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Ukraine: Des enquêteurs de l'ONU accusent Moscou de crimes de guerre

Loin de la prudence de parole habituelle de l'ONU, des enquêteurs de l'organisation ont accusé vendredi Moscou d'avoir commis un "nombre considérable" de crimes de guerre dans quatre régions ukrainiennes dans les premières semaines suivant l'invasion russe.

Ils ont revanche jugé qu'il était trop tôt pour parler de crimes contre l'humanité, contrairement à ce qu'affirment des ONG et l'Ukraine.

Cette commission d'enquête de l'ONU a présenté au Conseil des droits de l'homme (CDH) les premières conclusions de son investigation sur les violations des droits humains commises à la fin de février et en mars par les forces russes dans les régions de Kiev, Tcherniguiv, Kharkiv et Soumy, situées dans le nord et nord-est de l'Ukraine.

Les enquêteurs se sont penchés spécifiquement sur ces quatre régions à la suite d'une demande en ce sens faite en mai par le Conseil. Une autre résolution, adoptée en mars par le Conseil, leur demande d'enquêter dans l'ensemble du pays, et ils doivent publier un vaste rapport à ce sujet en mars 2023.

En attendant, "sur la base des preuves recueillies par la Commission, celle-ci a conclu que des crimes de guerre ont été commis" dans ces quatre régions, a déclaré le président de la commission, Erik Mose, devant le Conseil, énumérant les bombardements russes sur des zones civiles, de nombreuses exécutions, la torture et les mauvais traitements ainsi que les violences sexuelles.

Il a précisé devant les médias que les investigations avaient "montré un nombre considérable de crimes de guerre" commis par les Russes, tandis que seuls deux cas de mauvais traitements infligés à des soldats russes par les forces ukrainiennes ont été trouvés jusqu'à présent durant la période concernée.

"Il y a une différence considérable entre des crimes de guerre commis à très grande échelle d'un côté et de l'autre deux cas de mauvais traitements", a renchéri un autre enquêteur Pablo de Greiff, interrogé par l'AFP.

L'ONU a évoqué des soupçons de crimes de guerre mais "nous sommes la premières mission onusienne d'établissement des faits à conclure que nous avons trouvé des crimes de guerre" dans ces quatre régions, a relevé M. Mose.

Le procureur de la Cour pénale internationale, Karim Khan, avait ouvert une enquête sur les crimes de guerre et crimes contre l'humanité présumés en Ukraine quelques jours seulement après l'invasion russe.

Et l'ambassadeur français Jérôme Bonnafont a dénoncé vendredi devant le Conseil l'invasion russe qui s'accompagne notamment "de meurtres, de tortures, de déportations forcées, tout ceci étant constitutif d'autant de crimes de guerre et, peut être - la justice se prononcera - de crimes contre l'humanité".

- Grand nombre d'exécutions -

Mais "jusqu'à présent, nous n'avons pas trouvé de crimes contre l'humanité", a expliqué M. Mose. "Nous allons poursuivre nos investigations. C'est une stratégie générale de cette commission que de dire ce dont nous sommes convaincus, et à ce stade, c'est là où nous en sommes".

En attendant, les accusations sans appel des enquêteurs sur les crimes de guerre ont été saluées par de nombreux diplomates au Conseil, tandis que Moscou avait laissé sa chaise vide.

Au cours des enquêtes dans ces quatre régions, la commission a visité 27 villes et localités et a interrogé plus de 150 victimes et témoins.

"Nous avons été frappés par le grand nombre d'exécutions dans les régions que nous avons visitées. La Commission enquête actuellement sur ces décès dans 16 villes et lieux. Nous avons reçu des allégations crédibles concernant de nombreux autres cas d'exécutions", a déclaré M. Mose devant le Conseil.

Les corps retrouvés ont pour caractéristiques communes d'avoir des signes visibles d'exécutions, tels que des mains attachées derrière le dos, des blessures par balle à la tête ou des gorges tranchées.

La commission a également dénoncé l'utilisation par la Russie d'"armes explosives à large rayon d'impact" sur des zones civiles, ainsi que la torture perpétrée en détention, y compris d'enfants. Certaines victimes ont également indiqué avoir été détenues pendant des semaines en Russie, tandis que d'autres y ont disparu.

"Les interlocuteurs ont décrit des passages à tabac, des chocs électriques et une nudité forcée, ainsi que d'autres types de violations dans ces lieux de détention", a souligné M. Mose.

Des cas de violences sexuelles, y compris sur des enfants, ont également été rapportés aux enquêteurs de l'ONU.

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