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Grèce: le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis engage le virage à droite

A peine un mois après son élection, le Premier ministre conservateur grec Kyriakos Mitsotakis a engagé le virage à droite promis en misant sur la réforme de l'Etat ainsi que le renforcement de la sécurité et du secteur privé.

Pour tourner la page de quatre ans de pouvoir de gauche, trois projets de loi ont été immédiatement déposés au Parlement après la victoire de la droite Nouvelle-Démocratie (ND) aux législatives du 7 juillet, dans le but de les faire adopter avant la fin de la semaine. Une course contre la montre avant les vacances parlementaires, déjà repoussées pour cause d'élection estivale.

Deux textes ont déjà été votés, le troisième doit l'être avant vendredi.

La première réforme, adoptée la semaine dernière, a fait le moins de remous: la réduction de la taxe foncière, un impôt instauré sous la pression des créanciers lors de la crise, et honni par les Grecs.

Promise aussi par son prédécesseur mais seulement pour les petits et moyens propriétaires, cette réduction est élargie par le nouveau gouvernement aux grands propriétaires.

L'objectif est de "faire renaître la classe moyenne", avait lancé devant l'Assemblée le Premier ministre. L'amendement a bénéficié d'un large consensus.

- "Hyper-concentration" du pouvoir -

En revanche, la loi sur la réorganisation et la "transparence" du gouvernement et de "la fonction publique centrale", votée mardi soir dans son ensemble par la seule majorité gouvernementale, a fait monter d'un cran la confrontation droite-gauche.

Qualifiée d'"initiative sans précédent" par le Premier ministre, cette loi vise à améliorer "l'efficacité" et "la coordination" de la machine gouvernementale et à lutter contre "le clientélisme" et "la bureaucratie", des maux endémiques en Grèce.

Le texte prévoit le renforcement de la "présidence du gouvernement", un organe dépendant du Premier ministre qui devient une sorte de "task force", "avec des compétences élargies", un modèle inspiré d'autres pays européens, selon la ND.

"La bureaucratie a un coût de 7% du PIB, le taux le plus élevé en Europe", a justifié mardi soir devant l'Assemblée Kyriakos Mitsotakis.

Mais l'opposition a critiqué "l'hyper-concentration" de l'exécutif et l'affaiblissement du rôle des ministres.

L'ancien Premier ministre Alexis Tsipras a accusé le gouvernement de créer "un Etat partisan" et d'augmenter le nombre de collaborateurs gouvernementaux, ce qui pèsera sur le budget de l'Etat.

"Mitsotakis, le chancelier des Balkans", ironisait le journal dominical d'opposition Documento.

"L'Etat néolibéral a besoin d'une structure serrée pour être efficace et ne s'intéresse pas à la légitimité de son organisation", explique Michalis Spourdalakis, universitaire à la tête de la commission sur la révision constitutionnelle.

La réforme comprend la création d'une "autorité nationale de transparence" pour "lutter avec une plus grande efficacité contre la corruption".

M. Mitsotakis, ex-ministre de la Réforme de l'administration au pic de la crise (2013-2015) au sein d'un gouvernement de coalition droite-socialiste, avait appliqué une politique stricte à la fonction publique, dictée par les créanciers, aboutissant au licenciement de milliers de fonctionnaires.

- Contrôle du flux migratoire -

Adepte des partenariats privé-public (PPP), le Premier ministre a en outre remplacé les directeurs de certains organismes publics ou semi-publics en nommant des cadres du privé, et annoncé la réduction progressive de l'imposition pour les entrepreneurs.

La sécurité est une autre priorité du gouvernement, avec l'embauche de 1.500 nouveaux policiers, le renforcement du contrôle aux frontières, l'accélération du renvoi en Turquie des migrants qui n'ont pas obtenu l'asile en Grèce ou encore la suppression d'une mesure facilitant l'accès des migrants à la sécurité sociale.

Le ministère de la Politique migratoire a été supprimé. La gestion de presque 70.000 migrants dans le pays et de la reprise du flux migratoire est désormais du ressort d'un des ministres adjoints de la Protection du citoyen.

Jeudi, le débat sur le troisième projet de loi, qui doit supprimer "l'asile universitaire", s'annonce houleux. Il s'agit de lever l'interdiction faite à la police d'entrer dans les universités, une loi héritée d'un soulèvement étudiant contre la dictature des colonels (1967-1974) que Kyriakos Mitsotakis veut abolir pour "ramener la sécurité" sur les campus.

Objectif: parer aux troubles urbains dont les auteurs sont souvent basés dans les facultés, selon le gouvernement.

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