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Prison ferme et sursis requis en appel contre des opposants au projet d'enfouissement de déchets radioactifs

Des peines de prison allant de 12 mois ferme à huit mois avec sursis ont été requises lundi par la Cour d'appel de Nancy contre sept opposants au projet d'enfouissement des déchets radioactifs à Bure, qui ont tous choisi de garder le silence à l'audience.

L'avocate générale, Agnès Cordier, a demandé des peines allant de huit à dix mois avec sursis pour six prévenus, et une peine de 12 mois ferme pour le septième, déjà condamné pour d'autres faits.

Des réquisitions qui viennent "confirmer que c'est une procédure où la justice est utilisée pour porter atteinte à l'opposition contre le nucléaire", a déploré Me Raphaël Kempf, un des avocats des prévenus.

Le conseil a dénoncé un "déploiement disproportionné" de moyens policiers et judiciaires "pour au final quelques infractions mineures", et va plaider la relaxe avec ses trois autres confrères qui défendent collectivement les militants.

Ces opposants sont rejugés à Nancy pour détention de substances ou produits "en bande organisée", "destinés à la constitution d'engins explosifs ou incendiaires", et organisation d'une manifestation non déclarée à Bure (Meuse) le 15 août 2017. L'un d'eux est absent à l'audience et s'est fait représenter par son avocat.

- "Rien n'a été prouvé" -

Une audience qui a été "l'occasion de revenir sur cette information judiciaire longue, tentaculaire" qui avait duré trois ans et quatre mois, et "qui a entravé bien des libertés fondamentales" de ces sept militants, a souligné Me Mattéo Bonaglia, un autre de leurs avocats.

Un "dossier de renseignements" où "rien n'a été prouvé" a quant à lui plaidé Me Florian Regley, qui a balayé la qualification de "bande organisée". "Aucun projet, aucun dessein, et encore moins une chose organisée n'ont été mis au jour dans le dossier", a-t-il insisté.

En première instance, en juin 2021, le tribunal correctionnel de Bar-le-Duc avait condamné deux des sept opposants à neuf et douze mois de prison ferme. Les quatre autres avaient été condamnés à de peines de six à neuf mois avec sursis. Tous avaient fait appel de leur condamnation.

Un seul prévenu avait obtenu une relaxe totale, les autres ayant été simplement relaxés de la prévention d'association de malfaiteurs initialement visée. Le parquet de Bar-le-Duc n'a pas fait appel de cette relaxe.

"On ne peut désormais plus dire que l'ensemble des personnes qui avaient été mises en examen ont de près, ou de loin, commis une quelconque association de malfaiteurs", a ainsi salué Me Bonaglia.

La preuve pour le Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs (Cedra) que le dossier "n'en finit plus de se dégonfler", a noté sa porte-parole, Juliette Geoffroy.

- Droit au silence -

Le président de la Cour d'appel, Vincent Totaro, a lu pendant de longues minutes le rapport des faits des enquêteurs, qui avaient tenté d'établir les liens entre les différents protagonistes et leur implication dans l'organisation de cette manifestation d'août 2017.

Il a ensuite souhaité interroger les appelants sur leurs situations personnelles respectives, mais tous ont fait valoir leur droit au silence. Ils en avaient aussi fait usage durant leur garde-à-vue, leurs auditions devant le juge d'instruction, et lors du procès en première instance.

En raison de ce silence des prévenus, il n'y a pas eu d'auditions sur les faits reprochés, et le procès, initialement programmé jusqu'à mercredi, va s'achever dès mardi.

La manifestation du 15 août 2017 avait été l'un des nombreux épisodes d'une protestation au long cours contre ce projet, baptisé Cigéo, de centre de stockage de déchets hautement radioactifs à Bure, aux confins de la Meuse et de la Haute-Marne.

Conduit par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), ce projet controversé vise à enfouir, à 500 mètres sous terre, 85.000 m3 des déchets les plus radioactifs du parc nucléaire français, d'ici 2035-2040.

En juillet, ce projet a été déclaré d'utilité publique par décret, mais des opposants ont déposé en septembre un recours devant le Conseil d’État.

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