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A Grandpuits, la raffinerie TotalEnergies a tourné la page du pétrole

Vidé et déjà percé de plusieurs côtés, le réservoir de gaz numéro 206 de l'usine TotalEnergies à Grandpuits n'attend plus que son démantèlement dans le cadre d'une reconversion de cette raffinerie de Seine-et-Marne pour plus de 500 millions d'euros d'investissements.

"Il y en avait quatre de plus, qui sont déjà partis", lance le directeur du site, Michiel Van Raebroeckx. "Celui-là, c'est le suivant."

Vestiges de l'ancienne installation pétrolière, plusieurs gros tuyaux gisent, déconnectés, avec de petits panneaux jaunes et rouges: "entrée interdite, danger".

"Là, c'est la partie qui dégage", décrit à l'AFP le responsable lors d'une visite de ce site gigantesque où se dessine, selon TotalEnergies, l'avenir plus "vert" du géant pétrolier.

Dans le cadre d'une reconversion annoncée en septembre 2020, Grandpuits, qui était la seule raffinerie d'Ile-de-France, doit accueillir à horizon 2025 une bioraffinerie et fabriquer des carburants à partir d'anciennes huiles de cuisson recyclées et non plus de pétrole.

La production fossile est à l'arrêt depuis 2021 et, au total, 14 réservoirs d'hydrocarbures, ainsi que deux unités de production, ont déjà disparu.

Il s'agit d'une nouvelle étape de la reconversion des activités de raffinage du groupe français. Premier projet emblématique, le site de La Mède (Bouches-du-Rhône) a été transformé il y a plusieurs années déjà en "bioraffinerie".

"On fait le deuil du raffinage", mais le projet est "exemplaire" pour "l'avenir de TotalEnergies", se félicite le directeur de Grandpuits.

- Production d'hydrogène -

Une soixantaine de personnes œuvrent au démantèlement, et jusqu'à 1.000 emplois sont attendus sur les différents chantiers: la bioraffinerie, une unité de recyclage de plastique, et un site de production de plastique biodégradable et recyclable à base de céréales.

S'y ajoutent une centrale photovoltaïque de 25 hectares déjà ouverte et une unité de production d'hydrogène d'Air Liquide, pour un investissement de 130 millions d'euros annoncé mardi.

Les quelque 20.000 tonnes d'hydrogène produits par an serviront surtout à la fabrication de "SAF", du carburant d'avion "durable" au bilan carbone inférieur à celui du kérosène.

La bioraffinerie produira 400.000 tonnes de différents carburants, dont 210.000 de "SAF".

L'hydrogène ne sera pas "vert": son bilan carbone ne sera pas nul. Il sera fabriqué à partir de vapeur d'eau et de gaz: naturel habituel d'un côté, et issu de la bioraffinerie de l'autre.

Quelque 60% des émissions de CO2 de la production d'hydrogène, soit 110.000 tonnes par an, seront "captés" pour réutiliser le carbone dans "des applications agroalimentaires et industrielles".

Le volume de CO2 non-émis représente un tiers des émissions totales du site de Grandpuits une fois intégralement opérationnel. Mais ce n'est qu'une infime proportion des émissions totales du groupe TotalEnergies, évaluées par lui à plus de 400 millions de tonnes d'équivalent CO2 par an dans le monde, ce que Greenpeace estime sous-estimé.

Le groupe de Patrick Pouyanné continue par ailleurs à développer les projets d'hydrocarbures dans le monde, désireux de répondre à une demande qui continuer de croître, notamment sur le gaz.

- "Démantèlement chirurgical" -

La réorientation du site entraîne la suppression de 150 postes sur 400, dont des départs anticipés à la retraite et de la "mobilité interne" et donc "aucun licenciement", selon TotalEnergies. Le projet avait suscité l'émotion et entraîné une grève de 40 jours. Il s'est, depuis, matérialisé.

Sur un ancien parking, les pelleteuses s'activent pour poser les fondations du recyclage de plastique -- "le projet le plus avancé", selon M. Van Raebroeckx.

Les travaux sont moins avancés sur le futur site de la raffinerie de "SAF", qui accueillait jusqu'à peu une partie cruciale -- la réduction du taux de souffre -- de la fabrication de carburants fossiles.

Des ouvriers en vestes imperméables jaunes installent une grue pour le prochain jalon de la transformation: remplacer le réacteur, au cœur de l'unité de production, où aura lieu la réaction chimique.

Ici, "on ne fait pas de démantèlement complet, mais un démantèlement chirurgical" pour "réutiliser et adapter" des éléments de l'ancienne installation, note M. Van Raebroeckx.

Petit à petit, la silhouette du gigantesque site va donc changer, mais pas complètement: sur neuf sphères réservoirs de gaz, quatre resteront. Et une vingtaine des 80 réservoirs de carburant.

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