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"On ne doit pas mourir de négligence, d'incurie, d'irresponsabilité": l'Italie dit adieu aux victimes du pont effondré

Des funérailles d'Etat seront célébrées aujourd'hui à Gênes en présence des plus hauts responsables politiques italiens après l'effondrement meurtrier du pont autoroutier, pour lequel le gouvernement attaque sans relâche le gestionnaire de l'ouvrage.

Gênes et l'Italie disent adieu samedi aux victimes de l'effondrement d'un pont autoroutier lors de funérailles nationales boycottées par la moitié des familles de 38 victimes confirmées, tandis que les secouristes ont encore retrouvé des corps dans les décombres.

La cérémonie religieuse solennelle a commencé samedi peu après 11H30 (9H30 GMT) dans un grand hall du parc des expositions de Gênes, en présence des plus hauts responsables de l'Etat et de milliers d'habitants de ce port du nord de l'Italie.

Quelques heures plus tôt, les secouristes ont retrouvé des restes humains dans une voiture écrasée sous un bloc de béton. Selon les médias italiens, il s'agit d'un couple et de leur fillette de neuf ans. Au total, cinq personnes étaient encore portées disparues.


Un deuil national

Un deuil national a été décrété toute la journée en Italie: les drapeaux sont en berne et l'éclairage de nombreux monuments, dont le Colisée à Rome, s'éteindra dans la soirée.

Pour la reprise du championnat de football ce week-end, les joueurs observeront une minute de silence et porteront un brassard noir. Les matches des deux équipes de Gênes, la Sampdoria et le Genoa, ont en revanche été reportés, et des dirigeants et joueurs des deux clubs étaient présents aux funérailles.

Des milliers de personnes ont pris place dans l'immense pavillon Jean Nouvel du parc des expositions, où 18 cercueils ont été alignés sous d'énormes gerbes de fleurs, dont le petit tout blanc de Samuele, 8 ans, fauché avec ses parents alors que la famille partait prendre un ferry pour des vacances en Sardaigne.


Deux des cercueils étaient aussi recouverts d'un drapeau albanais, avec l'aigle noir sur fond rouge.

Le président italien Sergio Mattarella, les présidents des deux chambres du Parlement, la plupart des ministres ainsi que des représentants de gouvernements étrangers, mais aussi, selon les médias, les principaux dirigeants d'Autostrade per l'Italia, la société gestionnaire de l'autoroute.

Matteo Salvini et Luigi Di Maio, les deux hommes forts du gouvernement populiste qui se sont livrés ces derniers jours à une surenchère dans l'indignation, ont été vivement applaudis à leur arrivée.


"On ne doit pas mourir de négligence"

"Je ne connais personne qui soit mort dans l'écroulement du pont, mais j'ai voulu venir quand même. Cela ne devait pas arriver", a expliqué à l'AFP Claudio Castellaro, un Gênois de 73 ans.

"J'ai perdu un ami mais je suis venu pour toutes les victimes", a confié un autre habitant, Nunzio Angone, arrivant par l'entrée des proches des victimes.

Les familles d'une partie des victimes ont cependant choisi de ne pas participer à la cérémonie, certains préférant des funérailles plus intimes et dans leur ville, d'autres annonçant clairement un boycott.

"Mon fils a été assassiné", a répété vendredi sur toutes les ondes le père de l'un des quatre jeunes de Torre del Greco, près de Naples, morts sur la route de leurs vacances, en pointant la responsabilité de l'Etat.

"On ne doit pas mourir de négligence, d'incurie, d'irresponsabilité, de superficialité, de bureaucratisme", a martelé l'archevêque de Naples, Crescenzio Sepe, dans son homélie lors des obsèques des quatre jeunes, célébrées vendredi comme pour d'autres victimes à travers l'Italie.

Les photos souriantes et les destins brisés des victimes s'affichaient dans tous les journaux italiens: un ancien champion de moto trial, un médecin et une infirmière qui allaient se marier, des jeunes Français partis faire la fête, trois Chiliens qui s'étaient installés en Italie, un routier napolitain qui rentrait après une livraison en France, un couple de retour de voyage de noces...


Fournir une aide concrète à la ville

Face à l'émotion et à la colère, le gouvernement a attaqué Autrostrade per l'Italia, la famille Benetton qui contrôle le groupe, l'incurie des gouvernements précédents -- même si la Ligue a toujours été un allié au pouvoir de Silvio Berlusconi -- et l'Union européenne.

Vendredi, le ministère des Infrastructures a officiellement adressé un courrier à Autostrade en vue de révoquer la concession de la société sur le tronçon du pont.

Après avoir assuré dans la semaine du sérieux de ses contrôles et prévenu qu'une révocation "en l'absence de toute certitude sur les causes effectives" du drame coûterait cher en indemnités à l'Etat -- la presse et l'opposition parlent de milliards d'euros --, Autostrade a annoncé une conférence de presse samedi après-midi à Gênes.

Les dirigeants comptent faire état de leurs efforts pour fournir "une aide concrète" à la ville, aux proches des victimes et aux centaines de personnes dont les habitations sont condamnées.

Le nord de l'Italie se prépare aussi à un premier week-end de retour de vacances compliqué par la fermeture de cet axe majeur entre la France et l'Italie.

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