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Sans contrition, Seselj rêve toujours de "Grande Serbie"

Inutile d'attendre le moindre remords de Vojislav Seselj avant le verdict en appel mercredi pour son rôle durant les guerres dans l'ex-Yougoslavie: une "Grande Serbie" dans les Balkans "reste d'actualité", dit à l'AFP l'ultranationaliste serbe.

Le tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) avait acquitté en 2016 ce tribun, dont les discours ont attisé le nationalisme serbe lors des conflits sanglants des années 1990. Ces guerres ont fait près de 140.000 morts.

Le parquet avait fait appel de cette décision marquée par des "erreurs de grande envergure", selon le procureur Serge Brammertz. Pour le magistrat, Seselj a "propagé une politique visant à réunir tous +les territoires serbes+ dans un Etat serbe homogène, qu'il appelait la +Grande Serbie+".

Sur ce point, il est d'accord avec Seselj, qui reçoit l'AFP au Parlement à Belgrade, où il avait été réélu après son acquittement. Mais à 63 ans, le député n'y voit nulle matière à regrets: "Cette idée est d'actualité, nous ne renoncerons jamais à l'idée d'une Grande Serbie", dit cet homme massif qui n'ira pas à La Haye entendre le verdict.

- Le Kosovo 'nous appartient' -

Le projet politique de son parti radical (SRS, extrême droite) reste "d'unifier au sein d'un même Etat tous les territoires où vit le peuple serbe", aujourd'hui divisé "par la volonté des grandes puissances, ennemis traditionnels de la Serbie".

Certes, concède-t-il, Bosniaques et Croates "sont actuellement contre" ce programme. "Mais nous devons sans répit les convaincre qu'ils sont des Serbes. Nous finirons pas réussir, toutes les preuves sont de notre côté", poursuit-il.

"Du corps du peuple serbe se sont formés artificiellement de nouvelles nations: les deux-tiers des Croates d'aujourd'hui sont d'anciens Serbes de confession catholique, les Croates parlent aujourd'hui le serbe".

Quant aux "musulmans de Bosnie, ce sont des Serbes d'origine, passés à l'Islam pendant l'occupation ottomane".

A ses yeux, le rattachement à la Serbie de la Republika Srpska, l'entité des Serbes de Bosnie, est une question de temps, car "c'est le souhait du peuple serbe qui y vit".

La question ne se pose pas pour le Kosovo, qui a déclaré son indépendance en 2008: l'ancienne province albanaise de la Serbie "nous appartient tout entière". "Aucun pouvoir (serbe) ne peut reconnaître le Kosovo car il le paierait de sa tête".

Regrette-t-il les morts, notamment ceux de Srebrenica? En quelques jours de juillet 1995, les forces serbes y ont assassiné 8.000 hommes et adolescents bosniaques, massacre qualifié de génocide par la justice internationale.

"Il y a eu crime, mais pas de génocide", répond-il. Et les autorités serbes n'en sont pas responsables. Le crime serait celui d'un seul homme, le "colonel Ljubisa Beara", mort en détention en 2017.

Selon Seselj, cet officier serbe aurait "agi sur ordre de l'étranger car (Bill) Clinton avait auparavant tenté de persuader" le chef des Bosniaques, Alija "Izetbegovic de laisser les Serbes entrer à Srebrenica pour y tuer 5.000 musulmans et offrir le prétexte au début des bombardements" de l'Otan, provoquant ainsi la défaite des troupes de Ratko Mladic.

"Le peuple serbe considère Mladic comme un héros", en dépit de sa condamnation en novembre à la perpétuité notamment pour Srebrenica.

- 'Sarajevo sera serbe' -

Seselj nie avoir tenu deux discours qui lui sont notamment reprochés par l'accusation: l'un où il encourageait les Serbes à "n'épargner personne" lors du siège de la ville croate de Vukovar en 1991; l'autre où il qualifiait les musulmans d'"excréments" un an plus tard à Mali Zvornik, en Serbie, selon le parquet. "Mensonges", dit-il.

Mais son seul regret est de n'être pas arrivé "au pouvoir à temps". Après un cuisant revers aux municipales à Belgrade en mars, il apparaît au crépuscule de sa vie politique.

"Rappelez-vous de Napoléon et de son exil à l'île d'Elbe", répond Seselj. "En revenant, il était sans armée, mais plus il se rapprochait de Paris, plus son armée grandissait. Ce qui est important c'est d'avoir un bon général".

"Dieu merci ma santé est bonne, j'ai vaincu le cancer et mon coeur est en bon état", dit Seselj, libéré en 2014, alors qu'il était malade, après plus d'une décennie de détention.

Est-il perturbé par l'idée de ne jamais revoir sa ville natale de Sarajevo? "Comment le savez-vous? Sarajevo sera à nouveau une ville serbe".

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