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L'Italie annonce un déficit public modéré pour éviter un conflit avec Bruxelles

Le nouveau gouvernement italien, clairement pro-européen, s'est fixé lundi pour objectif un déficit public à 2,2% du PIB en 2020, montrant ainsi sa volonté de désamorcer toute tension avec Bruxelles, tout en tentant de relancer une croissance atone.

Entrée en fonction début septembre, la coalition, formée du Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème) et du Parti démocrate (centre gauche), a choisi d'adopter une approche beaucoup plus constructive vis-à-vis de Bruxelles que le précédent gouvernement dominé par Matteo Salvini (extrême droite) qui avait multiplié les attaques frontales contre la Commission européenne.

En contrepartie de ses efforts pour respecter les règles du Pacte de stabilité européen, le gouvernement espère obtenir de Bruxelles environ 14 milliards d'euros de souplesse budgétaire.

Le chiffre du déficit est très légèrement au-dessus (+0,1 point) de ce qui avait été prévu en avril par la précédente coalition.

L'ancienne majorité avait été contrainte d'accepter ce chiffre, et un déficit à 2,04% pour 2019, à l'issue d'un dur bras de fer avec Bruxelles et une flambée des marchés financiers. Ces concessions avaient permis à Rome d'échapper à une procédure disciplinaire pour déficit excessif en raison de son niveau colossal d'endettement (2.400 milliards d'euros, 134,8% du PIB).

La nouvelle loi de finances, adoptée en conseil des ministres lundi, est basée sur une croissance de 0,6%.

Elle annule une hausse automatique de la TVA prévue pour 2020 et qui devait faire rentrer 23 milliards d'euros dans les caisses de l'Etat. L'objectif est d'éviter de freiner la demande interne et donc de plomber davantage la croissance qui s'est révélée nulle au premier semestre.

Mais trouver 23 milliards n'est pas simple.

- "Green New Deal" -

Selon le projet gouvernemental, 7 milliards d'euros doivent venir d'une accélération de la lutte contre l'évasion fiscale, "comme cela n'a jamais été fait par le passé", a indiqué à la presse le Premier ministre Giuseppe Conte. Il a évoqué "un grand pacte avec les citoyens", avec des incitations pour l'usage des moyens de paiement électroniques et des peines de prison pour les grands fraudeurs, alors que l'évasion fait perdre au moins 100 milliards d'euros par an à l'Etat italien.

En conférence de presse, le ministre de l'Economie Roberto Gualtieri a souligné que Rome avait voulu éviter un budget "restrictif" pour ne pas miner davantage la croissance et s'est dit "confiant que le dialogue positif avec la Commission européenne" sera "fructueux".

La loi de finances prévoit une baisse des charges sur le travail, met l'accent sur le développement durable et l'économie circulaire avec un "Green New Deal" (financé en partie par des obligations "vertes") et sur des mesures sociales dont un plan pour la gratuité des crèches afin d'aider les femmes qui travaillent.

Pour compenser partiellement la baisse de la TVA, la coalition va aussi bénéficier d'économies du fait d'une demande plus faible que prévu pour les départs anticipés en retraite et le revenu de citoyenneté destiné aux plus pauvres et également, selon M. Gualtieri, de 6 milliards de dépenses moindres liées à la nette baisse des taux d'emprunt en raison de la confiance retrouvée des investisseurs.

Si le budget semble peu ou prou dans les clous européens, il faudra néanmoins voir jusqu'à quel point la Commission européenne acceptera des objectifs relativement hypothétiques dans le domaine de la lutte contre l'évasion fiscale, a indiqué l'AFP Nicolas Nobile, expert au cabinet Oxford Economics.

L'objectif de croissance est aussi plus optimiste que celui d'autres experts.

Oxford Economics prévoit une hausse du PIB de seulement 0,2%-0,3% en 2020, en raison d'une demande nationale en berne et du ralentissement de l'industrie allemande, tandis que l'OCDE table sur 0,4%.

Après un déficit de 2,2% du PIB en 2020, Rome veut ensuite le réduire à 1,8% en 2021 et 1,4% en 2022.

Bruxelles ne cesse depuis des années de presser Rome de réduire sa colossale dette publique, qui en ratio est la deuxième plus élevé de la zone euro derrière la Grèce (180%). Elle devrait continuer à grimper en 2020 à 135,2% du PIB, puis amorcer une légère baisse, à 133,4% en 2021 puis 131,4% en 2022.

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