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Elections européennes: le tournant à l'extrême droite du UKIP

Le parti europhobe UKIP qui était arrivé en tête des élections européennes en 2014 au Royaume-Uni a depuis connu une longue dégringolade dont il tente de se relever en opérant un virage à l'extrême-droite.

Cinq ans après avoir raflé plus d'un quart des voix et 24 sièges de députés européens, le parti de l'indépendance du Royaume-Uni se débat pour exister après avoir perdu son leader, Nigel Farage, dans la foulée du référendum sur la sortie de l'Union européenne en 2016. Celui-ci a créé en février une nouvelle formation, le populiste Parti du Brexit, qui caracole en tête des sondages tandis que son ancien parti est à la traîne.

"La question se pose aujourd'hui de savoir si le UKIP peut survivre", dit Matthew Goodwin, professeur de politique à l'Université du Kent, à l'AFP.

Depuis qu'il a atteint son objectif principal d'amener les Britanniques à voter en faveur du départ de l'UE, le parti a été sur une pente descendante.

Il est aujourd'hui dirigé par Gerard Batten -quatrième titulaire du poste depuis la démission de Nigel Farage-, qui est pointé du doigt pour avoir défendu des positions perçues comme islamophobes.

Le parti a ouvert ses bras à des personnalités d'extrême droite dont Tommy Robinson, fondateur de la Ligue de défense anglaise, devenu conseiller.

Le parti "a évolué dans une direction très différente et, selon certains, plus sombre", explique Matthew Goodwin. "C'est une droite radicale, dont les points de vue peuvent être extrêmes par rapport à l'opinion publique moyenne".

- "héritiers de Churchill" -

Pour les élections européennes du 23 mai, le UKIP a sélectionné parmi ses candidats Carl Benjamin, un YouTuber controversé connu sous le pseudonyme de Sargon d'Akkad et comptant près d'un million d'adeptes. Agé de 39 ans, il représente le parti dans le sud-ouest de l'Angleterre.

M. Benjamin s'est fait connaître sur internet lors de l'affaire du "Gamergate" en 2014, portant sur des menaces et le harcèlement de personnes critiquant la façon dont les femmes sont représentées dans l'univers des jeux vidéos.

Il a provoqué une autre controverse en refusant de s'excuser pour avoir tweeté en 2016 qu'il "ne violerait même pas" la députée travailliste Jess Philips, des propos qui font l'objet d'une enquête de police.

Certains de ses rivaux aux élections européennes refusent de participer à des débats avec lui tandis que les associations antiracistes Hope Not Hate et Stand Up to Racism ont dénoncé ses propos.

En campagne cette semaine dans la ville d'Exeter (sud-ouest de l'Angleterre), M. Benjamin a déclaré que les militants UKIP étaient dépeints de manière injuste.

"Ce sont les héritiers de Winston Churchill", a-t-il affirmé à l'AFP. "Nous sommes pour le libre marché, la liberté des gens", a-t-il dit.

Carl Benjamin a reçu un accueil mitigé dans cette région principalement rurale, qui s'est majoritairement prononcée pour le Brexit en 2016 et vote plutôt pour les conservateurs et les libéraux-démocrates.

Il a réussi à attirer de petits groupes de supporteurs majoritairement masculins, mais a reçu un milkshake et du poisson cru lancés par des manifestants.

"Ils essaient de mobiliser les gens autour du Brexit mais en fait ce qu'ils ont (à proposer) est beaucoup plus sombre", estimait Ghee Bowman, un manifestant de 58 ans, habitant Exeter.

UKIP a séduit au moins une personne en vue: le polémiste ultra-conservateur britannique Milo Yiannopoulos qui est devenu membre du parti et a rejoint le candidat en campagne.

Cet ancien contributeur du site web d'actualité américain Breitbart a qualifié le manifeste du parti de "plutôt respectable et raisonnable" et attribué les difficultés de l'UKIP au snobisme britannique contre un parti qui n'a "pas honte de représenter la classe ouvrière".

"Si vous sortez des limites de ce que vous êtes autorisé à dire, de la façon dont vous êtes autorisé à vous comporter ... vous pouvez assez vite être marginalisé et ridiculisé", a-t-il déclaré à l'AFP.

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