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L'ex-dirigeant des Croates de Bosnie à nouveau devant le TPIY

L'ex-dirigeant des Croates de Bosnie Jadranko Prlic, condamné en 2013 pour avoir tué et déporté des populations musulmanes pendant la guerre de Bosnie, a comparu lundi pour son appel devant le TPIY, assurant que les Croates avaient été "forcés" de se défendre lors du conflit.

"Je ne faisais pas partie de la chaîne de commandement" des forces croates de Bosnie, le HVO, a-t-il assuré aux cinq juges du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), affirmant que les communautés avaient eu besoin de s'organiser "pour leur défense".

Avec cinq autres anciens hauts responsables militaires et politiques des Croates de Bosnie, il avait été jugé pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité, commis à l'encontre des musulmans lors de cette guerre (1992-1995) qui a fait plus de 100.000 morts et 2,2 millions de déplacés.

En procès devant le TPIY depuis 2006, Jadranko Prlic, âgé aujourd'hui de 57 ans, avait été condamné à 25 ans de prison pour avoir mené le transfèrement de populations musulmanes en Bosnie et avoir eu recours à des meurtres, des viols, des destructions de biens civils dans le but de créer une "grande Croatie".

Le verdict du premier procès, selon son avocat Michael Karnavas, témoigne d'une "négligence calculée des preuves, d'un mépris abject du contexte, et avec tout le respect que je dois, d'un dangereux abandon de l'impartialité".

Pour la représentante du procureur Katrina Gustafon, "cette théorie du complot, aussi absurde soit-elle, est centrale dans l’appel de Prlic".

Le TPIY a indiqué qu'il devrait rendre l'arrêt dans cette affaire Prlic en novembre.

- 'Changer l'équilibre ethnique' -

D'abord président de la Communauté croate de Herceg-Bosna, M. Prlic était le Premier Ministre de la République croate de Herceg-Bosna, entité croate unilatéralement proclamée dans le sud-ouest de la Bosnie-Herzégovine.

Les nationalistes croates convoitaient cette région, et notamment la ville de Mostar, un des symboles du caractère multiethnique de la Bosnie avant la guerre. Les soldats croates y ont systématiquement chassé les musulmans, et bloqué le passage de l'aide humanitaire.

L'éphémère république autoproclamée d'Herceg-Bosna a été dissoute peu avant les accords de paix de 1995 et son territoire a été intégré à la Fédération croato-musulmane, entité qui forme avec la Republika Srpska (entité serbe) la Bosnie d'après-guerre.

"Ces crimes avaient pour but de changer l'équilibre ethnique pour s'assurer que les Croates puissent contrôler entièrement et dominer le territoire de leur communauté croate, leur République croate", a dénoncé un autre représentant de l'accusation, Douglas Stringer.

Les co-accusés de M. Prlic, dont Bruno Stojic, ancien ministre de la Défense, Slobodan Praljak, ancien officier supérieur dans l'armée croate, et Milivoj Petkovic, ancien responsable des forces armées d'Herceg-Bosna, avaient été condamnés en 2013 à des peines allant de dix à vingt ans de prison.

Les suspects, qui s'étaient livrés au tribunal, avaient alors tous plaidé non coupable.

"Le procès Prlic et consorts était l'un des plus compliqués et longs du tribunal", a indiqué le TPIY dans un communiqué, mentionnant 326 témoins, 465 jours d'audience et 2.600 pages du premier jugement.

D'autres Croates ont également été jugés par le TPIY, dont le général Ante Gotovina, condamné en première instance à 24 ans de prison avant que ce verdict ne soit annulé, un coup de théâtre intervenu lors du procès en appel.

Acquitté en 2012 de crimes de guerre contre les Serbes, il a été nommé en novembre conseiller du ministre croate de la Défense.

La guerre de Bosnie a essentiellement opposé les musulmans aux Serbes, mais Croates et musulmans se sont également combattus.

L'arrêt dans l'affaire Prlic sera l'un des derniers jugements du TPIY. L'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie Ratko Mladic devrait connaître le sien à la même période.

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