser le niveau d'ambition", a-t-il estimé, alors que des présidents de conseils départementaux demandent des dérogations sur certaines routes.

"Je ne voudrais pas que des mesures qui seraient prises viennent dégrader ce chiffre, augmenter à nouveau le nombre d'accidents sur les routes", a-t-il ajouté.

Le président de l'Assemblée des départements de France, Dominique Bussereau, a répondu lundi que les départements étaient "prêts à prendre leurs responsabilités" s'il fallait ajuster, au cas par cas", la limitation de vitesse.

- Précurseur de la crise des "gilets jaunes" -

La baisse concerne tous les usagers (automobilistes, piétons, cyclistes...) et tous les indicateurs (-4,8% d'accidents, -24,8% de blessés hospitalisés...).

Pour autant, les anti-80 km/h ne décolèrent pas. "Ce n'est que de la com' ! Comment peut-on parler de résultat historique alors qu'on est au même niveau que 2013?", peste le délégué général de l'association 40 millions d'automobilistes, Pierre Chasseray.

"Si cette mesure sauvait 400 vies, on devrait être bien en-dessous du niveau de 2013. On aurait au moins 200 vies épargnées. Or, on est au même score qu'il y a cinq ans quand les routes étaient à 90 km/h", souligne-t-il.

Malgré ces résultats, l'impopulaire 80 km/h pourrait bien se retrouver amendé pour apaiser la colère des "gilets jaunes". Pour de nombreux observateurs, cette mesure a constitué un élément précurseur de la crise sans précédent qui secoue le pays depuis mi-novembre.

Et Emmanuel Macron -qui n'y a jamais apporté de franc soutien- a déjà esquissé un recul. "Il faut ensemble que l'on trouve une manière plus intelligente de le mettre en œuvre. Il n'y a pas de dogme", avait-il lancé le 15 janvier à 600 maires rassemblés à Grand Bourgtheroulde (Eure).

"Peut-être que les données qui sont tombées aujourd'hui vont faire varier l'opinion, on verra, et de toute facon on écoutera ce que les Français ont à nous dire sur le sujet", a affirmé le patron des députés LREM Gilles Le Gendre à BFMTV.

L'association Prévention routière a estimé qu'"il est essentiel de laisser le temps (à la mesure) de produire pleinement ses effets".

Tout en saluant "une journée historique", la présidente de la Ligue contre la violence routière Chantal Perrichon s'est dite opposée à des aménagements locaux qui marqueraient "un retour à la féodalité, avec des barons qui avaient le droit de vie ou de mort sur les serfs". "Face aux chiffres, qui aura l'impudeur de repasser aux 90 km/h?"

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