Accueil Actu

Kosovo: violences dans les zones serbes après une opération de police

Une opération de police visant le crime organisé a suscité mardi des violences dans les secteurs serbes du Kosovo, où elle s'est heurtée à ce que Pristina a qualifié de "résistance armée".

L'opération visait une trentaine de personnes, dont 19 policiers et quatre douaniers, soupçonnés de faits de contrebande, de corruption et de "crime organisé", selon les autorités kosovares.

Des Serbes ont tenté de s'y opposer, dressant des barricades comme à Zubin Potok (nord) où des témoins ont fait état de coups de feu, tandis que la police a évoqué une "résistance armée".

Cinq policiers ont été blessés, dont deux par balles et trois alors qu'ils démantelaient des barricades, selon la police. Celle-ci a insisté sur l'absence de connotation communautaire de l'opération, les policiers arrêtés appartenant aux communautés serbe (11), mais aussi albanaise (4) et bosniaque (4).

Lors de ces heurts, deux membres de la mission de l'Onu au Kosovo (Minuk) ont été interpellés alors qu'ils étaient "dans le cadre de leurs fonctions", a dénoncé la Minuk. Légèrement blessés, ils ont été conduits à l'hôpital.

De son côté, la police kosovare a fait état de l'arrestation d'un employé russe de l'Onu qui selon elle s'opposait à la police en plaçant son véhicule diplomatique dans une barricade à Zubin Potok. Celui-ci a été libéré dans l'après-midi, a indiqué la Minuk. Moscou avait dénoncé "un acte scandaleux".

- Armée en alerte -

A Belgrade, le président de la Serbie Aleksandar Vucic a ordonné la mise en état d'alerte de l'armée serbe. Celle-ci "protégera notre peuple en cas de menace sérieuse", a-t-il prévenu.

Cette mesure est prise épisodiquement à l'occasion des montées de tension dans le nord du Kosovo, peuplé majoritairement de Serbes.

En début d'après-midi, le calme semblait revenir dans le nord du Kosovo.

Dans les municipalités serbes, notamment dans la partie nord de Mitrovica, Pristina peine à imposer sa souveraineté. Chaque opération policière se heurte à l'hostilité d'une population qui ne reconnaît pas plus que Belgrade l'indépendance du Kosovo.

Chargée de la sécurité et de l'intégrité territoriale du Kosovo, la force internationale menée par l'Otan (Kfor) a confirmé qu'il s'agissait "seulement d'une opération de police (...) en relation avec une enquête de corruption".

Principal soutien de la Serbie, Moscou a réfuté cette thèse, voyant dans ce "comportement provocateur des Kosovars", la "conséquence directe de l'indulgence pendant des années de l'UE et des Etats-Unis" envers Pristina.

Cette opération intervient à un moment difficile. Après des mois de blocage du dialogue, un récent sommet à Berlin entre les présidents Vucic et Hashim Thaçi, n'a pas accouché de résultats tangibles.

- "Terrible manipulation" -

Lundi, Aleksandar Vucic avait affirmé s'attendre "chaque jour, chaque mois" à une attaque contre les Serbes du Kosovo, et répété que le dialogue ne reprendrait pas tant que le Kosovo n'aurait pas levé la barrière douanière imposée aux produits serbes.

Ramush Haradinaj a prévenu que ces droits de douane de 100% ne seraient abrogés que si Belgrade reconnaissait son ancienne province.

Le Kosovo est reconnu par quelque 110 pays, pour la plupart des nations occidentales. Mais Russie et Chine notamment s'y opposent, ce qui lui ferme la porte de l'ONU.

Selon les estimations, quelque 120.000 Serbes vivent toujours au Kosovo, dans le nord et dans une dizaine d'enclaves.

Belgrade a perdu le contrôle de sa province il y a vingt ans: une campagne de frappes de l'Otan avait forcé Slobodan Milosevic à retirer ses troupes, mettant un terme à un conflit qui avait fait plus de 13.000 morts. Placé sous protection internationale, le Kosovo a proclamé son indépendance en 2008.

Un des responsables de l'opposition serbe, Miroslav Aleksic, vice-président du Parti du peuple (droite), a dénoncé les violences de mardi comme "une terrible manipulation", "le début du dernier acte d'une pièce" jouée de concert par Aleksandar Vucic et les responsables kosovars. Selon lui, en faisant monter à dessein la tension, Aleksandar Vucic préparerait son opinion à un changement de doctrine de Belgrade, en leur offrant cette alternative: "Soit nous reconnaissons le Kosovo , soit nos enfants vont encore mourir".

À lire aussi

Sélectionné pour vous