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Poutine et Xi se posent en contrepoids à l'ordre occidental

Les présidents chinois Xi Jinping et russe Vladimir Poutine se sont posés vendredi en contrepoids à l'influence occidentale, lors d'un sommet régional réunissant plusieurs pays aux relations tendues avec les Etats-Unis.

Mais la solidarité entre les participants du sommet a montré quelques fractures. Ainsi, le Premier ministre indien Narendra Modi, s'adressant à M. Poutine, a fait valoir que "l'heure n'est pas à la guerre", alors que Moscou est engagé militairement en Ukraine.

Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a réagi en affirmant que la Russie était sous "pression" pour achever son intervention contre Kiev, après les "préoccupations" exprimées par Pékin et Delhi sur le sujet lors du sommet.

Au même moment, deux pays d'Asie centrale, dont les dirigeants sont présents au sommet, le Kirghizstan et le Tadjikistan, se sont affrontés lors de combats frontaliers qui ont fait des dizaines de blessés, poussant à l'annonce d'un cessez-le-feu en urgence.

Cet événement intervient au moment où Moscou et Pékin ont des relations extrêmement tendues avec Washington à cause de l'invasion russe en Ukraine et du soutien américain à Taïwan.

- Poutine "pas pressé" en Ukraine -

Lors de la session principale du sommet, M. Xi a appelé les dirigeants réunis à "travailler ensemble à la promotion d'un ordre international qui aille dans une direction plus juste".

Il convient "d'abandonner les jeux à somme nulle et la politique consistant à créer des blocs", a-t-il poursuivi. Il n'a cité aucun pays, mais Pékin utilise généralement ce vocabulaire pour dénoncer les Etats-Unis et leurs proches alliés.

Le président russe, de son côté, s'est félicité du "rôle croissant des nouveaux centres de pouvoir" qui, selon lui, "devient de plus en plus évident".

M. Poutine a affirmé que la coopération entre les pays membres de l'OCS, à la différence des Occidentaux, se basait sur des principes "dénués d'égoïsme".

Des signes de désaccord n'ont toutefois pas manqué d'apparaître.

"Excellence, je sais que l'heure n'est pas à la guerre", a déclaré le dirigeant indien Narendra Modi à M. Poutine, au début d'une rencontre en tête-à-tête.

M. Poutine, en réponse, a dit entendre ses "inquiétudes", reprenant une formule qu'il avait eue la veille avec Xi Jinping. Le président russe a affirmé à M. Modi qu'il allait "tout faire" pour que le conflit en Ukraine "se termine le plus vite possible".

Mais, en s'exprimant un peu plus tard devant la presse russe, M. Poutine a déclaré que Moscou ne se hâtait pas d'achever son "objectif clé" en Ukraine: la conquête du Donbass, région du sud-est du pays en partie contrôlée par l'armée russe.

"Le plan (des opérations, ndlr) ne nécessite pas de changement (...) nous ne sommes pas pressés", a indiqué M. Poutine.

- Moscou en quête d'alliés -

L'OCS, dont les membres sont la Chine, la Russie, l'Inde, le Pakistan et quatre ex-républiques soviétiques d'Asie centrale, a été créée en 2001 en tant que plateforme de coopération concurrente des organisations occidentales.

Mais d'importants différends subsistent au sein de l'alliance. Les dirigeants du Kirghizstan et du Tadjikistan se sont ainsi retrouvés en urgence, lors du sommet, pour annoncer un cessez-le-feu après une escalade des violences à la frontière disputée entre ces deux pays d'Asie centrale.

MM. Poutine et Xi ont également rencontré le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui a appelé à stopper la guerre en Ukraine "au plus vite par la voie diplomatique". Récemment, Ankara a joué un rôle-clé pour trouver un accord entre Moscou et Kiev sur l'export de céréales d'Ukraine, vitales pour de nombreux pays du globe.

La Russie est visée depuis par de lourdes sanctions économiques occidentales et se tourne de plus en plus vers l'Asie pour chercher des soutiens économiques et diplomatiques.

Lors d'un entretien jeudi avec M. Xi, M. Poutine a remercié son homologue chinois pour sa "position équilibrée" sur l'invasion de l'Ukraine par Moscou, tout en lui promettant des "explications" face à ses "inquiétudes".

M. Xi, qui effectue son premier déplacement à l'étranger depuis le début de la pandémie de Covid-19, espère encore renforcer sa stature de dirigeant majeur avant un congrès du Parti communiste chinois en octobre, au cours duquel il brigue un nouveau mandat.

Le choix de l'Asie centrale comme première destination étrangère en plus de deux ans illustre surtout l'importance que Pékin accorde à cette région, qui est traversée par les "nouvelles routes de la soie", un projet titanesque porté par M. Xi pour renforcer les liaisons commerciales avec le monde.

Avant le sommet, M. Xi s'était rendu mercredi au Kazakhstan, promettant de l'aider à "sauvegarder sa souveraineté" alors que ce pays s'inquiète des ambitions russes après l'invasion de l'Ukraine.

M. Xi s'est en outre entretenu vendredi avec M. Erdogan et le dirigeant iranien Ebrahim Raïssi, au moment où les négociations sur le nucléaire iranien patinent.

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