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Journaliste allemand interdit de Mondial: Berlin proteste et en appelle à Poutine

Très irritée, l'Allemagne a appelé lundi le président russe Vladimir Poutine à lever l'interdiction faite au journaliste Hajo Seppelt, divulgateur du vaste scandale de dopage en Russie, de couvrir le Mondial de foot.

"Nous considérons que cette décision d'invalider la (demande) de visa de Monsieur Seppelt est une erreur, nous appelons la direction de l'Etat russe à permettre à ce correspondant allemand de se rendre (en Russie) pour couvrir la coupe du monde", a indiqué le porte-parole de la chancelière Angela Merkel, Steffen Seibert.

Moscou doit "garantir la libre couverture de ce qui est probablement le plus grand évènement sportif international, avec les Jeux olympiques. Nous sommes convaincus que la Russie, en tant que pays hôte, se met en mauvaise posture en s'en prenant de manière évidente aux libertés de la presse et d'opinion", a-t-il encore martelé lors d'un point presse régulier.

Le porte-parole a enfin jugé que la Fédération internationale de football "devait tout faire" pour permettre la venue en Russie du journaliste allemand à cette compétition dont l'Allemagne, championne du monde en titre, est l'un des favoris.

Dans un communiqué, la Fifa a indiqué peu après avoir "approuvé la demande d'accréditation soumise par M. Seppelt (...)", ajoutant que "la liberté de la presse est d'une importance capitale pour la Fifa".

Cette affaire intervient alors qu'Angela Merkel est attendue vendredi en Russie, à Sotchi, pour y rencontrer le président russe. La question Seppelt pourrait donc s'inviter à ce sommet consacré entre autres à la crise du nucléaire iranien, aux conflits en Syrie et en Ukraine ou encore aux approvisionnements de l'Europe en gaz.

Journaliste à la télévision publique allemande ARD/SWR, M. Seppelt avait annoncé vendredi que sa demande de visa pour couvrir le Mondial de football (14 juin - 15 juillet) avait été refusée au motif qu'il figure sur une liste de "personnes indésirables".

"Cela tient naturellement au fait que nous disons des choses critiques sur la Russie, que nous avons levé le voile en 2014 sur le système de dopage étatique russe", a dénoncé Hajo Seppelt vendredi, en référence à son documentaire "Dopage confidentiel: comment la Russie fabrique ses vainqueurs", évoquant, témoignages à l'appui, un système de dopage généralisé dans l'athlétisme.

- Dopage, hooliganisme, empoisonnement -

Le document avait fait grand bruit et conduit à la mise en place d'une première commission d'enquête par l'Agence mondiale antidopage (AMA). Il avait été suivi de plusieurs autres reportages, entre août 2015 et juin 2016, qui accusaient les Russes de continuer à enfreindre les règles. La Russie avait été bannie des compétitions d'athlétisme des JO de Rio 2016.

Une série d'enquêtes et de révélations de presse ont aussi mis en évidence un système de dopage orchestré par l'Etat russe au Jeux d'hiver de 2014 à Sotchi, un évènement dont M. Poutine avait voulu faire la vitrine de la puissance sportive de son pays. En conséquence, après une série de sanctions adoptées malgré les dénégations russes, le pays avait été suspendu par le Comité international olympique (CIO) et seuls certains sportifs russes avaient pu concourir aux Jeux de Pyeongchang cet hiver, sous bannière neutre.

Le lanceur d'alerte à l'origine de ce dernier scandale, Grigory Rodchenkov, chef du laboratoire antidopage de Moscou pendant dix ans et désormais réfugié en Amérique, avait aussi assuré que des footballeurs avaient profité du dopage institutionnalisé. Ces accusations n'ont jusqu'ici pas eu de suites.

Le président de la Fifa Gianni Infantino avait lui jugé en décembre que "s'il y avait un problème sérieux de dopage dans le football, on le saurait".

Le bannissement de M. Seppelt n'est que le dernier esclandre en date autour de la coupe du monde de foot.

Le Royaume-Uni a ainsi décidé de boycotter politiquement la compétition en représailles à l'empoisonnement d'un ex-agent double sur son territoire, Londres accusant Moscou d'être l'auteur des faits. Des appels à un boycott international plus larges sont cependant restés sans réponses ou presque.

Des craintes pèsent aussi sur la capacité des autorités à empêcher les débordements impliquant des hooligans russes, comme à l'Euro-2016 en France et plus récemment en février 2018 en Espagne, en marge du match d'Europa-League Athletic Bilbao-Spartak Moscou.

Enfin, la Fifa et Moscou restent soupçonnées de corruption concernant l'attribution à la Russie du Mondial 2018.

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