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Le CSA révoque Mathieu Gallet qui dénonce une pression de l'Etat

La sanction est tombée pour Mathieu Gallet : le CSA a décidé mercredi de le révoquer de la présidence de Radio France à compter du 1er mars, tirant les conséquences de sa condamnation pour favoritisme lorsqu'il dirigeait l'INA, et répondant aux voeux du gouvernement qui réclamait son départ.

"C'est une décision que nous regrettons profondément. La pression de l’État a été plus forte que la présomption d’innocence", ont dénoncé les avocats de Mathieu Gallet, Christophe Ingrain et Rémi Lorrain.

"Le Conseil supérieur de l'audiovisuel, réuni ce jour en assemblée plénière, a décidé de retirer son mandat au président de Radio France Mathieu Gallet" : c'est par un bref communiqué que les sept "sages" du gendarme de la radio et la télévision, réunis depuis le début de la matinée, avaient auparavant fait connaître leur verdict dans l'après-midi.

Dans les motifs de sa décision publiés en fin de journée, le CSA a récusé avoir cédé à une quelconque influence politique, assurant n'avoir tenu compte que de l'"intérêt général" et du "bon fonctionnement" de Radio France, lequel nécessite des relations "denses, confiantes et permanentes" entre son PDG et l'Etat.

La défense de Mathieu Gallet a réservé sa décision quant à un éventuel recours devant le Conseil d'Etat.

Le départ de Mathieu Gallet étant fixé au 1er mars par le CSA, un recours peut théoriquement être examiné avant cette date.

De son côté, la ministre de la Culture Françoise Nyssen, qui avait appelé au départ du PDG de Radio France, a rappelé la "position très claire" du gouvernement : "l'exemplarité" est "une condition absolue de bonne gouvernance et de légitimité" pour les dirigeants des services publics.

Mathieu Gallet était sur la sellette depuis sa condamnation le 15 janvier à un an de prison avec sursis et 20.000 euros d'amende, pour avoir favorisé deux sociétés de conseil lorsqu'il présidait l'Institut national de l'audiovisuel entre 2010 et 2014.

Le dirigeant de Radio France, qui n'a cessé de protester de son innocence, avait fait appel et refusé de démissionner, mais Mme Nyssen avait jugé "inacceptable" son maintien et appelé l'intéressé et le CSA à "tirer les conséquences" du jugement.

Le CSA avait lui-même nommé Mathieu Gallet en 2014, à la surprise générale, faisant du fringuant dirigeant de l'INA (qui vient d'avoir 41 ans) le plus jeune patron de la radio publique.

- "Révocation politique" -

Cette décision est un coup d'arrêt pour celui qui avait jusqu'ici connu une trajectoire météoritique.

Il avait surmonté plusieurs épreuves au début de son mandat à Radio France, dont une grève historique d'un mois contre des suppressions de postes.

Mais il pouvait se prévaloir d'un bilan solide, avec des finances qui devraient revenir à l'équilibre cette année et des audiences record.

Sa révocation intervient alors même que l'exécutif prépare une réforme en profondeur de l'audiovisuel public. Les patrons du secteur doivent d'ailleurs présenter ce vendredi à la ministre de la Culture des pistes de "synergies".

L'ancien ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, proche de Mathieu Gallet qu'il avait nommé à l'Ina, a déploré une "révocation politique" sur Europe 1, avançant que la rumeur d'une relation entre le patron de Radio France et Emmanuel Macron, que ce dernier avait publiquement démentie en pleine campagne présidentielle, avait contribué à le rendre "gênant".

C'est le CSA qui désignera le successeur de Mathieu Gallet, un processus qui prendra plusieurs mois. En attendant, le doyen des administrateurs de Radio France nommés par le CSA assurera l'intérim à partir du 1er mars.

Il s'agit de Jean-Luc Vergne, 69 ans, ancien DRH de plusieurs grands groupes (Sanofi, Elf Aquitaine, PSA, BPCE), qui n'avait pas d'expérience de l'audiovisuel avant d'intégrer le conseil d'administration de Radio France, fin 2016.

"Aujourd'hui sans capitaine, le navire Radio France, qui pourtant affiche des résultats d'audience exceptionnels, n'a plus ni gouvernail, ni boussole", s'est inquiété le Syndicat national des journalistes, réclamant une suspension de la réforme de l'audiovisuel public.

La CFTC a quant à elle fait savoir qu'elle "ne regrettera pas le départ de cet homme plus préoccupé par son image et sa carrière que par les salariés de Radio France et leur devenir".

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