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Grèce: les migrants de Lesbos désemparés dans leur nouveau camp

"Nous avons quitté Moria en espérant quelque chose de mieux et finalement, c'est pire": Sazan, un Afghan de 20 ans, vient d'être transféré, avec mille compatriotes, de l'île grecque de Lesbos saturée, dans le camp de Nea Kavala, dans le nord de la Grèce.

Après six mois dans "l'enfer" de Moria sur l'île de Lesbos, Sazan se sent désemparé à son arrivée à Nea Kavala, où il constate "la difficulté d'accès à l'eau courante et à l'électricité".

A côté de lui, Mohamed Nour, 28 ans, entouré de ses trois enfants, creuse la terre devant sa tente de fortune pour fabriquer une rigole "pour protéger la famille en cas de pluie".

Mille réfugiés et migrants sont installés dans 200 tentes, les autres seront transférés "dans d'autres camps dans le nord du pays", a indiqué une source du ministère de la Protection du citoyen, sans plus de détails.

L'arrivée massive de centaines de migrants et réfugiés la semaine dernière à Lesbos, principale porte d'entrée migratoire en Europe, a pris de court les autorités grecques, qui ont décidé leur transfert sur des camps du continent.

Car le camp de Moria, le principal de Lesbos, l'un des plus importants et insalubres d'Europe, a dépassé de quatre fois sa capacité ces derniers mois.

En juillet seulement, plus de 5.520 personnes ont débarqué à Lesbos - un record depuis le début de l'année - auxquelles se sont ajoutés 3.250 migrants au cours de quinze premiers jours d'août, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

- Tensions à Moria -

Quelque 300 mineurs non accompagnés ont protesté mercredi contre leurs conditions de vie dans le camp de Moria et demandé leur transfert immédiat à Athènes. De jeunes réfugiés ont mis le feu à des poubelles et la police a dispersé la foule avec des gaz lacrymogènes, a rapporté l'agence de presse grecque ANA.

"Nous pensions que Moria était la pire chose qui pourrait nous arriver", explique Mohamed, qui s'efforce d'installer sa famille sous une tente de Nea Kavala.

"On nous a dit que notre séjour serait temporaire mais nous y sommes déjà depuis deux jours et les conditions ne sont pas bonnes, j'espère partir d'ici très vite", assène-t-il.

Des équipes du camp œuvrent depuis lundi à installer des tentes supplémentaires, mais les toilettes et les infrastructures d'hygiène ne suffisent pas.

Le ministère a promis qu'avant la fin du mois, les migrants seraient transférés dans d'autres camps.

Mais Tamim, 15 ans, séjourne à Nea Kavala depuis trois mois: "On nous a dit la même chose (que nous serions transférés) quand nous sommes arrivés (...). A Moria, c'était mieux, au moins on avait des cours d'anglais, ici on ne fait rien", confie-t-il à l'AFP.

Pour Angelos, 35 ans, employé du camp, "il faut plus de médecins et des infrastructures pour répondre aux besoins de centaines d'enfants".

- "Garder espoir" -

Plus de 70.000 migrants et réfugiés sont actuellement bloqués en Grèce depuis la fermeture des frontières en Europe après la déclaration UE-Turquie de mars 2016 destinée à freiner la route migratoire vers les îles grecques.

Le Premier ministre de droite Kyriakos Mitsotakis, élu début juillet, a supprimé le ministère de la Politique migratoire, créé lors de la crise migratoire de 2015, et ce dossier est désormais confié au ministère de la Protection du citoyen.

Face à la recrudescence des arrivées en Grèce via les frontières terrestre et maritime gréco-turques depuis janvier 2019, le gouvernement a annoncé samedi un train de mesures allant du renforcement du contrôle des frontières et des sans-papiers à la suppression du droit d'appel pour les demandes d'asile rejetées en première instance.

Des ONG de défense des réfugiés ont critiqué ces mesures, dénonçant "le durcissement" de la politique migratoire.

La majorité des migrants arrivés en Grèce espère, comme destination "finale", un pays d'Europe centrale ou occidentale.

"Je suis avec ma famille ici, nous souhaitons aller vivre en Autriche", confirme Korban, 19 ans, arrivé mardi à Nea Kavala.

"A Moria, les rixes et la bousculade étaient quotidiennes, c'était l'enfer. La seule chose qui nous reste maintenant, c'est d'être patients et de garder espoir", confie-t-il.

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