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L'Ukraine renonce à participer à l'Eurovision

Après quatre refus embarrassants et faute de candidat potentiel à l'Eurovision, l'Ukraine a renoncé mercredi à participer à ce concours musical aux enjeux de plus en plus politiques pour Kiev, sur fond de tensions avec Moscou.

En trois jours, ce sont successivement les quatre grands favoris du public ukrainien qui ont annoncé leur refus de représenter leur pays lors du populaire concours, qui aura lieu cette année en mai en Israël, accusant les autorités de vouloir le "politiser".

Au coeur du conflit: les conditions exigées par le diffuseur national UA:PBC, qui demande notamment aux musiciens de ne plus se produire en Russie, où les concerts d'artistes ukrainiens se poursuivent malgré la crise que traversent les deux pays.

"La sélection nationale en 2019 a mis au jour et attiré l'attention du public sur les problèmes systémiques de l'industrie musicale en Ukraine: les artistes ont des liens avec le show-business du pays agresseur", a indiqué UA:PBC dans un communiqué, en référence à la Russie.

"Au vu de la situation actuelle (...) et des conditions de politisation excessive du processus de sélection nationale, le diffuseur a décidé de renoncer à participer à l'Eurovision-2019", a ajouté le diffuseur ukrainien.

Le cas le plus retentissant a été celui, lundi, de la chanteuse Maruv, qui avait remporté le vote du public ukrainien mais qui a finalement été écartée par UA:PBC, les deux parties s'accusant mutuellement d'instrumentalisation politique.

Le diffuseur exigeait notamment que la chanteuse de 27 ans, dont le vrai nom est Anna Korsoun, face office d'"ambassadrice culturelle de l'Ukraine" et de "porte-parole de l'opinion publique ukrainienne dans le monde".

Tout en se disant prête à ne plus chanter en Russie, la jeune femme avait assuré ne pas vouloir se "produire avec des slogans transformant la performance en une campagne de promotion pour nos politiciens". "Je suis une musicienne, pas un outil dans l'arène politique", avait-t-elle affirmé.

- "Semer la discorde" -

Freedom Jazz, un trio de chanteuses qui était le deuxième choix du pays après Maruv, puis le groupe pop KAZKA, troisième choix, et le quatrième Brunettes Shoot Blondes lui ont emboîté le pas en annonçant mardi et mercredi qu'ils n'iraient pas à Tel Aviv.

"Nous n'avons pas besoin d'une victoire à tout prix. Notre but est d'unir les gens avec notre musique, et non pas de semer la discorde", a expliqué KAZKA sur sa page Facebook, après des pourparlers avec UA:PBC.

La participation à l'Eurovision a pris une tournure très politique ces dernières années, en pleine crise entre la Russie et l'Ukraine, deux pays où le concours est très populaire.

L'Ukraine avait organisé l'Eurovision en 2017 grâce à la victoire l'année précédente en Suède de sa protégée Jamala, avec une ballade à propos des persécutions subies à l'époque soviétique par les Tatars de Crimée, péninsule ukrainienne annexée en 2014 par la Russie.

Les autorités ukrainiennes avaient alors interdit à la candidate russe Ioulia Samoïlova, jeune chanteuse de 27 ans qui se déplace en fauteuil roulant, de participer au concours à Kiev car elle s'était produite en Crimée, suscitant déjà des accusations de "politisation" du concours.

La Russie avait exprimé sa colère en retirant sa candidature et en décidant de ne pas retransmettre le programme, tandis que UA:PBC avait écopé d'une lourde amende pour avoir nui à la "réputation" de l'Eurovision.

Après le refus de Maruv de représenter son pays lundi, les autorités ont annoncé travailler sur une loi pour "réguler" les tournées des artistes ukrainiens en Russie.

Les artistes russes doivent, pour leur part, depuis octobre 2017 demander l'autorisation des services de sécurité ukrainiens (SBU) avant de pouvoir se produire en Ukraine.

La crise entre Kiev et Moscou s'est à plusieurs reprises étendue au domaine culturel avec par exemple l'interdiction en Ukraine de livres russes, le blocage de plusieurs réseaux sociaux ou encore l'interdiction d'antenne de dizaines de célébrités et d'acteurs dont Gérard Depardieu, devenu citoyen russe en 2013 et que Kiev considère comme une "menace pour la sécurité nationale".

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