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La Provence et Xavier Niel lorgnent sur La Marseillaise, les salariés hostiles

La colère gronde parmi les salariés du quotidien régional La Marseillaise, fondé pendant la Résistance, opposés au projet de reprise envisagé par le concurrent La Provence associé à l'entrepreneur Xavier Niel.

Quelque 200 personnes se sont rassemblées jeudi devant les locaux de La Marseillaise, en plein coeur de Marseille, pour défendre ce journal historique, marqué à gauche depuis sa fondation par le Parti communiste en 1943.

La société éditrice du journal, Les Fédérés, a été placée en liquidation judiciaire le 13 juillet par le tribunal de commerce de Marseille qui a fixé à vendredi 18H00 la date limite des offres de reprise.

"Niel niet", pouvait-on lire sur des banderoles pendues aux fenêtres du journal par les salariés.

Ils dénoncent "l'offre hostile", selon eux, que prépareraient en commun La Provence dont l'homme d'affaires Bernard Tapie est actionnaire majoritaire, et le fondateur de Free, Xavier Niel, via sa holding personnelle NJJ Presse.

La Provence va "certainement" déposer une offre demain (vendredi) via une structure de reprise avec une participation minoritaire de NJJ Presse, a confirmé à l'AFP une source proche de NJJ.

"On ne veut pas de leur offre. Ce qui les intéresse c'est le mondial La Marseillaise à pétanque (un concours international de pétanque, ndlr) qui rapporte de l'argent. Le journal, le pluralisme de l'information, ils s'en foutent", a déploré Emilie Parente, déléguée CGT.

"Cette offre prévoit la suppression de 80% des effectifs: seuls 10 à 15 emplois sur les 52 actuellement seraient conservés et le quotidien serait transformé en hebdomadaire. On ne peut pas accepter qu'un titre en absorbe un autre sur un même territoire, même si nous ne sommes pas en lutte contre nos collègues de La Provence", a affirmé de son côté Léo Purguette, rédacteur en chef de La Marseillaise.

"Il y aura nécessairement des suppressions de postes. Par la force des choses, toutes les fonctions support disparaissent. On ne va se concentrer dans la reprise que sur la ressource éditoriale", a reconnu une source proche de NJJ, précisant que l'idée est de faire de La Marseillaise un hebdomadaire "avec une transition digitale".

Selon cette source, il n'y a pas de problème de pluralisme car il ne s'agit pas d'arrêter le journal, mais "juste de changer de modèle économique".

Xavier Niel, fondateur d'Iliad (Free), a racheté le quotidien régional Nice-Matin et est co-actionnaire du Monde et de La Provence. Il a également repris l'activité de paris en ligne de Paris-Turf et le quotidien France-Antilles.

Dans un communiqué consulté par l'AFP, le Syndicat national des journalistes (SNJ) de La Provence assure que Jean-Christophe Serfati, PDG de ce quotidien, "a confirmé +réfléchir+ à une offre (...) pour racheter" le journal communiste.

- "Diversité essentielle" -

Une autre offre de reprise soutenue par les salariés de La Marseillaise doit être déposée vendredi par le media Maritima, a confirmé à l'AFP l'avocat de ce dernier, Me Hugo Gervais de Lafond.

Elle propose la création d'une société coopérative d'intérêt collectif associant les salariés de La Marseillaise, des investisseurs privés et des collectivités locales.

Créé en 2010, Maritima dont la ville de Martigues, dirigée depuis des années par un maire communiste, est actionnaire majoritaire, comprend une chaîne de télévision, une radio et un site internet employant une quarantaine de personnes.

"Je crois dans ce projet de reprise porté par le groupe maritimamedias", a tweeté le président LR de la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, Renaud Muselier. "Je ne partage pas toujours la ligne éditoriale de lamarsweb! Mais la liberté de la presse et sa diversité sont essentielles", a-t-il ajouté.

Le cinéaste Robert Guédiguian et le résistant Marcel Thomazeau ont lancé fin juillet un appel pour soutenir La Marseillaise qui jeudi avait recueilli plus de 2.000 signatures.

Diffusé à environ 15.000 exemplaires, sous forme d'un quotidien dans les Bouches-du-Rhône, le Var et une partie du Vaucluse, ainsi qu'en hebdomadaire dans le Gard et l'Hérault, La Marseillaise a déjà connu des difficultés financières dans le passé. De 200 en 2014, ses effectifs ont fondu à 50 aujourd'hui.

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