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Après les attaques, la petite ville de Trèbes se recueille: "On ne pensait jamais à ça, on se sentait à l'abri"

"Stop à la violence, stop, stop": la petite ville de Trèbes dans l'Aude se recueille dimanche à la mémoire des quatre victimes abattues par Radouane Lakdim, un petit délinquant radicalisé sur lequel les enquêteurs poursuivent leurs investigations, avec deux de ses proches toujours en garde à vue.

Sur la façade de la mairie, des roses blanches se sont accumulées avec un message écrit à la main "Stop à la violence, stop, stop". A l'intérieur du bâtiment, un gendarme filtre les entrées.

"Je suis très triste. Toute la France est malheureuse", explique, des rameaux d'olivier à la main, Emile Acco, peintre carrossier à la retraite, devant l'église de Trèbes. "On ne pense jamais à ça, on se sent plus à l'abri à Trèbes que dans les grandes villes mais malheureusement c'est arrivé".

"J'ai envie de prier pour le gendarme qui a donné sa vie, pour tous ceux qui ont perdu la vie, pour le monde entier. On a envie que ça s'arrête", poursuit Jean-Pierre Bordeaux venu du village voisin de Capendu avec sa femme Henriette pour assister à la messe de 10h30 en hommage aux victimes.

"Nous sommes venus (...) pour donner la main aux familles en ce jour des Rameaux. C'est plus que dur, on n'est à l'abri de rien nulle part", poursuit-il.


Tombé en "héros" 

Au surlendemain des attaques de Carcassonne et du Super U de Trèbes, le patron des gendarmes Richard Lizurey est attendu à Toulouse et à la caserne du groupement de l'Aude à Carcassonne, pour y rencontrer les hommes du GIGN intervenus lors de la prise d'otages, ainsi que la veuve du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame.

Cet officier de gendarmerie est tombé en "héros" sous les balles de l'assaillant après s'être livré à la place d'une otage du Super U. L'Elysée a annoncé qu'un "hommage national" lui serait rendu à une date qui n'a pas été précisée.

Radouane Lakdim, un Français d'origine marocaine de 25 ans, s'était présenté vendredi comme "un soldat" du groupe jihadiste Etat islamique (EI), lequel a peu après revendiqué les attaques. S'il avait été repéré et suivi par les services de renseignement, "nous pensions qu'il n'y avait pas de radicalisation", a concédé le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb.

A son domicile, dans la cité d'Ozanam à Carcassonne, les enquêteurs ont découvert des "notes faisant allusion à l'Etat islamique" et s'apparentant à un testament, selon des sources concordantes. Parallèlement, deux personnes ont été placées en garde à vue: un jeune de 17 ans présenté comme un ami de Radouane Lakdim, et sa compagne.

Vendredi peu après 10H00, Lakdim, armé d'un pistolet, d'un couteau et d'engins artisanaux, avait commencé son équipée meurtrière en volant une voiture à Carcassonne, blessant grièvement son conducteur portugais et tuant son passager, Jean Mazières, un viticulteur à la retraite.

Après avoir tenté de s'en prendre aux parachutistes du 3e RPIMa de Carcassonne, il avait tiré sur des CRS revenant de jogging, blessant un policier près de la caserne. Le modus operandi rappelle les attaques de Mohamed Merah, il y a six ans presque jour pour jour, à quelques dizaines de kilomètres de là à Montauban et Toulouse, où l'islamiste avait été abattu dans l'assaut du RAID, le 22 mars 2012.

C'est également en criant "Allah Akbar" que Radouane Lakdim a surgi et fait feu vendredi dans un Super U de Trèbes, une petite ville calme proche traversée par le canal du Midi, tuant un salarié quinquagénaire du supermarché, Christian Medves, et un client, Hervé Sosna, maçon retraité.

Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, qui s'était livré à la place d'une otage, était tombé sous les balles du tueur, déclenchant l'intervention du GIGN, qui a tué Lakdim. L'officier de gendarmerie a succombé à ses blessures, samedi à l'aube.

Au total, Lakdim a tué quatre personnes. Trois autres ont été blessées: un CRS, un gendarme du GIGN et l'automobiliste portugais, qui était entre la vie et la mort dimanche.

Une Marche blanche est en préparation pour leur rendre hommage samedi à la veille de Pâques, selon ses organisateurs.


Fiché "S" 

Fiché "S" (pour Sûreté de l'Etat), Radouane Lakdim ne semblait plus être une menace aux yeux des autorités. En août 2016, il avait fait un mois de prison à la maison d'arrêt de Carcassonne, après des condamnations pour "port d'arme prohibé", "usage de stupéfiants" et "refus d'obtempérer".

En 2016 et 2017, il avait de nouveau été suivi par les services de renseignements, qui n'avaient décelé aucun "signe précurseur pouvant laisser présager un passage à l'acte terroriste", selon le procureur de la République de Paris, François Molins.

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