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Exposition sur les années romaines du Caravage à Paris

La première exposition consacrée depuis 1965 au Caravage en France s'ouvre vendredi à Paris, rassemblant dix toiles majeures de sa période romaine mises en regard avec celles de contemporains qui furent ses amis ou ses rivaux.

"Caravage à Rome, amis et ennemis": le Musée Jacquemart-André, qui possède déjà une belle collection de maîtres italiens, réussit un beau coup en présentant cette exposition très condensée, soignée et subtile jusqu'au 28 janvier, grâce à des prêts exceptionnels.

C'est en 1595/96 à Rome -il a alors 24/25 ans-- que le peintre lombard commence à peindre des fleurs et des fruits dans l'atelier de Giuseppe Cesari, dit le Cavalier d'Arpin, et produit ses premiers tableaux représentant des jeunes gens.

En 1606, dix ans plus tard, il prend la fuite après avoir causé la mort d'un homme pendant une rixe et avoir été condamné à la peine capitale. Michelangelo Merisi dit le Caravage est alors devenu un peintre célèbre et suscitant des inimitiés, fréquentant les puissants mécènes de la noblesse proche du Vatican, avant, sans doute, de rejoindre les tavernes de nuit.

Sept de ces dix œuvres du maître italien du clair-obscur n'ont jamais été montrées en France.

L'exposition rassemble des tableaux du Palais Barberini, de la Galerie Borghese, des Musées du Capitole à Rome, de la Pinacothèque de Brera (Milan), du musée Strada Nuova de Gênes, du Musée de Crémone, sans oublier le prestigieux prêt du Joueur de Luth du Musée de l’Ermitage de Saint-Pétersbourg, un prêt qui, selon les commissaires, n'a pas été très facile à obtenir.

Cet artiste italien aujourd'hui immensément populaire, dont certaines scènes sont reproduites partout, attirait au début du XVIIème siècle la controverse et son style réaliste pouvait choquer.

"A l'époque du Caravage, ce n'était pas comme aujourd'hui: le Cavalier d'Arpin (Giuseppe Cesari) ou Carrache étaient des artistes plus en vue, mieux reconnus", souligne à l'AFP la commissaire italienne Francesca Cappelletti.

Dans le choix des toiles d'autres maîtres, "nous avons donc cherché les meilleurs, les plus forts, pour qu'ils ne soient pas écrasés". Mais, à chaque fois, même si elles sont brillantes et profondes, elles n'arrivent pas à son niveau d'intensité réaliste.

- Le moment de l'action -

Pour la première fois, deux versions de la Madeleine pénitente, très rarement montrées au public, et peintes pendant la fuite de Caravage de Rome, sont mises en regard.

Le dialogue entre les chefs-d’oeuvre de Caravage et celles de ses contemporains est le grand intérêt de cette exposition: des artistes, comme Giovanni Baglione, Bartolomeo Manfredi, Orazio Gentileschi, l'Espagnol José de Ribera sont représentés.

La première salle, qui s'intitule "Théâtre des têtes coupées", saisit par la violence de la représentation par Caravage du thème biblique de Judith décapitant Holopherne.

"Caravage est l'inventeur d'un nouveau type d'iconographie, c'est lui qui va mettre sur sa toile le moment de l'action, le moment fort. Il invente ainsi une inspiration théâtrale", plutôt que de montrer comme les autres l'après ou l'avant, note le commissaire français Pierre Curie.

Les salles suivantes mettent en miroir Caravage et ses contemporains par thèmes: la musique et la nature, la représentation des nus, la méditation, la passion du Christ.

Ainsi alors que Caravage peint sa célèbre toile Le jeune Saint-Jean Baptiste au bélier, Bartolomeo Manfredi s'essaie au même thème.

Particulièrement digne d'attention, le Joueur de Luth est présenté en dehors de Russie pour la première fois depuis sa restauration. La blancheur de la chemise, posée sur la peau pâle, illumine véritablement la toile, alors qu'un enduit jaune autrefois la rendait plus terne.

Saint François en méditation et Saint Jérôme écrivant sont aussi deux prodigieuses toiles qui confirment la dimension mystique de Caravage, qui saisit parfaitement l'expression tourmentée de ces saints.

La sélection du Musée Jacquemart-André est de grande qualité. Mais les commissaires relèvent que l'unanimité est souvent difficile à faire sur les tableaux de Caravage. Comme il est très à la mode et coté, certains vont chercher à lui attribuer faussement des toiles qui ne sont que des copies.

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