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U2 et Bono n'ont pas vraiment laissé Bercy sans voix

Le drame des migrants, un plaidoyer pour l'Europe, un hommage aux femmes: U2, retombant dans les travers de son leader Bono qui se rêve Prix Nobel de la Paix, a livré un concert que de rares moments exaltants n'ont jamais pu faire décoller, samedi.

Pourtant, au grand soulagement du public de l'AccorHotel Arena à guichets fermés, comme elle le sera dimanche, mercredi et jeudi, Bono avait bel et bien retrouvé sa voix, après l'avoir brutalement perdue il y a une semaine à Berlin.

Fait rare pour U2, il avait été obligé de stopper ce show qui s'inscrit dans la tournée "eXPERIENCE + iNNOCENCE" et reprend, en l'optimisant encore mieux, le concept scénographique de celle de 2015.

C'est donc sur une des passerelles du fameux écran géant mobile, long de 30 mètres et haut de 8, suspendu au coeur de la salle, que la silhouette des quatre Irlandais est apparue sur "The Blackout" après une introduction avec des images d'archives de grandes villes européennes détruites après la Seconde Guerre mondiale, et le visage de Charlie Chaplin dans la peau du "Dictateur".

L'avertissement face à la montée des extrêmes est clair. Mais dans le registre du concert politique, on est tout de même très loin de ce que peut proposer un Roger Waters sur sa tournée actuelle "Us+Them" en matière de critique virulente. Quand U2 s'attriste de façon très convenue, l'ancien Pink Floyd attaque violemment.

Tout aussi bienveillants et sincères soient-ils, les messages visuels qui ont accompagné la performance du quatuor irlandais pendant un petit peu plus de deux heures, ont donc souvent plombé le spectacle.

Au final, personne n'a été oublié - les LGBTQ ont aussi eu droit à leur clip -, sinon peut-être la centaine de tortues marines menacées d'extinction retrouvées sans vie cet été au Mexique. Lors du rappel, Bono concèdera même trop s'éterniser parfois à prêcher les convertis pour un monde meilleur, au grand dam des trois autres membres du groupe, qui eux pensent avant tout musique.

- Le retour de MacPhisto -

Difficile de ne pas être d'accord avec The Edge (guitare, clavier), Adam Clayton (basse) et Larry Mullen Jr (batterie), même si on était prêt à tout pardonner à Bono après sa vibrante interprétation de "One", rare instant "chair de poule" de la soirée qui ramena à une époque de l'album "Achtung Baby", où le groupe faisait montre de bien plus de mégalomanie et d'ironie qu'aujourd'hui.

C'est d'ailleurs dans la reprise de trois autres chansons de cet opus majeur, qui marqua en 1991 le renouveau musical du groupe, que U2 a été à son meilleur.

"Until the End of the World" a fait passer le concert dans une autre dimension, après une première heure laborieuse malgré "I Will Fllow" le premier tube de U2 datant de 1980 et le tout récent "Red Flag Day" et son riff post punk emprunté au "Damage Goods" de Gang of Four.

Sur "Even Better Than the Real Thing", Bono a voulu prouver que le "petit Paul (Hewson, son vrai nom) qui vivait au 10 Cedarwood Road à Dublin joue dans le plus grand groupe de rock du monde, avant de ressusciter MacPhisto, son doppelgänger maléfique qu'on n'avait plus vu depuis 25 ans et la tournée "Zoo TV". En introduction de l'extraordinaire "Acrobat", MacPhisto invita à croire aux fake news mais pas au réchauffement climatique.

Enfin un peu de second degré ! Comme lorsque dans un élan d'autodérision, U2 a raconté sa rencontre avec le diable - le succès - le temps d'un film d'animation sur fond de "Hold me, Thrill me, Kiss me".

Las, cela ne dura pas. Revint au galop l'humanisme exacerbé de Bono pour saluer les femmes de ce monde. Heureusement qu'en préambule à ce laborieux rappel résonna dans les enceintes "Women of the World Take Over" du génie Jim O'Rourke.

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