Accueil Actu

Super Bowl: les annonceurs veulent du sens mais pas de polémique

Les annonceurs américains vont mettre à nouveau la somme record de plus de 400 millions de dollars sur la table à l'occasion du Super Bowl dimanche à Minneapolis, en prenant soin cette année d'éviter les sujets trop politiques.

Malgré une baisse d'audience de près de 10% cette saison, la NFL, la ligue professionnelle de football américain, continue de faire recette pour le Super Bowl, la finale du championnat, qui devrait être suivie par plus de 110 millions de téléspectateurs aux Etats-Unis.

Comme l'an dernier, le prix des 30 secondes d'antenne sur NBC, qui retransmet le match opposant les New England Patriots aux Philadelphia Eagles, s'est négocié au niveau record de quelque 5 millions de dollars, et le carnet de commandes est rempli.

Beaucoup d'automobiles, le poumon du Super Bowl, des habitués comme lessives, chips, bonbons et boissons seront au rendez-vous. Mais il y aura aussi des plus jeunes, comme Amazon, qui va lancer deux grandes campagnes en s'appuyant sur la publicité télévisée à l'ancienne.

L'enjeu, désormais, est de briller, lors d'une après-midi qui va compter près de trois-quarts d'heure de réclames sur quatre heures d'émission.

"Les spots doivent être plus créatifs, attirants et intéressants que ceux qui apparaissent ailleurs", explique Americus Reed II, professeur de marketing à la prestigieuse Wharton School of Business.

En 2017, une poignée de jours après l'investiture de Donald Trump, beaucoup avaient joué la carte politique, dans une atmosphère très tendue.

Airbnb était allé le plus loin, prenant le contre-pied du décret migratoire du nouveau président avec son spot invitant à "accepter" l'autre, quel qu'il soit.

"Toutes ces marques pensaient qu'elles allaient se démarquer avec leurs films publicitaires politiques chargés d'émotion", analyse Rebecca Brooks, co-fondatrice du cabinet marketing Alter Agents. Mais "ils semblaient se copier les uns les autres et ne pas être authentiques".

"Donc je pense que le retour sur investissement a été assez faible", explique-t-elle.

- Connotation sexuelle à éviter -

"Cette année, les annonceurs vont vraiment essayer d'éviter tout message ouvertement politique", dans un pays très divisé et gouverné par un président toujours prêt à réagir publiquement sur tous les sujets, anticipe Charles Taylor, professeur de marketing à l'université de Villanova.

Certains, tels les bonbons Skittles, le produit ménager Febreze ou M&Ms ont résolument pris la tangente et ressorti la carte de l'humour, très utilisée il y a une vingtaine d'années mais quelque peu délaissée depuis.

Alors que la tradition a longtemps poussé les marques à garder secrets leurs spots jusqu'à diffusion lors du Super Bowl, beaucoup ont déjà dévoilé leurs batteries pour créer le buzz et activer, plusieurs jours avant l'événement, le démultiplicateur des réseaux sociaux.

Mais parier sur l'humour est un jeu à double tranchant, prévient Rebecca Brooks.

"Tout le monde se souvient des pubs qui ont fait rire", dit-elle, "mais bien souvent, il n'y a pas d'association avec une marque". "Donc je pense que ces spots ne font pas ce qu'ils sont censés faire", c'est-à-dire augmenter la notoriété de l'annonceur.

Même s'il confirme qu'il vaut mieux rester à l'écart de la politique, "cela me paraît une bonne stratégie que de se concentrer sur ce que j'appellerais des sujets de société fédérateurs", fait valoir Charles Taylor.

"Nous vivons dans un monde de réseaux sociaux aujourd'hui, dans lequel les consommateurs participent à la création d'une marque et veulent comprendre ce qu'elle défend et ce que sont ses valeurs", ajoute Americus Reed.

Pour Rebecca Brooks, les annonceurs qui évoqueront des sujets de société potentiellement polémiques devraient le faire de façon "plus subtile que l'an dernier".

"Les marques vont se concentrer sur quelque chose qui est lié à leur image. (...) Vous verrez peut-être un couple gay ou une famille d'immigrants identifiée, mais je ne pense pas que ce sera martelé."

"Vous verrez des messages sur le thème du +Time's Up+ et du +#MeToo+, glissés directement et indirectement dans le contenu", prévoit Americus Reed, en référence au mouvement contre le harcèlement et pour l'égalité né à Hollywood après l'éclatement de l'affaire Weinstein.

Dans ce contexte, mieux vaut éviter le spot à connotation sexuelle, régulièrement utilisé par le passé, prévient Mike Bernacchi, professeur de marketing à l'université de Detroit Mercy.

"Les femmes lui tomberaient dessus, et les hommes aussi", dit-il. "Nous sommes dans une ère différente."

À lire aussi

Sélectionné pour vous