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Ukraine : menace de frappes russes à Kiev, promesse d'équipements lourds américains

La Russie a menacé mercredi de frapper des centres de commandement à Kiev, accusant l'Ukraine d'attaques contre son territoire, tandis que les Etats-Unis ont annoncé la fourniture d'équipements militaires lourds aux Ukrainiens.

Dans le même temps, l'ONU a estimé qu'un "cessez-le-feu général" à des fins humanitaires ne semblait "pas possible actuellement", les Nations unies attendant toujours des réponses de Moscou à des propositions concrètes en vue de l'évacuation de civils.

"Nous voyons des tentatives de sabotage et de frappes des forces ukrainiennes sur des cibles sur le territoire de la Fédération de Russie, a déclaré Igor Konachenkov, le porte-parole du ministère russe de la Défense.

"Si de tels événements se poursuivent, des frappes seront menées par l'armée russe sur des centres de prise de décision, y compris à Kiev, ce que l'armée russe s'est retenue de faire jusqu'à présent", a-t-il mis en garde.

A Marioupol, dans le sud-est de l'Ukraine, "les restes des unités ukrainiennes et des nazis (du régiment) Azov présents dans la ville sont bloqués et privés de la possibilité de sortir de l'encerclement", a par ailleurs assuré M. Konachenkov.

Peu auparavant, la Russie avait annoncé la reddition de plus de mille soldats ukrainiens dans cette cité portuaire stratégique que ses forces assiègent et bombardent depuis plus de 40 jours.

- Des équipements lourds américains -

La prise de Marioupol serait une victoire importante pour les Russes car elle leur permettrait de consolider leurs gains territoriaux côtiers le long de la mer d'Azov en reliant la région du Donbass, en partie contrôlée par leurs partisans, à la Crimée que Moscou a annexée en 2014.

Si certains experts jugent sa chute inévitable, des militaires ukrainiens continuent de résister, les combats se concentrant désormais dans la gigantesque zone industrielle de cette ville dont entre 20 et 22.000 des habitants ont au total péri, d'après l'administration régionale.

Les bombardements aériens russes sur Marioupol se poursuivaient, visant en particulier le port et le vaste complexe métallurgique Azovstal, a fait savoir mercredi l'armée de terre ukrainienne.

Ce labyrinthe, transformé en bastion par les soldats ukrainiens qui se sont retranchés dans ses kilomètres de souterrains, promet une bataille acharnée.

"Des unités de la 36e brigade de la marine nationale à Marioupol sont parvenues, à l’issue d’une manoeuvre complexe et très risquée, à rejoindre le régiment Azov", a de son côté affirmé mercredi sur Facebook Oleksiï Arestovitch, un conseiller du président ukrainien Volodymyr Zelensky.

"Le système de défense de la ville s’est ainsi renforcé et élargi", a-t-il ajouté.

Sur place, des journalistes de l'AFP embarqués avec les forces russes ont vu les ruines calcinées de cette ville que les Ukrainiens disent "détruite à 90%".

Depuis le début de la semaine circulent des rumeurs, jusqu'ici non confirmées, d'emploi d'armes chimiques par les Russes à Marioupol.

Selon le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, "les forces russes pourraient (y) utiliser (...) notamment du gaz lacrymogène mélangé avec des agents chimiques" contre les "combattants et les civils ukrainiens". Moscou affirme pour sa part que "la menace de terrorisme chimique" vient des Ukrainiens.

C'est dans ce contexte que Joe Biden a promis mercredi à Volodymyr Zelensky une nouvelle aide militaire des Etats-Unis de 800 millions de dollars.

Il s'agira de matériels "très efficaces que nous avons déjà livrés" à l'Ukraine, ainsi que de "nouvelles capacités", ce qui comprend "des systèmes d'artillerie" et des "moyens de transport blindés", a précisé l'exécutif américain, qui dit avoir aussi donné son feu vert au transfert d'hélicoptères.

- "Il n'y a plus de médecins" -

Les bombardements continuent également dans la partie orientale de l'Ukraine, où ils ont provoqué la mort de sept personnes ces dernières 24 heures à Kharkiv, une ville du nord-est aussi assiégée par les Russes depuis le début de l'invasion.

