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Quand les drones bourdonnent dans les vignes du Luxembourg

Un drone pour pulvériser des fongicides sur les vignes: la Luxembourgeoise Corinne Kox, dont la famille cultive du raisin depuis le début du siècle dernier, fait partie des précurseurs en Europe de cette technique.

Férue de nouvelles technologies, la jeune femme, qui reprend progressivement l'exploitation de son père, un domaine de dix hectares dans la vallée de la Moselle luxembourgeoise, a commencé ses essais à la mi-juillet sur une parcelle de 40 ares.

Pour prévenir l'arrivée de champignons sur les vignes, elle utilise un mélange de soufre et de cuivre.

"Sans traitement, pas de raisin", assure à l'AFP la viticultrice rencontrée à Hettermillen (est), sous un soleil matinal.

Mais plutôt qu'un tracteur ou un hélicoptère, elle a choisi un drone pour l'épandage.

"Avec un tracteur, c'est quand même parfois dangereux de passer tout de suite après la pluie, parce que ça glisse", commente Mme Kox. Sur les vignobles à forte pente, le drone diminue le risque d'accident.

L'épandage par drone, particulièrement maniable et précis, est utilisé dans les vignobles californiens depuis des années. En Europe, il l'est en Suisse depuis environ trois ans et en Allemagne depuis 2018.

En France, en revanche, la méthode n'est pas possible. "Tous les traitements aériens de l'agriculture sont interdits, or le drone est classé comme traitement aérien", indique Robert Verger, responsable viticole de la FNSEA, premier syndicat agricole français.

Au Luxembourg, la pente des vignobles joue en faveur de l'épandage aérien. "Elle est la plus élevée dans l'UE, avec plus de 30%", souligne Erwan Nonet, rédacteur en chef d'une revue spécialisée dans la viticulture au grand-duché.

- Comme un essaim d'insectes -

Surplombant le village de Hettermillen, le domaine Kox s'étend sur de luxuriants coteaux, où la vigne est cultivée depuis 2000 ans.

Né en 1919, le grand-père de Corinne, François, a créé une entreprise de production de raisins sur le domaine et son père, Laurent, en a fait un vignoble en 1977.

Kox produit des vins blancs à partir de riesling, pinot blanc, auxerrois et Gewurztraminer, ainsi que quelques crémants et des vins rouges.

Au-dessus des ceps, le drone, d’une envergure de près d'1m50, génère un léger bruit qui fait penser à celui d'un essaim d'insectes.

Rien à voir avec l'avion du film d'Hitchcock "La mort aux trousses" qui largue à grande échelle des pesticides sur Cary Grant, caché dans un champ de maïs.

Le drone de Corinne Kox vole entre 1 mètre et 1,50 mètre au-dessus des ceps, avec une grande précision dans l'épandage.

Un pilote-instructeur veille au parcours – prédéfini ou guidé par ses soins - de l'engin depuis le bord de la parcelle.

L'appareil a une autonomie de 5 à 6 minutes et peut transporter jusqu'à 10 litres de produits.

Cela nécessite le retour régulier de l'engin à son point de ravitaillement où ses réservoirs sont rechargés en fongicide et ses batteries changées.

Selon Robert Verger, l'épandage de produits phytosanitaires par drone, pratiqué sur des cultures maraichères en Asie et en Afrique, est plus sûr pour l'agriculteur car "il n'est pas en contact avec le produit".

- Des jets privés aux drones agricoles -

L'appareil de Mme Kox, ainsi que les équipements et le pilote, sont fournis par Luxaviation, société créée au Luxembourg en 2008, premier opérateur d'aviation d'affaires en Europe et deuxième dans le monde, avec une flotte de 260 avions et hélicoptères.

Luxaviation se diversifie désormais dans les drones agricoles, marché où s'est déjà installé le suisse Agrofly notamment.

"Il y a d'autres viticulteurs qui sont intéressés", assure Christophe Lapierre, directeur de Luxaviation Drones.

Des discussions sont déjà en cours en Afrique du Sud et en Australie notamment, selon lui.

Le drone avec ses accessoires vaut 40.000 dollars (36.000 euros environ).

Mme Kox n'a pas acheté l'appareil, mais paye simplement le prix du service à Luxaviation, pour l'instant plus élevé que pour un épandage par hélicoptère.

"L'idée c'est quand même de diminuer les coûts pour arriver au coût de l'hélicoptère", dit-elle, sans préciser davantage.

Elle semble toutefois conquise: "l'année, prochaine, on aimerait bien augmenter le nombre de parcelles (…) pour dans quelques années être capable de survoler toute la Moselle luxembourgeoise".

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