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Fusillade raciste : comme un nouveau tremblement de terre à Macerata

Macerata, une petite ville du centre de l'Italie déjà secouée par un tremblement de terre voici dix-huit mois, a eu un réveil tout aussi brutal dimanche au lendemain d'une fusillade à caractère raciste dans laquelle six Africains ont été blessés.

"C’est comme si un deuxième tremblement de terre venait de se produire", réagissait une restauratrice du centre-ville de cette localité de 43.000 habitants.

"Les migrants se sont bien intégrés ici. Lorsqu’il y a eu de fortes chutes de neige, tous avaient proposé leurs services pour aider la ville à déneiger. D’autres garçons avaient aussi aidé au moment du tremblement de terre", assure à l'AFP Giovanni Lattanzi, le coordinateur national de l’ONG "Groupe solidarité humaine".

La question de l'intégration des migrants s'annonce comme l'un des thèmes majeurs de la campagne pour les législatives de mars qui bat son plein en Italie.

"Notre ville a toujours été en capacité d’absorber cette nouvelle population", affirme aussi Francesco Vitali, le secrétaire provincial du Parti démocratique (au pouvoir) de Macerata, dont le siège local a été touché par deux balles.

Face à ces propos consensuels, d'autres langues se délient.

L'assassinat cette semaine d'une femme de 18 ans, Pamela Mastropietro, par un ressortissant nigérian, a provoqué des tensions chez les habitants.

- Appels à la vengeance -

"On a vu fleurir sur les réseaux sociaux des commentaires appelant à aller sur la (principale) place de la ville pour que justice soit faite et tout casser", admet Fabrizio Compagnucci, un vendeur de journaux dans la gare de Macerata, l'un des lieux où des passants étrangers ont été la cible de tirs.

Luca Traini, le tireur de 28 ans, adepte de lectures et de tatouages fascistes, a d'ailleurs admis avoir eu des pulsions vengeresses après avoir entendu parler à la radio du sort réservé à Pamela Mastropietro, selon la presse. "J'ai décidé de tous les tuer", a-t-il raconté aux enquêteurs, écrit notamment le journal Corriere della Sera.

Au cours de son expédition punitive à bord d'une automobile, il a blessé par balle cinq étrangers originaires du Mali, du Ghana et du Nigeria, dont l'un a été grièvement atteint au thorax.

Luca Traini s'était porté candidat aux élections communales l'an dernier sous l'étiquette de la Ligue du Nord (LN), un parti d’extrême droite et anti-immigration proche du Front national français.

"Les personnes blessées suivaient un processus d’intégration avec des cours de langue. Il faut veiller à ne surtout pas l’interrompre", met en garde Giovanni Latanzzi, très impliqué dans l'aide aux migrants.

Dimanche, les rues étaient vides à Macerata, tout comme le populaire train dominical allant à Civitanova, au bord de la mer adriatique. Les migrants étaient encore plus rares. "Je crois que nous avons tous peur de sortir maintenant", a raconté James Nosakhari, un ressortissant nigérian, témoin de la fusillade.

Samedi, le chef du gouvernement italien Paolo Gentiloni avait appelé au calme et à la sérénité. "La haine et la violence ne nous diviseront pas", avait-il affirmé.

Le chef de la Ligue, Matteo Salvini, a certes condamné samedi le geste de Luca Traini mais pour aussitôt dénoncer l'"invasion migratoire" source d'"affrontement social".

Selon les sondages, la Ligue du Nord pourrait très bien arriver au pouvoir aux prochaines élections législatives (le 4 mars) par le biais d'une coalition avec le parti de droite Forza Italia, orchestrée par l'ancien chef du gouvernement Silvio Berlusconi.

Pour l'élu local de Macerata Francesco Vitali, "on ne peut plus tolérer certaines prises de position et exagérations de certains partis politiques".

Dans la petite commune, l'urgence est d'"apaiser les tensions".

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