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Allemagne: en plein marasme, le SPD vote sur l'alliance avec Merkel

Le parti social-démocrate allemand a commencé mardi à consulter sa base sur le projet d'alliance avec Angela Merkel, alors qu'il traverse une crise sans précédent: il est désormais dépassé dans les sondages par l'extrême droite.

Les quelque 464.000 adhérents du plus vieux parti allemand doivent voter par courrier ou par internet pour décider si, oui ou non, ils donnent leur feu vert pour gouverner à nouveau avec les conservateurs de la chancelière après l'accord de coalition signé entre les deux camps.

Le résultat, qui sera connu le 4 mars, est crucial pour l'avenir de Mme Merkel, sortie victorieuse mais affaiblie des législatives du 24 septembre 2017 du fait d'un score décevant pour son parti démocrate-chrétien.

Un "non" serait synonyme d'instabilité pour la première économie européenne et de nouvelles élections appelées, au vu des sondages, à profiter surtout à la formation d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD).

- Coup de massue -

Le résultat du vote des adhérents du parti social-démocrate est loin d'être acquis.

La direction du mouvement a obtenu d'importantes concessions des conservateurs pour prix d'une alliance, à commencer par le ministère des Finances.

Mais la base est très divisée sur l'idée même de continuer à gouverner avec Mme Merkel. Beaucoup jugent que le parti a perdu ses racines de gauche au fil des alliances (2005-1999, 2013-2017) avec la dirigeante conservatrice et n'offre plus d'alternative réelle aux électeurs.

Le mouvement de Jeunesse du SPD a pris les rênes de la contestation et réclame un virage à gauche sur le modèle des Travaillistes britanniques pour ressourcer le parti, affaibli aux législatives par son pire score d'après-guerre (20,5%).

Le vote des militants arrive au pire moment pour le SPD. Les atermoiements et tensions internes des derniers mois ont provoqué une guerre des chefs qui a abouti au départ précipité du président du parti, Martin Schulz, après moins d'un an en poste.

Dernier coup de massue: en chute libre, le parti est désormais rattrapé dans les sondages par l'AfD, un séisme politique dans le pays. Une enquête publiée cette semaine par le quotidien Bild donne pour la première fois l'extrême droite devant le SPD, à 16% contre 15,5%.

Le SPD a dû en outre essuyer mardi les railleries de la presse populaire lorsqu'il est apparu que des petits plaisantins avaient réussi à faire inscrire un chien parmi les nouveaux militants souhaitant participer au vote. Le parti a promis de faire "annuler" cette inscription loufoque.

- 'Objectif CDU' -

"Nous sommes un grand parti!", a jubilé l'une des figures de proue de l'AfD, Alice Weidel, après la publication du sondage.

"Notre prochain objectif, maintenant, c'est la CDU", le parti conservateur de Mme Merkel, a claironné le député AfD Bernd Baumann. Même si la CDU se maintient dans les sondages à son niveau -historiquement bas- des élections, autour de 32%.

L'embellie de l'AfD est largement due "à l'image désastreuse que le SPD donne de lui-même en ce moment", explique à l'AFP Hajo Funke, politologue à l'Université libre de Berlin.

Mais dès qu'un nouveau gouvernement sera en place, ce qui passe par un "oui" des militants SPD au contrat de coalition, alors "l'AfD baissera de nouveau dans les sondages", prédit-il.

L'irruption de l'extrême droite sur la scène nationale, avec une centaine de députés depuis septembre, a commencé à faire imploser le système politique d'après-guerre, avec retard sur la plupart des autres pays européens, à commencer par la France.

"La crise", proclame en Une dans sa dernière édition l'hebdomadaire Der Spiegel.

L'usure des grands partis traditionnels, qui assuraient la stabilité du pays si enviée à l'étranger, est manifeste et frappe d'abord la social-démocratie, comme ailleurs en Europe.

Les sociaux-démocrates sont passés de 40% des voix aux législatives de 1998 à moins de 20% aujourd'hui, privés d'espace politique par la politique très centriste d'Angela Merkel et par l'existence d'une gauche radicale forte.

Mais les conservateurs aussi sont à la peine. "L'Allemagne, havre de stabilité en Europe, devient politiquement instable", s'alarme Der Spiegel.

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