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Un homme d'affaires inculpé du meurtre d'un journaliste en Slovaquie

L'homme d'affaires slovaque Marian Kocner a été inculpé pour avoir ordonné le meurtre du journaliste d'investigation Jan Kuciak, a annoncé un procureur jeudi, à deux jours du premier tour de l'élection présidentielle en Slovaquie.

Jan Kuciak et sa compagne Martina Kusnirova ont été tués chez eux en février 2018. Le journaliste s'apprêtait à rendre public un rapport sur les liens présumés entre des hommes politiques slovaques et la mafia italienne ainsi que sur des fraudes autour des fonds agricoles européens.

Le meurtre de Jan Kuciak et son rapport publié à titre posthume ont provoqué des manifestations de rue massives dans toute la Slovaquie, un pays de 5,4 millions d'habitants, et poussé le Premier ministre Robert Fico à la démission. Depuis, il a été remplacé à ce poste par Peter Pellegrini.

"Le 8 mars, le parquet a mis en examen Marian K. pour avoir ordonné le meurtre du journaliste d'investigation Jan Kuciak", a déclaré à la presse un procureur dont le nom n'a pas été divulgué pour des raisons de sécurité.

- Mobile du meurtre -

"Le travail journalistique de la victime a été le mobile du meurtre. L'enquêteur fonde son accusation sur une preuve objective qui ne peut être pour l'instant divulguée", a ajouté le procureur.

"Nous n'avons pas encore retrouvé l'arme mais nous savons, preuve à l'appui, de quel type d'arme il s'agissait", a encore dit le procureur, n'excluant pas des mises en examen d'"autres personnes qui ont participé à ce meurtre".

Dans ses articles, Jan Kuciak a parlé des affaires touchant Marian Kocner, qui, à 55 ans, est le propriétaire de plusieurs sociétés immobilières.

Quatre autres personnes impliquées dans le meurtre avaient déjà été inculpées l'année dernière, dont une ancienne interprète de M. Kocner.

Peter Bardy, l'ex-rédacteur en chef de Jan Kuciak, a révélé en 2017 que Marian Kocner avait appelé ce dernier pour le menacer.

M. Kocner a annoncé à l'époque qu'il allait diffuser des informations sur la vie privée de journalistes, selon le quotidien SME.

Soupçonné de fraudes, il a été arrêté en juin 2018 et placé en détention.

Selon des médias, il a eu des liens avec des membres du parti social-démocrate Smer-SD au pouvoir, toujours présidé par Robert Fico.

- Appels au changement -

La décision du parquet intervient juste avant l'élection présidentielle, qui précédera les législatives de l'an prochain.

La favorite du scrutin, Zuzana Caputova, est une critique de l'actuel gouvernement et a elle-même participé à des manifestations de rue après le meurtre du journaliste.

"Les gens appellent au changement", a récemment dit à l'AFP Mme Caputova.

Quelque 30.000 personnes ont défilé en février dans la capitale Bratislava et des milliers d'autres dans 36 autres villes et villages de Slovaquie pour marquer le premier anniversaire du double assassinat.

Les sondages placent Mme Caputova loin devant son principal rival, le vice-président de la Commission européenne Maros Sefcovic, indépendant, mais soutenu par le parti au pouvoir.

Mme Caputova est créditée de 52,9% des intentions de votes contre 16,7% pour Sefcovic, selon un sondage effectué ce mois-ci par l'agence AKO. Une autre enquête, de l'institut Focus, leur donne respectivement 44,8% et 22,1%.

"Avec cette annonce, les autorités veulent peut-être montrer le bon fonctionnement de l'Etat, ce qui pourrait faire gagner à M. Sefcovic quelques points de pourcentage", a déclaré jeudi à l'AFP Grigori Meseznikov, un analyste slovaque.

Mais "cela pourrait aussi être considéré comme une légitimation de Mme Caputova qui symbolise les changements. Les protestations et les remaniements aux plus hauts postes du gouvernement et de la police ont finalement ouvert la voie à une enquête sur ce double meurtre", a-t-il ajouté.

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