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Pétrole: des Saoudiens enthousiastes à l'idée d'investir dans Aramco

De l'emprunt à la vente d'actifs, les Saoudiens s'efforcent de réunir des fonds pour investir dans le géant pétrolier Aramco qui a confirmé sa prochaine entrée à la Bourse de Ryad, sans fournir plus de précisions sur l'opération.

Après des années de report, l'entreprise publique a annoncé dimanche qu'elle allait mettre en vente un nombre indéterminé d'actions sur le marché saoudien, mais aucune date n'a été fixée pour le début de l'opération et l'évaluation de l'entreprise reste entourée de mystères.

Cela n'empêche pas les investisseurs individuels de saliver à l'idée de posséder une part de l'entreprise la plus rentable du monde, fleuron national du royaume, et les appels se multiplient pour faire de cette introduction en Bourse un succès.

"Certains (Saoudiens) ont commencé à vendre des actions en vue d'acheter celles d'Aramco", observe Ibrahim Ahmed, un analyste saoudien de l'industrie de l'énergie qui envisage personnellement de placer ses économies dans la firme.

"Les gens y voient un bon investissement", ajoute-t-il, précisant toutefois que c'est "un placement (avantageux) sur le long-terme" et non "un ticket de loterie".

L'introduction en Bourse d'Aramco constitue la pierre angulaire du plan de réformes du prince héritier Mohammed ben Salmane visant à générer des liquidités pour financer des projets d'envergure et développer les secteurs non pétroliers de l'économie.

Le gouvernement aurait fait pression sur de riches familles et des acteurs institutionnels pour participer à l'introduction en Bourse, une action présentée par certains comme un devoir patriotique.

- "Occasion unique" -

Fahad Hachémi, gestionnaire de portefeuilles pour la Middle East Financial Investment Company, basée à Ryad, a déclaré à l'AFP que sa société avait la "forte intention" de participer à l'opération malgré le manque d'informations sur l'introduction.

L'Arabie saoudite a assoupli les conditions d'obtention de prêts pour que les citoyens ordinaires puissent acheter une participation dans l'entreprise, une stratégie jugée risquée par des experts.

Selon Eid al-Shamri, directeur général de la banque d'investissement Ithraa Capital, certains Saoudiens envisagent même de vendre leur maison ou d'emprunter pour acheter des actions.

"C'est un événement important qui fera date dans l'histoire de l'Arabie saoudite", a déclaré M. Shamri à Bloomberg News.

"Beaucoup de gens en parlent. Mais quelle sera l'ampleur de la participation de la population ?", s'est-il toutefois interrogé.

Dans un document de 21 pages, Aramco a qualifié l'introduction en Bourse d'"occasion d'investissement unique", précisant que le montant de son offre finale et le nombre d'actions à vendre seraient déterminés à la fin de la préparation de l'opération.

Selon son PDG Amin Nasser, l'entreprise souhaitent donner aux actionnaires l'occasion d'obtenir une "valeur ajoutée sur le long terme".

Afin de promouvoir la participation de toutes les couches de la société saoudienne, les femmes divorcées ou veuves ayant des mineurs à charge pourront recevoir des actions gratuites, selon les médias locaux.

Mais avec le peu d'informations communiquées sur l'introduction, il est difficile d'en déterminer le rendement, d'autant plus qu'il n'est pas certain qu'Aramco puisse être valorisée à 2.000 milliards de dollars comme l'a espéré le prince Mohammed.

La société de recherche financière Bernstein a ainsi estimé que la "juste valeur" du groupe se situait entre 1.200 et 1.500 milliards de dollars.

- "Demande importante" -

Selon certains rapports, Aramco a également du mal à obtenir l'adhésion des investisseurs institutionnels dans un contexte de perspectives à la baisse pour le secteur de l'énergie et de doutes sur la transparence et la gouvernance de l'entreprise.

Le fonds souverain norvégien, le plus gros au monde, n'a pas l'intention d'investir dans Aramco, a déclaré un responsable norvégien à l'AFP.

Les investisseurs s'inquiètent aussi des risques géopolitiques qui pèsent sur le titre.

L'annonce de l'introduction intervient quelques semaines à peine après des attaques contre des installations majeures d'Aramco, sur fond de tensions avec l'Iran, qui ont entraîné une réduction temporaire de la moitié de sa production.

"Je pense qu'il y a une demande importante parmi les investisseurs particuliers locaux, même si les grandes entreprises familiales pourraient être plus sceptiques", estime Steffen Hertog, professeur à la London School of Economics.

"Aramco sera une valeur sûre offrant des dividendes assez fiables", ajoute-t-il.

En 2018, l'entreprise a enregistré un bénéfice net de 111,1 milliards de dollars, soit plus que les bénéfices combinés d'Apple, Google et Exxon Mobil.

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