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Le secteur du bricolage, jusqu'alors préservé du e-commerce, entame sa mue

Le secteur du bricolage en France, jusqu'alors relativement préservé de la concurrence du commerce en ligne, est en train de se ré-inventer vers davantage de relation client, bousculé par des acteurs tels ManoMano ou les incontournables Amazon et Cdiscount.

Avec un chiffre d'affaires de plus de 25 milliards d'euros en 2016, le marché du bricolage est dominé par les grandes surfaces spécialisées (77% de parts de marché) tandis que le commerce en ligne n'est encore que très minoritaire (3%).

Mais le e-commerce a enregistré en 2016 une très forte progression (+25%), avec des "pure players" (Amazon, ManoMano) qui développent leur offre, selon les derniers chiffres de la Fédération des magasins du bricolage et de l'aménagement de la maison (FMB).

Cette mutation du secteur passe par des rachats (Bricorama par les Mousquetaires, déjà propriétaires de Bricomarché et Brico Cash), mais aussi des restructurations et suppressions d'emplois (409 chez Castorama et Brico Dépôt).

De quoi bouleverser en profondeur le secteur.

"Ce qu'on a engagé depuis 18 mois, c'est vraiment une transformation à marche forcée", explique ainsi à l'AFP le PDG de Mr Bricolage, Christophe Mistou, dont l'enseigne a renoué avec les bénéfices (65 millions d'euros) en 2017.

Avec un objectif pour le seul groupe coté en Bourse du secteur: intégrer ce qui est désormais considéré comme "basique" par ses clients en terme de service, "mais plus que ça, créer notre propre singularité".

"Ce n'est pas la trahir que de dire que la marque était poussiéreuse, ancrée sur des modes de fonctionnement qui ne sont pas ceux d'aujourd'hui", ajoute-t-il.

- Entraide et convivialité -

D'où l'ouverture, à la mi-mars, à Orléans, d'un nouveau concept de magasin au format "city" (800 m2), proposant une offre de produits adaptée "aux spécificités sociologiques et environnementales" locales.

Tout d'abord déployé dans quatre points de vente pilote, il sera progressivement mis en place dans l'ensemble du réseau, jusqu'à atteindre 1.000 magasins d'ici 2028.

Avec comme nouveautés des comptoirs "d'entraide" qui réuniront vendeurs et experts, clients et artisans, dans une ambiance "conviviale" (wifi, café, presse).

"Bien sûr qu'il faut dans nos magasins une offre de dépannage, de réparation, sur le métier de l'aménagement de la maison et du jardin, mais ça ne suffit pas, puisque aujourd'hui Amazon est capable de livrer du bricolage en 24 ou 48 heures", estime M. Mistou.

Chez Lapeyre, même credo: après avoir entamé en 2017 une "démarche de repositionnement global", l'enseigne, filiale du groupe Saint-Gobain, "signe en 2018 la concrétisation en magasin de cette stratégie", avec un magasin "flagship" Porte de la Villette à Paris, ouvert début mars.

"Cette démarche globale de repositionnement porte déjà ses fruits, les premiers retours sont très encourageants avec une croissance des ventes en 2017 supérieure à celle du marché", affirme François Rollet, son directeur général.

- Des "bricoleurs du dimanche" devenus PDG -

Ces nouvelles stratégies, les fondateurs du site ManoMano, Christian Raisson et Philippe de Chanville, les jugent avec un peu d'ironie, eux qui, avant de diriger une entreprise désormais florissante, n'étaient que des "bricoleurs du dimanche".

"La chance que nous avons eue, c'est que les acteurs traditionnels ont dix ans de retard sur le e-commerce", affirment-ils à l'AFP.

Quand ils créent leur société en 2012, aucun site marchand de bricolage n'existe et Amazon se lance à peine dans le secteur. En 2017, ManoMano a réalisé 250 millions de chiffre d'affaires (+64%) et vise désormais "le milliard".

"On est parti de rien, sans argent, on s'est +planté+ au début mais on s'est accroché et de 30.000 références à l'époque, on vend désormais plus de 2 millions de produits", expliquent-ils, précisant placer l'innovation et la gestion des données clients "au coeur de (leur) business".

L'avenir du secteur est aux mains de spécialistes comme eux, plaident-ils, "c'est une question de génération et d'ADN: le futur, ce n'est plus de voir arriver le client en magasin, c'est d'aller le chercher sur internet".

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