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Sergio Mattarella, un président à cheval sur ses prérogatives

Le président italien Sergio Mattarella, un homme de principes très à cheval sur ses prérogatives, revient mardi sur le devant de la scène comme arbitre de la crise politique née de l'éclatement du gouvernement installé au pouvoir voici 14 mois.

Dès que le Premier ministre Giuseppe Conte lui aura présenté sa démission, mardi soir, il entamera des consultations avec les formations politiques pour évaluer si une nouvelle coalition gouvernementale viable se profile ou si de nouvelles élections légilatives sont nécessaires.

M. Mattarella avait été élu début 2015, au suffrage universel indirect, par un Parlement alors à majorité de centre gauche.

Héritier de la Démocratie chrétienne (DC), ce Sicilien réservé de 78 ans avait refusé l'an dernier de céder à ce que son entourage qualifiait de "diktat" de la part de la Ligue (extrême droite) et du Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème), les deux partis sortis vainqueurs des législatives du 4 mars 2018.

Il avait en effet opposé son véto aux partis antisystème qui voulaient initialement imposer un ministre de l'Economie et des Finances anti-euro, Paolo Savona. Démonstration de sa volonté de défendre coûte que coûte l'institution présidentielle.

Fils d'un dirigeant historique de la DC, Sergio Mattarella a grandi entre un prestigieux lycée catholique de Rome et des camps de jeunesse catholique à Assise, et se destinait à une carrière de professeur de droit.

- Frère tué par la mafia -

Mais en janvier 1980, son frère aîné Piersanti, président de la région Sicile, meurt dans ses bras, assassiné par la mafia. C'est avec la chemise tachée du sang de son frère qu'il fait donc son entrée dans la vie publique en recevant les condoléances des autorités de Palerme.

Trois ans plus tard, cet homme reconnu pour son intégrité, qui fuit les médias -- contrairement à ses prédécesseurs il a observé un silence assourdissant, restant en Sardaigne pour de courtes vacances, face à la crise déclenchée par Salvini le 8 août -- est élu député sous la bannière de la DC.

"Mattarella représente la Sicile propre, celle qui a payé un prix élevé" pour la libérer du crime organisé, disait de lui l'ancien président de cette région, Rosario Crocetta.

Pour l'ancien chef du gouvernement de centre gauche Matteo Renzi, son élection à la présidence a été "un geste de proximité, d'affection, de respect" de la part du monde politique envers tous ceux qui ont perdu un mari, un père, un frère dans "la barbarie des années 1970, 1980 et même 1990".

Homme de principes, Sergio Mattarella est aussi un des rares démocrates-chrétiens à avoir démissionné.

L'épisode remonte à 1990, lorsqu'il a renoncé à son poste de ministre de l'Education de Giulio Andreotti pour protester contre l'adoption d'une loi confirmant à Silvio Berlusconi, pas encore entré en politique, son quasi-monopole sur les chaînes de télévision privées en Italie.

Redevenu simple député, il avait été chargé de rédiger une nouvelle loi électorale, censée assurer une meilleure stabilité politique à l'Italie.

La loi "Mattarellum", mêlant scrutin majoritaire et proportionnel, n'a pas vraiment satisfait puisqu'elle a été remplacée au bout de 10 ans par une nouvelle loi.

Si certains Italiens, surtout les plus jeunes, connaissent un peu cet homme au regard bleu et aux cheveux blancs, c'est surtout parce que le service militaire obligatoire a été supprimé en 2001, quand il était ministre de la Défense.

Après ce dernier passage au gouvernement et 25 ans au Parlement, il avait quitté la vie politique en 2008. Trois ans plus tard, il était élu juge à la Cour constitutionnelle.

Veuf, il a trois enfants et six petits-enfants. Il résidait avant son élection dans un modeste appartement de fonction à deux pas du Quirinal, le palais présidentiel.

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