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Malgré la trève au Nagorny Karabakh, Khashimov n'est pas d'humeur à parler de paix

Sakhib Khashimov n'est pas d'humeur à parler de paix. Pour l'heure, il fouille les décombres de son appartement qu'il a fui au plus fort des combats pour le Nagorny Karabakh, à sept kilomètres plus à l'Ouest.

Durant des jours, la localité azerbaïdjanaise de Terter, où vivent un millier de familles déplacées par des décennies de combats, a été bombardée par les séparatistes arméniens. Jusqu'à l'annonce du cessez-le-feu samedi.

Alors, comme des dizaines d'autres, il a profité de l'accalmie pour rentrer chez lui et y prendre des affaires, avant de trouver un autre endroit où vivre.

Mais la dernière chose que souhaitait cet homme de 40 ans, c'est la fin des combats juste au moment où les forces azerbaïdjanaises faisaient état de succès significatifs sur le terrain.

"Cette opération armée, c'est notre chance", assure-t-il, environ une heure après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, au terme de deux semaines de combats intenses pour la région séparatiste du Nagorny Karabakh.

"S'ils ne nous rendent pas notre terre pendant le cessez-le-feu -- avec un calendrier précis, comme le dit notre président--, alors poursuivre cette opération est la meilleure opportunité que nous ayons. Nous n'en aurons pas d'autre".

- "Nous voulons notre terre" -

Le Nagorny Karabakh, un territoire majoritairement peuplé d'Arméniens, a fait sécession de l'Azerbaïdjan après une guerre qui a fait 30.000 morts dans les années 1990. Bakou accuse depuis Erevan d'occuper son territoire, les accès de violence étant réguliers.

Les combats qui opposent depuis le 27 septembre les troupes du Nagorny Karabakh, soutenues par Erevan, et les forces azerbaïdjanaises sont les plus meurtriers avec plus de 450 morts confirmés.

A Terter, les habitants assurent que seuls deux frères de la localité y ont perdu la vie.

Mais la violence de la guerre est inscrite dans les façades décharnées des immeubles de cinq étages, qui avaient été construits pour les personnes déplacées par le conflit. Pendant des jours, ses habitants ont dû s'abriter dans les sous-sols.

Dans la plupart des habitations, des trous béants ont pris la place des fenêtres et les balcons ont été cisaillés par les tirs d'artilleries et de roquettes.

Khatire Zhalilova raconte qu'elle regardait les nouvelles à la télévision, depuis un autre village où elle s'est mise à l'abri, quand elle a vu sa maison dans un reportage.

"Je me suis dit +ça ne peut pas être notre maison+. Mais, malheureusement, ça l'était".

Elle y est revenue et marche, incrédule, dans sa cuisine ravagée. Sur le sol du modeste appartement, un entrelacs de débris de bois de béton, d'où émergent des jouets en peluche et des pantoufles.

"Je pense qu'il faut continuer à se battre. Nous voulons notre terre".

- "Vive notre armée" -

D'autres ont l'air en état de choc.

Après avoir enjambé les débris autour de sa porte d'entrée, la première chose que Parvane Khatamova a faite, ça a été de se ruer vers ses plantes sur le rebord des fenêtres.

En silence, elle ramassé les débris de verre qui s'y trouvaient, et les a soigneusement arrosées.

"Je suis venue et j'ai vu que toutes les fleurs étaient détruites et j'ai senti que je devais les aider", explique cette mère de trois enfants.

"Je ne veux pas qu'elles meurent, c'est pour ça que je les arrose", répète-t-elle d'une voix douce.

"Peut-être que nous reviendrons ici à nouveau. Ou peut-être qu'un jour, nous retournerons dans notre pays", dit-elle encore, en parlant des collines du Nagorny Karabakh qu'on devine au loin.

L'essentiel des habitants de Terter ont des racines très anciennes dans cette région disputée. Ils ont passé la majeure partie de leur vie à fuir les combats, d'une ville à une autre.

"Que pouvez-vous y faire? Dieu a décidé que tel serait le destin de nos peuples", soupire Nazhiba Sadzhigova, les yeux rivés sur ce qu'il reste de son immeuble.

"C'est la deuxième fois que je suis une réfugiée. Mais je continue de me dire: vive notre armée! J'ai confiance en notre armée. Vive nos soldats".

Elnur, fermier du coin, acquiesce.

"S'ils sont d'accord pour notre rendre notre terre, je suis d'accord pour un cessez-le-feu. S'ils ne le sont pas, je ne le suis pas non plus. Nous voulons récupérer notre terre".

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