Accueil Actu

Taux américains: des risques pour les émergents et la zone euro (S&P)

La hausse des taux américains, à l'origine des récentes perturbations boursières, comporte des risques pour les pays émergents, voire la zone euro, si elle devait s'accélérer, a expliqué à l'AFP Jean-Michel Six, chef économiste Europe chez S&P Global Ratings.

Q: Pourquoi les marchés sont-ils nerveux actuellement ?

R: Au cours de la dernière année, les Etats-Unis ont connu une situation assez particulière: les marchés boursier et obligataire envoyaient des messages contradictoires. La Bourse était extrêmement positive sur les perspectives de l'économie américaine. A l'inverse, les taux d'intérêts ne bougeaient pas sur le marché obligataire malgré cinq hausses de taux consécutives par la Fed. En théorie économique, cela suggère que le marché attendait une récession dans un horizon d'un an. Il y avait là une incompatibilité de message. Aujourd'hui, on assiste à une réconciliation. Elle est bienvenue et logique. L'inflation commence à donner des signes d'accélération, la croissance américaine marche à plein pot: il est donc logique que les taux d'intérêt remontent.

Q: Si les taux remontent rapidement, qui serait touché en premier ?

R: Il faut raison garder. Pour l'instant, cette hausse des taux d'intérêts américains est encore très mesurée. Il ne serait toutefois pas souhaitable qu'elle se fasse de manière désordonnée et trop rapide. Là, on atteindrait des niveaux qui pourraient compromettre la reprise du commerce mondial qui est pour une bonne part menée par les pays émergents. Ces derniers se financent sur les marchés internationaux pour soutenir leur croissance et leur développement intérieur. Dans une partie au moins, ils sont dépendants du niveau des taux d'intérêt internationaux qui, eux-mêmes, sont une fonction des taux américains. Ces pays, en particulier ceux d'Afrique, seraient effectivement assez vulnérables en cas de forte hausse des taux. Ils seraient en première ligne, en quelque sorte.

Q: Et pour la zone euro ?

R: La zone euro connaît sa reprise la plus forte depuis le début de la crise. Elle est équilibrée et concerne tous les pays. Qu'est-ce qui pourrait faire dérailler cette reprise ? Un choc exogène provenant du reste du monde et donc en particulier des Etats-Unis. Deux variables pourraient faire peser un risque sur la reprise: les taux d'intérêt tout d'abord. Une hausse trop rapide aux Etats-Unis pourrait, dans une certaine mesure, se traduire par une hausse des taux européens qui pourraient compromettre l'investissement. La seconde variable est la baisse du dollar, à laquelle on assiste depuis quelques mois et que visiblement rien ne vient interrompre. Elle pourrait heurter la compétitivité des produits européens et devenir un risque pour la Banque centrale européenne. La forte hausse de l'euro gêne la BCE dans sa poursuite d'une inflation un peu plus élevée. Ce choc exogène, dont il ne faut pas exagérer l'ampleur pour l'instant, pourrait avoir des conséquences assez négatives à moyen terme sur la reprise européenne.

arz/aue/dga

À lire aussi

Sélectionné pour vous