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Une patronne à la tête de la Comex, spécialiste des travaux sous-marins

Petite-fille du fondateur, Alexandra Oppenheim-Delauze a repris les rênes de la Comex il y a deux ans, avec un objectif: relancer l'ex-leader mondial des travaux sous-marins, menacé de disparition après les deux chocs pétroliers, et l'ancrer à Marseille.

Vendre la Compagnie maritime d'expertise (Comex) ? Sa mère, Michèle Fructus, à la tête de l'entreprise de 2008 à 2016, l'avait envisagé. Une idée définitivement écartée par sa fille.

Si la Comex est dans l'ADN familial, Alexandra Oppenheim-Delauze, 51 ans, n'a pourtant rejoint l'entreprise qu'en mars 2016, après le décès brutal de sa mère, d'un cancer. Mais elle n'a pas hésité: "J'avais trop d'amour pour mes grands-parents et ma famille, et trop d'amour pour cette société, pour dire non. Ce n'était pas possible", explique-t-elle à l'AFP, dans son bureau envahi par les maquettes des robots sous-marins et autres bathyscaphes développés par l'entreprise depuis sa fondation, en 1961, par Henri-Germain Delauze.

Jusque là, le parcours avait été sinueux. Une année de sciences économiques, un cursus de psychologie, "une bonne clef de compréhension des gens", puis un second cycle de gestion sociale.

Ensuite, ce sera l'expérience sur le terrain, toujours loin des milieux sous-marins où s'illustrait alors la Comex dans le domaine du pétrole offshore notamment. Guichetière dans une banque, administratrice d'une école de danse, restauratrice, prof de maths, gérante d'un salon d'esthétique: "Il était important que je fasse mes armes ailleurs", explique la nouvelle PDG, un éternel sourire accroché aux lèvres.

Et la maçonnerie, pour couronner le tout. "L'idée, c'est de mettre son corps au service de la volonté, se dépasser. Ma spécialité, c'était les crépis et le carrelage", précise-t-elle. Pendant un an et demi, comme bénévole, elle travaille sur un chantier à Saint-Marcel, dans les quartiers Est de Marseille, à reconstruire un temple bouddhiste.

- "La Bonne Mère dans l'espace" -

Arrivée à la tête de la Comex, elle va s'attacher à responsabiliser les équipes: "Ce qui me scotche tous les jours, dans cette société, c'est l'énergie qu'elle fédère. Ce qui m'intéresse, c'est de faire adhérer les gens à un projet, faire en sorte que ça nourrisse l'individu, que le collectif soit au service de l'individu, et réciproquement".

En se délestant de sa division spécialisée dans les pétroles offshore, en 1992, la Comex perd près de 80% de son chiffre d'affaires. Aujourd'hui, avec 50 salariés, l'entreprise marseillaise est loin du mastodonte qui faisait partie des dix premières entreprises exportatrices françaises, au milieu des années 80, avec 2.000 salariés et plus d'un milliard de francs de chiffre d'affaires.

Fini la division nucléaire aussi, vendue en 2001. Mme Oppenheim-Delauze réorganise l'entreprise en cinq départements (marine, ingénierie, services, innovation et espace) et mise sur les ingénieurs et leur expertise. "Un patron, ce n'est pas un ingénieur. Un bon manager, un leader, c'est celui qui montre la direction. Ce que j'aime, c'est mettre les gens en autonomie", explique Mme Oppenheim-Delauze.

Et dans un secteur très masculin, dit-elle, "l'absence de testostérone, c'est une dimension supplémentaire. Nous sommes moins dans le besoin de montrer, de prouver, de conquérir".

A côté des caissons hyperbares et hypobares qui ont fait sa réputation, l'entreprise investit de nouvelles niches. Avec Orus 3D par exemple, un robot équipé de capteurs optiques et acoustiques relié à un ordinateur, elle peut reproduire l'image en trois dimensions d'un relief marin, avec une précision inférieure au millimètre. Une technologie qui va être utilisée en Amérique du Sud d'ici quelques semaines pour cartographier une épave gisant à 6.000 m de fond.

Mais la Comex vise aussi l'espace. Dans le cadre du projet "Moonwalk", l'entreprise a ainsi développé Gandolfi 2, un scaphandre permettant aux futurs spationautes de simuler des sorties dans l'espace ou des déplacements sur la lune ou sur Mars.

Espace toujours: en septembre, l'entreprise a testé le lancement d'un ballon stratosphérique depuis le Janus, son navire amiral, au large de Marseille. Essai réussi, avec un ballon lancé à 40 km d'altitude et récupéré avec succès, à moins d'un km du navire. Sur la plateforme expédiée dans la stratosphère, avec le ballon, la Comex avait installé une maquette de Notre Dame de la Garde.

"La Bonne Mère dans l'espace, c'est un clin d'oeil, c'est Marseille", sourit Alexandra Oppenheim-Delauze.

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