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Pas de big-bang mais une chaîne en moins : la réforme de l'audiovisuel est lancée

Renforcement des programmes régionaux, basculement de France 4 en numérique... La ministre de la Culture Françoise Nyssen a présenté lundi ses premières pistes pour réformer l'audiovisuel public, des annonces sans grande surprise qui ont suscité l'inquiétude de syndicats et organisations du secteur.

"L'audiovisuel public doit dicter le tempo, prendre des risques, oser", a lancé la ministre devant les patrons de France Télévisions, Radio France, Arte France, France Médias Monde, TV5 Monde et l'Ina, les six groupes de l'audiovisuel public.

Le premier volet de cette réforme, dont le but est notamment de mieux répondre à l'évolution des usages des téléspectateurs (SVOD, programmes à la demande...), se concentre sur le numérique "qui doit redoubler d'ambition", avec "un investissement supplémentaire de 150 millions d'euros d'ici 2022" puis "de 100 à 150 millions d'euros par an après 2022".

Cet effort se fera par un "redéploiement des moyens" et la mise en commun des projets, sachant que selon la presse, l'effort d'économies demandé au secteur oscillerait entre 250 et 500 millions d'euros d'ici 2022.

Sans donner de chiffres précis, l'entourage du ministère a indiqué qu'"un cadrage budgétaire avait été donné aux sociétés et qu'il serait communiqué dans les prochains jours".

Côté offres, dès mercredi, les groupes vont lancer une nouvelle plateforme de décryptage des fausses nouvelles hébergée sur le site de franceinfo. Puis une plateforme commune autour de la culture verra le jour fin juin, puis cet automne une offre d'éducation grand public (à destination des élèves, étudiants et enseignants) qui s'appuiera sur le site d'Arte Educ'Arte.

- Trois fois plus de régional -

Le plus ambitieux des projets communs est le lancement d'un média jeunesse pour tenter de reconquérir une tranche d'âge qui se détourne des médias traditionnels. "Nous allons bâtir un champion industriel du numérique pour reconquérir le jeune public", a assuré la ministre.

France Télévisions devra libérer "au moins le canal hertzien" de sa chaîne jeunesse France 4, qui basculera sur le numérique à une date non précisée.

Delphine Ernotte, la patronne de France Télévisions, a précisé que l'offre pour enfants serait refondue autour "d'une marque unique", "une offre délinéarisée" (à la demande, ndlr) et "sans publicité", avec des programmes pour enfants maintenus sur les autres chaînes.

"Il ne s'agit plus aujourd'hui d'ajuster notre modèle à la marge" mais de le "refonder radicalement", a estimé la dirigeante rappelant qu'il fallait "moins peser sur les dépenses publiques", alors que son groupe devra réaliser le plus gros des économies.

Une réflexion sur un éventuel basculement au tout-numérique de France Ô, chaîne de France Télévisions dédiée aux outremers, va également être lancée. "Il n'y a pas de disparition programmée" de France Ô, a cependant assuré la ministre des Outre-mer Annick Girardin, estimant que la chaîne devait "être préservée".

"Supprimer des chaînes comme France 4 ou France Ô, c'est limiter la production audiovisuelle indépendante, supprimer des emplois dans le secteur des films d'animation", a regretté le syndicat FO de France TV. La CGT dénonce de son côté "une réduction du périmètre du bouquet public que n'avait encore pas osé le pouvoir politique".

Les députées communistes Marie-George Buffet et Elsa Faucillon ont promis qu'elles mèneraient "le combat à l'Assemblée pour contrer ce vaste plan social afin de défendre la pluralité et la qualité de l'information".

France 3, qui diffuse actuellement deux heures de décrochages régionaux par jour, devra se recentrer sur la proximité et "tripler" ses programmes régionaux, et combiner ses forces avec les stations locales de Radio France. Des matinales communes France Bleu/France 3 seront testées dans deux régions à la rentrée, a indiqué la patronne de Radio France, Sibyle Veil.

Les questions de gouvernance, de financement et ce qui concerne la régulation du secteur (transposition de la directive européenne SMA) feront l'objet de lois courant 2019.

Entre temps, une mission de concertation dirigée par Catherine Smadja, ex-haut cadre de la BBC, devra approfondir les chantiers présentés lundi avec des premières conclusions mi-juillet.

Pour la société d'auteurs SACD, la "suppression de France 4 est un signal aussi inquiétant qu'inédit" et les annonces concernant la création sont "salutaires mais minimales".

Les annonces de lundi, "certes importantes et portées par des engagements forts, ne constituent pas la réforme d’ampleur à laquelle les professionnels s'attendaient", a regretté la Scam (Société civile des auteurs multimedia).

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