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Le lobbyiste pro-armes Wayne LaPierre, angulaire pour Trump

Le lobby des armes perd-il son influence en Amérique ? Wayne LaPierre, son puissant patron, n'a eu qu'à décrocher son téléphone pour parler à Donald Trump et apporter une réponse cinglante à la question.

La longue discussion entre le directeur général de la National Rifle Association (NRA) et le maître de la Maison Blanche s'est tenue mardi, sans être rendue publique.

Mais, comme l'a révélé The Atlantic, au moment où les deux hommes ont raccroché, un point crucial était scellé: il n'y aura pas de renforcement des vérifications des antécédents judiciaires et psychiatriques pour les acquéreurs d'armes à feu aux Etats-Unis.

Cette mesure aurait pu être la seule notable adoptée dans le sillage de deux attaques au fusil d'assaut qui ont fait 31 morts le premier week-end d'août au Texas et dans l'Ohio.

- Trois décennies -

M. LaPierre, 69 ans, se voyait crédité mercredi d'être parvenu à "retourner" le président américain qui, après ces deux tragédies, avait au contraire évoqué la possibilité de mieux contrôler ces antécédents.

En presque trois décennies, Wayne LaPierre a connu d'autres succès dans son combat pour enterrer toute initiative visant à limiter l'accès aux armes individuelles au pays de Colt et Smith & Wesson.

Semblant aussi inoxydable que les fusils qu'il aime brandir dans les meetings de la NRA, il a toutefois été récemment fragilisé par une féroce lutte de pouvoir à la tête de l'organisation.

Celle-ci a opposé M. LaPierre à l'ancien officier controversé Oliver North, qui a été jusqu'à fin avril président de l'organisation, un poste plutôt davantage honorifique.

Ce rififi s'est accompagné d'un grand déballage embarrassant pour Wayne LaPierre, à coups de documents internes qui ont fuité sur internet ou été anonymement transmis à la presse.

Celui parfois présenté comme un super VRP des armuriers s'est retrouvé suspecté d'abus de bien sociaux.

On a ainsi appris que, inquiet pour sa sécurité après une fusillade ayant fait 17 morts dans un lycée en Floride début 2018, le chef de la NRA avait souhaité déménager avec sa femme Susan dans une demeure ultra-sécurisée au Texas.

La NRA aurait accepté de financer l'achat de cette maison de 900 m2 à Dallas, à hauteur de 6,5 millions de dollars, même si la transaction n'a pas été finalisée.

- Palaces et stagiaire -

Wayne LaPierre s'est aussi vu reprocher des dépenses somptuaires, réglées par la NRA grâce notamment à des montages financiers impliquant Ackerman McQueen, une agence de publicité: une facture de 39.000 dollars dans un magasin de vêtements de Beverly Hills ou un transport en avion de 40.000 dollars, de Washington au Bahamas, le 17 décembre 2012.

Un voyage en 2014 en Italie et à Budapest a particulièrement fait tiquer les auteurs d'un audit: les frais de M. LaPierre ont inclus une note d'hôtel de 6.500 dollars et un autre séjour dans un palace donnant sur le lac de Côme ou encore une facture dépassant 18.000 dollars pour une voiture avec chauffeur.

Le lobbyiste des armes a également obtenu la prise en charge des 13.800 dollars du loyer d'une mystérieuse stagiaire d'été.

Ces polémiques n'ont pas empêché ce descendant d'une vieille famille française émigrée en Amérique d'être réélu fin avril aux commandes de la NRA.

Il en restera donc le visage public, celui que les Américains ont l'habitude de voir défendre farouchement le deuxième amendement de la Constitution sur la détention d'armes à feu, celui qui martèle que "le seul moyen de stopper un salaud avec une arme, c'est un type bien avec une arme".

Wayne LaPierre fait probablement partie des hommes les plus détestés aux Etats-Unis. Il est au contraire adulé par des millions d'autres Américains qui apprécient ses diatribes visant les milliardaires "socialistes" George Soros ou Michael Bloomberg, les démocrates, les élites d'Hollywood, les universités, ou les mouvements anti-bavures policières comme Black Lives Matter.

Au-delà du discours, M. LaPierre a radicalement transformé la NRA, fondée en 1871 pour promouvoir l'habileté au tir: d'une association au fort ancrage local, oeuvrant à la sécurité des tireurs, l'organisation est devenue une machine politique redoutable, à l'influence dépassant celle des 5 millions de membres qu'elle revendique.

C'est sous la houlette de Wayne LaPierre que la NRA est devenue extrêmement active auprès des élus, qu'elle finance ou note défavorablement, parvenant à bloquer au Congrès les propositions de loi qu'elle estime défavorables.

La NRA a versé 30 millions de dollars à la campagne de Donald Trump en 2016.

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