Accueil Actu

Comment Belfast a changé de visage, 20 ans après l'accord de paix

Apaisée, la capitale nord irlandaise poursuit sa mue tout en gardant des traces des Troubles depuis la paix, signée le 10 avril 1998, explique à l'AFP Nuala McAllister, 28 ans, maire de Belfast issue de l'Alliance, un parti ni unioniste ni nationaliste.

Dans une nation au taux de chômage historiquement bas (3,2%) mais à la croissance faible (1,1%), les promesses d'une paix porteuse de prospérité n'ont pas été toutes tenues et certains stigmates du passé font encore partie du quotidien.

QUESTION. En vingt ans, quels ont été les changements les plus visibles dans la ville?

REPONSE. Paradoxalement, nous avons vu plus de murs de la paix (séparant les communautés à majorité catholique et protestante pour raisons de sécurité, NDLR) se construire après l'accord du Vendredi saint qu'auparavant. Il y en a qui coupent des rues, il y en a un qui bloque la route la plus directe entre nos hôpitaux. Nous allons en abattre certains, mais cela demande de la confiance entre communautés. Pour moi, l'intégration est la voie à suivre pour changer les coeurs et les esprits sinon cela donne de nous une image de société ségréguée, ce qui est le cas quand on voit ces murs mais aussi à travers notre système éducatif (où catholiques et protestants fréquentent majoritairement des établissements séparés, NDLR).

Le tourisme constitue un changement important: nous enregistrons des records de fréquentation, notamment avec notre attraction numéro un, le musée du Titanic. La ville s'est développée avec les commerces et les bureaux. Il y a eu le retour des investissements: Belfast est leader en matière d'investissement financier et technologique et tout cela a été rendu possible par l'accord de paix de 1998.

Q. Quelle est la marge de progression pour résoudre les problèmes du passé?-

R. Nous avons encore du travail et nous manquons de leadership politique sur le sujet des murs de la paix car diviser fonctionne bien pour l'unionisme et le nationalisme. Cela les fait prospérer, ce qui n'arriverait pas dans un système électoral qui ne serait pas fondé sur les appartenances claniques. Et nous avons encore des problèmes liés aux paramilitaires, de ce point de vue, nous n'avons pas encore réglé correctement notre passé. Ils contrôlent toujours certaines communautés malheureusement. Mais là encore, il faut de l'autorité et c'est aussi la responsabilité de la police, de la justice de travailler ensemble pour surveiller quels groupes ont des soutiens politiques.

Q. Quel regard est porté sur les accords de paix par les jeunes générations?

R. Belfast compte environ 35% de jeunes de moins de 30 ans. Je rencontre beaucoup d'écoliers et de jeunes de 16 à 18 ans et ils sont peu nombreux à évoquer l'accord de paix parce que pour eux c'est presque acquis. Mais c'est un sujet qui commence à ressurgir à cause du Brexit.

Les jeunes sont dans l'expectative sur ce que le Brexit signifie pour eux en Irlande du Nord, car ils se démènent déjà ne serait-ce que pour financer leurs études ou obtenir un diplôme supérieur.

Propos recueillis par Julien LAGACHE

À lire aussi

Sélectionné pour vous