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Vjosa Osmani, une présidente du Kosovo qui "n'a peur de rien"

Vjosa Osmani, élue présidente du Kosovo dimanche, est une juriste partie en guerre contre la corruption, particulièrement populaire chez les jeunes et les femmes qui voient en elle une source d'inspiration contre le patriarcat.

La professeur de droit polyglotte de 38 ans incarne, avec son allié le nouveau Premier ministre réformiste de gauche Albin Kurt, une classe politique d'une nouvelle génération après des années de règne des anciens commandants rebelles de la guerre d'indépendance contre les forces serbes (1998-99).

Vjosa Osmani et Albin Kurti ont bénéficié d'un ras-de-marée électoral aux législatives de février. Mais c'est elle qui a rassemblé sur son nom plus de 300.000 voix, un score qui frôle celui obtenu jadis par l'ancien président Ibrahim Rugova, considéré comme le père de la nation kosovare.

Avec 71 votes de députés sur 120, elle transforme l'essai au poste de présidente, qu'elle occupait par intérim depuis quelques mois en remplacement de Hashim Thaçi, inculpé pour crimes de guerre en novembre par la justice internationale.

Elle confirme aussi la montée en puissance des femmes sur la scène politique de l'ancienne province de Belgrade qui a déclaré son indépendance en 2008.

Le gouvernement compte six femmes ministres sur 15, soit un niveau jamais atteint dans un territoire où les idées patriarcales sont profondément enracinées.

Sur 120 députés, un tiers sont des femmes.

"Les femmes ont le droit d'être là où elles le veulent", a dit Mme Osmani après sa victoire, peinant à retenir ses larmes. "N'arrêtez pas, n'arrêtez pas d'aller de l'avant. Tous vos rêves peuvent devenir réalité", a-t-elle lancé.

- "Excellentes idées" -

Les médias kosovars saluent en cette petite brune à la chevelure bouclée une personnalité "qui n'a peur de rien". Elle est l'une des premières à avoir parlé de la corruption d'élites qui semblaient toutes puissantes dans le territoire pauvre d'1,8 million d'habitants, dont les maux économiques ont été aggravés par la pandémie.

"Osmani a conquis le coeur de nombreux citoyens kosovars car elle est charismatique, a confiance en elle et est un modèle pour les femmes du XXIè siècle", résume une revue juridique.

Elle a fait son entrée au Parlement en 2011 sous l'étiquette de la Ligue démocratique du Kosovo (LDK, centre-droit), le parti d'Ibrahim Rugova.

Mais elle a claqué la porte lorsque la LDK a provoqué en 2020 la chute du précédent gouvernement d'Albin Kurti au début de la crise du coronavirus qui menaçait de submerger les services de santé.

Elle a créé sa propre formation, Guxo (Osez) avant de s'allier au mouvement Vetevendosje (VV, autodétermination) du Premier ministre.

Professeur à l'Université de Pristina, cette mère de deux jumelles née dans la ville divisée de Mitrovica (nord) a effectué son doctorat aux Etats-Unis et parle cinq langues: l'albanais, le serbe, l'anglais, le turc et l'espagnol.

Ses rares critiques lui reprochent son expérience. "Ceux qui ont fait allégeance à VV n'ont rien d'autre à offrir que des critiques" et souffrent "d'un manque élémentaire de connaissances nécessaires pour gouverner", assène Isa Mustafa, ex-chef de la LDK contraint à la démission par les piètres résultats électoraux de son parti.

En attendant, ses admirateurs comptent sur le changement.

"Sans aucun doute, elle saura et osera lutter contre tous les criminels, tous les phénomènes illégaux qui menacent de prendre en otage notre avenir, nos enfants, notre nouvel Etat", déclare Ilir Ferati, l'un de ses anciens étudiants.

Selon l'intéressée, les nouveaux dirigeants du Kosovo ont "d'excellentes idées" pour affronter les nombreux défis qui s'annoncent. "Mais rien ne sera possible si nous ne démolissons pas le mur énorme et solide du crime et de la corruption érigé au fil des années".

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