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Assises de la Somme: "Je vous dirai jamais que c'est moi parce que c'est pas moi !", assure Rançon

Jacques Rançon a nié avec constance vendredi devant la cour d'assises de la Somme avoir tué Isabelle Mesnage, mais n'a pas trouvé de mots pour dresser un portrait positif de lui-même, poussé dans ses retranchements sur ses aveux, son rapport à la vérité, ses autres crimes.

"Je vous dirai jamais que c'est moi parce que c'est pas moi, alors calmez-vous!": le Picard de 61 ans, devenu le "tueur de la gare de Perpignan", est sorti pour la première fois de ses gonds face à un avocat des parties civiles, Didier Seban.

Depuis l'ouverture mardi de son procès pour le viol et le meurtre, vieux de 35 ans, de la jeune informaticienne, il avait laissé paraître très peu d'émotions.

"En 1986, j'étais pas un assassin", a-t-il redit. Il avait été condamné en 2018 à la réclusion à perpétuité pour ses crimes à Perpignan, en 1997 et 1998.

En juin 2019, il avait avoué le viol, le meurtre et la mutilation du corps d'Isabelle Mesnage, à sa dernière audition de garde à vue puis devant le juge, mais s'était ensuite rétracté.

Répondant souvent d'un seul mot et répétant "je ne sais pas", il a été presque loquace vendredi pour expliquer ces aveux.

"A un moment, j'ai dit: +Je veux bien avouer mais c'est pas moi+. Tout ce que j'ai dit, c'était en pensant à Moktaria et à Marie-Hélène", ses victimes de Perpignan, a-t-il expliqué. "J'en avais marre, alors (...) j'ai dit ce qu'ils voulaient entendre".

Mais "vous avez donné des détails que seul le tueur pouvait connaître, c'est votre signature", assène l'avocat, évoquant notamment le sac à dos tâché de sang de la jeune femme.

- "Signatures" -

Me Seban et l'avocate générale Anne-Laure Sandretto ont longuement cherché à sonder son rapport à la vérité.

Les conseils de Jacques Rançon ont, eux, tenté de démontrer que la seconde enquête, lancée en 2018 sur ce "cold case", est partie du principe de sa culpabilité, négligeant d'autres aspects du dossier.

"Puisqu'on cherche des similitudes, on peut aussi chercher des différences", a relevé son avocat, Me Xavier Capelet, soulignant que son client n'avait rien à perdre puisqu'il était déjà condamné à la perpétuité et qu'il aurait sans doute vécu un procès "moins pénible" s'il avait avoué.

Lors de sa plaidoirie, Me Corinne Herrmann, défense des parties civiles, a en revanche relevé les "signatures" de Jacques Rançon dans ce crime, à la fois "ante mortem" - "le fait d'attraper le cou de ses victimes", "les blessures au couteau", les "coups" - et "post-mortem": "l'ablation des organes sexuels", un acte "très rare", "comme pour les meurtres de Perpignan".

"Pour moi, c’est une signature aussi certaine que si on avait l’ADN", a-t-elle asséné.

"Où est le hasard?" a renchéri Me Seban, pointant la série d'"éléments menant tous à Jacques Rançon", à commencer par son "terrain de chasse", un "territoire extrêmement limité" où Isabelle Mesnage a été vue pour la dernière fois et proche de deux autres crimes ou tentatives qu'il a commis. "Ca ne peut être que lui!", a-t-il lancé.

- "Dire qui vous êtes" -

"Vous avez l'occasion de dire à cette cour qui vous êtes", avait insisté plus tôt la présidente, Patricia Ledru, rappelant que l'accusé a dit souffrir de l'image de "monstre" donnée de lui.

Elle a essayé, en vain, de lui faire expliquer la différence entre une relation sexuelle consentie, avec sa compagne, et une agression sexuelle ou un viol.

L'accusé reconnaît qu'il partait traîner à la recherche de filles, mais seulement après la naissance de son fils en 1987, pas en 1986.

Une femme a pourtant témoigné mardi avoir échappé de justesse à un enlèvement en 1986.

La présidente est aussi remontée aux origines de son parcours de prédateur sexuel en lisant la déposition d'une autre femme, agressée en 1976, encore adolescent. Sans poursuite, les gendarmes ayant dissuadé l'adolescente de porter plainte contre ce "pauvre gosse".

Suspendue vendredi soir, l'audience doit reprendre samedi avec les réquisitions et les plaidoiries de la défense.

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