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Croatie : la présidente conservatrice sortante affrontera le centre gauche au second tour

La cheffe de l'Etat conservatrice sortante en Croatie affrontera un ancien Premier ministre de centre gauche au second tour de la présidentielle après avoir franchi de justesse la première étape et perdu des électeurs au profit d'un chanteur populiste de droite.

Alors que la Croatie prend au début de l'année les rênes de l'Union européenne, elle devra attendre le second tour prévu pour le 5 janvier afin de connaître le nom de son prochain président aux fonctions surtout honorifiques.

Le premier tour dimanche révèle la montée en puissance de la droite dure dans un pays qui fait face à la pression de migrants à ses frontières et est confronté comme ses voisins balkaniques à un exode massif de ses habitants ainsi qu'à une corruption endémique.

Avec près de 30% des voix, l'ancien Premier ministre social-démocrate Zoran Milanovic, 53 ans, arrive en tête du scrutin, selon les résultats officiels après comptage de la quasi totalité des suffrages.

Mais malgré ce succès, le premier tour révèle surtout que même divisée, la droite a progressé en Croatie, estiment les analystes.

La présidente sortante Kolinda Grabar-Kitarovic, 51 ans, a obtenu 26,6% des suffrages. Miroslav Skoro, 57 ans, un artiste devenu populaire dans les années 1990 avec des titres à teneur patriotique, a recueilli 24,4% des voix en promettant de déployer l'armée à la frontière pour empêcher les migrants de passer et de gracier un criminel de guerre.

-"Co-candidat"-

Mme Grabar-Kitarovic est soutenue par le HDZ (centre droit) qui domine la vie politique depuis l'indépendance en 1991. Elle a passé le plus clair de la campagne électorale à louvoyer entre l'aide modérée et l'aile nationaliste de cette formation.

Dès dimanche soir, la présidente sortante a commencé les opérations de séduction pour tenter de reconquérir son électorat perdu, déclarant même que Miroslav Skoro avait en réalité joué le rôle de "co-candidat" pendant la campagne.

"J'avais un bon co-candidat dans ma sensibilité politique", a-t-elle lancé à ses partisans. "Maintenant, nous devons nous rassembler et aller à la victoire".

Une défaite de Mme Grabar-Kitarovic compliquerait les chances du HDZ et du Premier ministre modéré Andrej Plenkovic aux élections législatives prévues pour 2020.

"La droite radicale montre sa force", constate l'analyste Tihomir Cipek. "Nous verrons si la situation se répètera aux législatives".

L'électorat de gauche s'est rassemblé autour de M. Milanovic, un ancien diplomate épargné par les soupçons de corruption pesant sur bon nombre de membres de la classe politique. Il s'est engagé à faire de la Croatie un "pays normal" avec une justice indépendante, qui respecte les minorités.

"Nous allons vers un second tour et non vers la guerre, les guerres sont terminées", a-t-il dit à ses supporteurs, une référence apparente aux fréquentes allusions faites par ses rivaux au conflit déclenché par la déclaration d'indépendance de la Croatie en 1991.

Si ses partisans saluent sa détermination, ses contempteurs dénoncent son arrogance. Le gouvernement qu'il avait dirigé de 2011 à 2016 avait déçu car il n'avait pas su mettre fin à la corruption ambiante ni développer l'économie.

- Brexit et Balkans -

La Croatie assumera la présidence tournante de l'UE pour un mandat de six mois qui verra sans doute le Royaume-Uni quitter l'Union et des Etats des Balkans occidentaux frapper à sa porte.

Ce pays, dont les côtes sont baignées par l'Adriatique, est un aimant pour les touristes mais ses habitants s'en vont, un phénomène qui s'est accéléré après son adhésion à l'UE en 2013.

Les émigrés partent chercher une vie meilleure ailleurs en Europe mais invoquent aussi la corruption et le clientélisme ou la piètre qualité des services publics.

Depuis 2013, 190.000 personnes sont parties selon les statistiques officielles, mais les spécialistes estiment qu'en réalité 300.000 habitants manquent à l'appel.

Parallèlement, le taux de natalité est faible, ce qui fait dire aux experts que la Croatie est au bord d'un "effondrement démographique".

L'économie, fortement dépendante du tourisme, manque de bras et compte pour fonctionner sur des migrants en provenance de pays comme la Bosnie, la Serbie et le Kosovo.

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