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Dopage: l'athlétisme russe s'enfonce toujours plus dans la crise

Jusqu'où s'enfoncera l'athlétisme russe ? Suspendue depuis novembre 2015 pour un scandale de dopage à grande échelle, la Fédération d'athlétisme (Rusaf) est désormais accusée d'obstruction à une enquête pour sauver la tête de l'une de ses têtes d'affiche, Danil Lysenko.

Ce nouveau scandale intervient au plus mauvais moment pour l'ensemble du sport russe, à nouveau dans le viseur de l'Agence mondiale antidopage (AMA) et sous la menace d'une exclusion des Jeux olympiques de Tokyo 2020, qui auront lieu dans huit mois.

Le tout à la veille du Conseil de la Fédération internationale (IAAF), qui devait encore discuter du cas russe !

L'Unité d'intégrité de l'athlétisme (AIU), en charge de la lutte antidopage, a frappé fort jeudi, en suspendant provisoirement cinq officiels de la Fédération russe d'athlétisme, dont son président Dmitri Chliakhtine, sa coordinatrice de l'antidopage Elena Ikonnikova, ou son directeur exécutif Alexander Parkin, ainsi que Danil Lysenko et son entraîneur Evgeniy Zagorulko.

Les accusations sont graves: falsification de documents dans le but d'éviter une sanction à Lysenko, vice-champion du monde 2017 du saut en hauteur à Londres, et l'un des symboles de l'athlétisme russe sous drapeau neutre.

La Rusaf est suspendue par l'IAAF depuis novembre 2015, après la révélation d'un vaste scandale de dopage, avec des cas de dopage d'athlètes russes couverts par la fédération nationale.

- Trois "no shows" -

Depuis, elle est placée sous étroite surveillance. Seuls les athlètes considérés comme irréprochables peuvent s'aligner sur les compétitions d'athlétisme mais uniquement sous drapeau neutre.

L'AIU a notifié le 25 juin 2018 à Danil Lysenko un troisième manquement à ses obligations de localisation pour les contrôles inopinés, communément appelés "no shows", en l'espace de 12 mois.

Lysenko, qui figurait sur la liste des athlètes autorisés par l'IAAF, a été suspendu provisoirement le 3 août 2018, à trois jours des Championnats d'Europe de Berlin, pour lesquels il était l'un des favoris pour l'or.

L'enquête menée pendant 15 mois par l'AIU "a conclu que des officiels de la Rusaf ont été impliqués dans la fourniture de fausses explications et de documents falsifiés à l'AIU dans le but d'expliquer les +no shows+ de l'athlète", a souligné l'instance.

La Rusaf et tous les accusés ont jusqu'au 12 décembre pour fournir des réponses à l'AIU.

"Une réunion des responsables de la Fédération sera convoquée dans les plus brefs délais. C'est à ce moment-là qu'on va répondre à toutes les questions concernant ma suspension et celui qui sera président de l'organisation par intérim", a réagi dans la soirée Dmitri Chliakhtine, dans un communiqué de la Rusaf.

Cette affaire, initiée l'an passée, avait conduit le patron de l'Agence antidopage russe (Rusada), Iouri Ganous, à réclamer la démission des dirigeants de la Rusaf. Dans une interview à L'Equipe, le 18 septembre, Iouri Ganous avait jugé que "l'échelle des dérives" à la Rusaf était "juste folle". "Le cas de Lysenko est criminel", ajoutait-il.

- A nouveau ciblée par l'AMA -

En novembre 2015, après l'éclatement au grand jour du scandale de dopage institutionnalisé dans l'athlétisme russe, l'agence nationale russe antidopage, la Rusada, avait elle aussi été suspendue, par l'AMA.

Cette suspension a été levée par l'AMA en septembre 2018, mais à condition notamment qu'elle fournisse les données électroniques de l'ancien laboratoire de Moscou.

En septembre 2019, l'AMA a ouvert une procédure à la suite d'"incohérences" constatées dans les données remises début janvier 2019, demandant à la Rusada de répondre à une série de questions.

"J'ai vu les documents et les questions posées par l'AMA et je ne vois pas comment ce serait possible (pour la Russie) de répondre (de manière satisfaisante) à ces questions", a estimé Iouri Ganous lors de la cinquième conférence mondiale sur le dopage dans le sport, début novembre à Katowice (Pologne).

Le Comité de révision de la conformité (CRC) de l'AMA s'est réuni dimanche dernier. Il soumettra "une recommandation officielle" sur d'éventuelles sanctions contre la Russie, qui sera à l'ordre du jour du comité exécutif de l'AMA le 9 décembre.

L'AMA, qui n'avait pas pu empêcher la Russie d'aller aux JO d'été de Rio-2016 - sauf en ce qui concerne l'athlétisme, suspendu par l'IAAF - dispose désormais d'un règlement qui lui permet d'imposer des sanctions sportives, avec un appel possible devant le Tribunal arbitral du sport (TAS).

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