Kiev a appelé la population de ces régions à fuir au plus vite de peur d'une grande offensive russe imminente pour le contrôle total du Donbass, que les troupes ukrainiennes et leurs ennemis séparatistes prorusses se partagent depuis 2014.

L'Ukraine a toutefois averti qu'elle n'ouvrirait aucun couloir humanitaire mercredi car les Russes "ont bloqué des cars" et "violent le cessez-le-feu" dans certaines zones, ce qui rend la situation "dangereuse".

Kiev a affirmé mercredi avoir touché, par des tirs de missiles, le croiseur russe Moskva en mer Noire.

"Il brûle avec intensité. Maintenant. Et avec cette mer agitée, il est impossible de savoir quand ils seront capables de recevoir de l'aide", a affirmé sur Youtube un conseiller du président ukrainien, Oleksiï Arestovitch, assurant que "510 membres d'équipage" étaient à bord.

Ces affirmations étaient invérifiables dans l'immédiat par l'AFP de source indépendante. Aucun incendie sur un navire militaire n'a été rapporté pour l'instant par les agences de presse russes.

Des analystes considèrent que le président russe Vladimir Poutine, embourbé face à la résistance acharnée des Ukrainiens, veut obtenir une victoire dans le Donbass avant le défilé militaire du 9 mai marquant sur la Place Rouge la victoire soviétique sur les nazis en 1945.

A cet égard, le chef d'une des deux "républiques" séparatistes prorusses unilatéralement proclamées dans ce vaste territoire minier, Léonid Passetchnik, a affirmé mercredi que ses troupes contrôlaient désormais "80 à 90%" de la région de Lougansk, l'une des cibles prioritaires du Kremlin.

A Severodonetsk, la ville la plus à l'est encore tenue par l'armée ukrainienne, où des frappes se sont entendre, "il n'y a plus de médecins, pas d'infirmières et toutes les pharmacies sont fermées", a raconté à l'AFP un homme de 70 ans.

Moscou avait dit fin mars dorénavant concentrer ses efforts sur le sud et l'est.

- Une "scène de crime" -

L'Ukraine est devenue une véritable "scène de crime", a de son côté jugé mercredi à Boutcha, près de Kiev, le procureur de la Cour pénale internationale, le Britannique Karim Khan.

"Nous sommes ici parce que nous avons de bonnes raisons de penser que des crimes relevant de la compétence de la Cour sont commis. Nous devons transpercer le brouillard de la guerre pour parvenir à la vérité", a-t-il lâché devant la presse dans cette localité devenue le symbole des atrocités du conflit. Et ce depuis que des centaines de corps, selon les autorités ukrainiennes, y ont été découverts fin mars, la Russie niant pour sa part toute exaction en Ukraine.

Autour de la capitale comme ailleurs, les autorités ukrainiennes disent chaque jour trouver des cadavres dans les zones dont les Russes se sont retirés.

Dans un village du sud voisin de Kherson, une ville proche de la ligne de front, sept personnes ont été fusillées par des militaires russes dans une maison qu'ils ont ensuite fait exploser pour dissimuler le crime, a dénoncé mercredi le parquet général ukrainien.

A Dnipro, dans l'est, le maire-adjoint, Mikhaïl Lyssenko, a dit que les corps de plus de 1.500 soldats russes que "personne ne veut récupérer" reposaient dans des morgues de cette grande cité industrielle.

A Washington, Joe Biden a pour la première fois mardi accusé Vladimir Poutine de "génocide" en Ukraine.

Un terme que le Premier ministre canadien Justin Trudeau a repris le lendemain, contrairement au chancelier allemand Olaf Scholz et au président français Emmanuel Macron, dont le refus a été qualifié de "très blessant" par M. Zelensky.

Le président polonais Andrzej Duda, en visite à Kiev, n'a pas utilisé le terme de "génocide" mais a estimé que la Russie était coupable de "terrorisme" et de "cruauté".

"Ce n'est pas une guerre, c'est du terrorisme. Si quelqu'un envoie des avions et des soldats pour bombarder des zones résidentielles et tuer des civils, ce n'est pas la guerre. C'est de la cruauté, du banditisme, du terrorisme", a-t-il déclaré.

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