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Puigdemont, l'exilé coqueluche des nationalistes flamands

Exilé depuis trois mois en Belgique, Carles Puigdemont a bénéficié d'une solidarité sans faille du "parti frère" nationaliste flamand, la N-VA, pilier de la coalition au pouvoir, qui a déjà en tête ses prochaines échéances électorales.

Le dirigeant indépendantiste catalan, qui a fui le 30 octobre la menace de poursuites judiciaires en Espagne après une tentative de sécession, pourrait devoir revenir au pays afin de se faire réélire à la présidence de sa région, théoriquement mardi.

Mais en attendant le déblocage d'une situation des plus incertaines, il continue de développer sa notoriété en Belgique. Où il est censé être mardi soir l'invité d'honneur de la cérémonie de voeux de Nouvel An de la N-VA de Louvain.

"J'ai toujours beaucoup de sympathie pour des gens interdits de s'exprimer, surtout s'ils expriment des opinions politiques de manière paisible. Je ne comprends pas pourquoi on en arrive à emprisonner pour des opinions", explique à l'AFP l'élu nationaliste flamand Lorin Parys, organisateur de l'événement.

Tête de liste N-VA à Louvain pour les prochaines élections communales d'octobre, M. Parys a été à la pointe du réseau de solidarité qui s'est mis en place dès le 30 octobre pour offrir gîte et couvert aux cinq exilés catalans, M. Puigdemont et quatre ex-conseillers (ministres) de droite et de gauche qui l'ont suivi.

L'élu flamand dit les avoir reçus "trois-quatre fois" à dîner chez lui, après avoir fait connaissance d'abord d'Antoni Comin, l'un des ministres, par le biais d'un ami commun barcelonais.

La photo d'un de ces moments de "convivialité" catalano-flamande, publiée par M. Parys sur son compte Twitter, s'est retrouvée en Une du quotidien espagnol El Païs à la mi-novembre.

Si la direction de la N-VA a dû se défendre dès le 30 octobre d'avoir "invité" Puigdemont, sa présence sur le sol belge et l'attention portée à son combat peuvent être utiles au parti sur le plan électoral, relève Pascal Delwit, professeur de science politique à l'Université libre de Bruxelles (ULB).

"Il y a une communauté d'intérêts (...), une forme d'échange", explique le politologue: "d'un côté la N-VA permet que le séjour de Puigdemont à Bruxelles se passe dans les meilleures conditions (...) d'un point de vue matériel, d'accueil, et en terme de visibilité politique".

De l'autre, ajoute M. Delwit en allusion à la cérémonie de voeux à Louvain, "le parti rappelle aux plus nationalistes dans l'opinion flamande qu'il ne trahit pas la cause en étant au gouvernement fédéral, la preuve il aide les frères nationalistes catalans et reste ancré sur la revendication indépendantiste", sur fond de concurrence avec le Vlaams Belang à l'approche des élections.

- 'Quelle frustration' -

Ce parti d'extrême droite a défendu début novembre devant le Parlement flamand une motion exigeant la reconnaissance de la Catalogne indépendante, mais tous les autres partis, dont la N-VA, l'ont rejetée.

Pour cette formation, la crise catalane relève d'un délicat exercice d'équilibrisme, entre la défense de son ADN nationaliste et la retenue diplomatique qu'implique sa participation au gouvernement, conduit par le libéral francophone Charles Michel.

Cela n'empêche pas certains de s'en prendre avec virulence à l'Espagne, comme l'eurodéputé N-VA Mark Demesmaeker, qui a accusé "la mafia politique espagnole" d'"intimider" M. Puigdemont à la veille de la séance d'investiture au Parlement catalan.

Lui aussi dans les starting-blocks pour les élections communales, l'élu de Halle, près de Bruxelles, n'a pas ménagé son énergie ces derniers mois en faveur des Catalans.

Se disant "choqué" que leur lutte émeuve aussi peu l'UE, il avait tenté le 19 décembre, avec six autres eurodéputés, de rendre visite près de Madrid à l'un des dirigeants indépendantistes emprisonnés.

"Quelle frustration pour eux ! Depuis des années leur statut d'autonomie est restée une coquille vide", souligne M. Demesmaeker, rappelant qu'en Belgique les régions ont gagné un pouvoir croissant "après six réformes de l'Etat".

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