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Commission: un vaste portefeuille pour Goulard malgré les soupçons

La Française Sylvie Goulard s'est vu confier mardi un vaste portefeuille économique au sein de la prochaine Commission européenne, au moment où elle était entendue par la police, en région parisienne, sur les soupçons d'emploi fictif d'un de ses assistants lorsqu'elle était eurodéputée.

Mme Goulard, nommée mardi au "Marché intérieur", a été entendue sous le régime de l'audition libre dans cette enquête, qui l'avait contrainte à quitter son poste de ministre des Armées en juin 2017, un mois seulement après son entrée en fonction.

Elle "a été entendue (...) à propos des salaires perçus par son assistant parlementaire local", a-t-on commenté dans son entourage.

"Cette journée complète la décision administrative qui l'a mise hors de cause sur les mêmes faits, prise par le secrétariat général du Parlement européen", a-t-on ajouté.

Cinq autres anciens eurodéputés du Modem, un parti centriste qu'elle a depuis quitté, sont soupçonnés, comme Mme Goulard, d'avoir rémunéré sur des fonds européens l'emploi fictif de certains de leurs assistants.

Outre l'information judiciaire ouverte en France, l'Office européen de lutte antifraude (Olaf), un organisme indépendant, a ouvert une enquête.

"L'Olaf est complètement indépendant. Ils vont finir leur travail et on va les écouter", a commenté mardi la prochaine présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, insistant sur "la présomption d'innocence".

- "Arrogance" -

En attendant la fin de ces deux enquêtes, Sylvie Goulard, dans l'incapacité de prouver que l'un de ses assistants avait bien travaillé pour elle entre juillet 2014 et février 2015, a d'ores et déjà accepté de rembourser 45.000 euros aux services financiers du Parlement européen, qui ont clos son dossier.

Les eurodéputés qui l'auditionneront, a priori dans les premiers jours d'octobre, avant de valider ou non sa candidature à la Commission, ne devraient pas manquer d'insister sur cette tache dans le prestigieux CV de la Française.

En tant que commissaire européenne au "Marché intérieur" à partir du 1er novembre, cette spécialiste de l'UE aux compétences reconnues sera en charge de la politique industrielle, du marché unique numérique, mais aussi de l'industrie de la défense et de l'espace.

Conseillère politique à la Commission, puis eurodéputée de 2009 à 2017, cette forte personnalité, qui parle l'allemand, l'anglais et l'italien, était jusqu'à présent sous-gouverneure à la Banque de France, un poste qu'elle avait rejoint six mois après son passage éclair au gouvernement français.

L'audition devant le Parlement "est une étape démocratique majeure et je vais dès à présent consacrer toute mon énergie à (la) préparer", a réagi dans un communiqué Mme Goulard, soutien de la première heure du président français Emmanuel Macron.

Cette audition s'annonce cependant délicate pour la Française, qui n'a pas gardé que des amis dans l'hémicycle: sous couvert d'anonymat, certains fustigent aujourd'hui encore son "arrogance".

- "Indécent" -

La ministre française des Affaires européennes, Amélie de Montchalin, a pour sa part réaffirmé mardi à l'AFP que Mme Goulard avait été "blanchie par le Parlement européen".

"Le Parlement ne l'a pas blanchie. Elle reconnaît que c'est un emploi fictif puisqu'elle rembourse !", conteste l'eurodéputé écologiste David Cormand, interrogé par l'AFP, pour qui la France aurait dû proposer un autre nom.

Un autre point noir est également susceptible d'embarrasser cette femme d'influence: son travail pendant près de trois ans pour un think tank américain, l'institut Berggruen, pour plus de 10.000 euros par mois, alors même qu'elle était eurodéputée.

"Je trouve indécent de prendre des rémunérations pareilles pour un travail dont on se demande la nature quand on est payé à plein temps par les citoyens européens pour être député", fustige le co-président du groupe écologiste au Parlement, le Belge Philippe Lamberts, interrogé par l'AFP.

Evasif, l'organisme en question assure qu'elle a "participé à l'organisation" de deux conférences, d'une table ronde et préparé "des documents d'information".

"C'est un travail normal de député !", s'étrangle un ancien membre de l'hémicycle. "Quand un eurodéputé fait des conférences ou des papiers de réflexion, il n'est pas payé pour ça".

Il n'y a rien d'illégal cependant dans ce travail pour le think tank, une activité que Sylvie Goulard a dûment déclarée auprès du Parlement européen.

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