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Le gouvernement inflexible face au débat sur la "cagnotte fiscale"

A la faveur de la bouffée d'air frais apportée par la bonne conjoncture économique, le débat sur la "cagnotte fiscale" fait son retour sur le devant de la scène, mais l'exécutif s'en tient pour l'instant à sa ligne: priorité au désendettement.

D'un côté, une croissance plus dynamique que prévu, entraînant un surplus de recettes fiscales, évalué pour 2017 à 4,3 milliards d'euros. De l'autre, une polémique sur le pouvoir d'achat des Français qui ne s'éteint pas: il n'en fallait pas plus pour que les discussions sur l'usage de la "cagnotte fiscale" reviennent sur le tapis.

L'appel du pied est venu de la majorité présidentielle. Vendredi, dans un entretien aux Echos, le rapporteur général (LREM) du budget à l'Assemblée nationale Joël Giraud a suggéré de redistribuer une partie de ce qu'il préfère appeler la "bonne fortune" budgétaire de la France aux Ehpad et aux territoires en proie à la désindustrialisation, voire aux personnes bénéficiant de minimas sociaux.

Une suggestion énoncée le jour même où l'agence de statistiques européenne, Eurostat, validait le remboursement en deux temps des 10 milliards d'euros lié à l'invalidation de la taxe sur les dividendes, ouvrant la voie à un passage du déficit français sous la barre des 3% du PIB, objectif affiché du gouvernement.

La fin de non-recevoir du gouvernement ne s'est pas faite attendre. "Ne refaisons pas les erreurs du passé où dès que les choses allaient mieux immédiatement on se mettait à redistribuer l'argent public, c'est-à-dire l'argent des contribuables", a aussitôt réagi le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire, faisant notamment allusion aux "cagnottes" fiscales du gouvernement Jospin au tournant de l'an 2000.

"La meilleure façon pour répondre aux attentes des Français, c'est de rétablir les comptes de la Nation, c'est de réduire le déficit, c'est de réduire la dette publique", a-t-il poursuivi.

Deux jours plus tard, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux rejetait même l'idée d'une "cagnotte fiscale" dans "un pays qui depuis plus de 40 ans vote un budget en déséquilibre, qui a accumulé quasiment 100% de la richesse nationale en dette".

Au fond, la ligne de l'exécutif est toujours la même: depuis plusieurs semaines, aussi bien le Premier ministre Edouard Philippe que les locataires de Bercy, Bruno Le Maire et Gérald Darmanin (Comptes publics), mettent en garde contre de faux espoirs concernant une éventuelle cagnotte et maintiennent leur cap visant à rétablir les comptes publics.

- 'Impatience' -

Dans un entretien au Monde paru lundi, le ministre de l'Economie assure que le gouvernement est "parfaitement conscient" de "l'impatience" des Français sur leur pouvoir d'achat.

"Faire toutes les exonérations de charge dès le début de 2018 plutôt qu'en deux temps aurait dégradé les finances publiques de manière excessive", fait-il valoir. "Il vaut mieux assumer et tenir son cap plutôt que de dilapider le résultat de nos efforts tout de suite", ajoute-t-il.

Une position saluée par Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE). "Chaque fois que le déficit de la France passe en dessous de 3%, il y a des bonnes âmes qui parlent de cagnotte", a-t-il déclaré lundi sur BFM Business.

"Si on les écoute, ça veut dire que 3%, ça ne sera pas le maximum du déficit en France, ce sera le minimum, ça veut dire que le déficit ne passera jamais en dessous de 3%", a-t-il observé, jugeant "dangereux" de redistribuer la cagnotte. "C'est un peu comme donner un bonbon alcoolisé à un ancien alcoolique".

Dans un message envoyé à l'AFP, Joël Giraud s'est toutefois défendu d'avoir présenté des propositions aboutissant à dégrader les comptes publics.

"Comme le Premier ministre, j'ai indiqué et je le pense fondamentalement, que cela doit +servir d'abord au désendettement+", a-t-il écrit. Mais "c'est le rôle du Parlement et du rapporteur général, en lien direct avec les électeurs et les contribuables, d'évaluer les éventuels angles morts des réformes", a-t-il ajouté, estimant que la "bonne fortune" rendait "la correction possible sans aboutir à des impasses budgétaires".

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