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Procès Tarnac: "l'alibi" de Yildune Levy en débat

Au moment du sabotage en 2008 d'une ligne SNCF en Seine-et-Marne dont on l'accuse, Yildune Levy affirme avoir retiré de l'argent à Paris: la réalité de ce retrait qui mettrait à bas l'accusation a été longuement débattue mardi au procès du groupe de Tarnac.

Huit membres de la communauté libertaire de Tarnac comparaissent depuis une semaine devant le tribunal correctionnel de Paris. Parmi eux, Julien Coupat et Yildune Levy sont poursuivis pour la dégradation d'une ligne du TGV-Est sur la commune de Dhuisy en Seine-et-Marne, dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008, à l'aide d'un crochet en fer à béton.

Or, ce 8 novembre, à 02H44, un retrait de 40 euros a été effectué à Paris dans le quartier de Pigalle sur un distributeur automatique de billets (DAB) avec la carte bleue de Yildune Levy.

Pourtant, des policiers qui affirment dans un procès verbal avoir filé le couple du 1er novembre 11H10 jusqu'au 8 novembre 06H00, disent avoir vu leur voiture à 04H05 "stationné tous feux éteints à l'entrée d'une voie de service" de la SNCF, en contrebas de la ligne TGV où un crochet en fer a provoqué l'avarie d'un train.

"Je revois la scène, je revois le distributeur de la Poste", a affirmé à l'audience la jeune femme, expliquant que le couple, de retour de Seine-et-Marne, a fait une halte à Pigalle pour acheter des cigarettes parce qu'ils savaient les bars du quartier ouverts tard la nuit. "Je suis une grosse fumeuse, je n'avais plus de clopes, alors j'ai dit à Julien de s'arrêter et là, je me suis aperçue que je n'avais plus de sous", a-t-elle expliqué.

Julien Coupat a livré la même version: "Cette nuit là, nous avons dormi devant le Mouflon d'or (un hôtel qui était complet) puis nous sommes allés faire l'amour dans la voiture un peu plus loin avant de rentrer sur Paris", a-t-il expliqué, confirmant leur arrêt à Pigalle: "Je l'attendais dans la voiture", a-t-il dit.

- "justice-fiction" -

"Si vous êtes certaine d'avoir fait ce retrait, cela veut dire que vous avez quitté le Trilport (Seine-et-Marne) au moins une heure avant, et donc que le procès verbal de la police est un faux?", interroge la présidente Corinne Goetzmann, en demandant alors pourquoi les policiers n'auraient pas poussé la falsification jusqu'au bout et écrit dans le PV qu'ils avaient vu le couple commettre le délit.

"J'ai du mal à m'expliquer l'aberration de tout cela. Alors à un moment donné, on fait de la justice-fiction", répond la jeune femme pour qui les policiers "subissaient une pression considérable". "Je pense qu'on leur a dit: il nous faut des coupables et on était les bons clients".

Étrangement, cet élément, capital pour la défense, n'est apparu que tardivement dans le dossier. Après les interpellations du 11 novembre 2008 à Tarnac, la police avait passé au crible les finances des gardés à vue mais aucun compte bancaire de Yildune Levy n'était apparu dans les recherches effectuées.

Ce n'est qu'en janvier 2009 qu'un relevé de la BNP au nom de la jeune femme apparait pour la première fois dans la procédure, lors d'un débat sur sa remise en liberté à la chambre de l'instruction de la cour d'appel.

Le retrait au DAB de Pigalle lui, sera involontairement mis au jour en juillet 2011 par la police qui recherchait alors des preuves sur l'achat de tubes dans un magasin de bricolage qui auraient pu servir au sabotage. Mais le document n'a pas été exploité jusqu'à ce que la défense s'empare du sujet en novembre 2012.

"Les policiers tombent sur un document qui me disculpe et n'en font pas état", a dénoncé la jeune femme à la barre, regrettant qu'on ai laissé passer les délais pour consulter le film des retraits effectués sur ce DAB.

La prévenue conteste également l'hypothèse, privilégiée par les enquêteurs, d'un prêt de sa carte bleue pour se confectionner un alibi: "Je trouve délirant que l'on puisse penser que j'ai fabriqué un alibi dont je ne me suis pas servi", dit-elle.

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