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Au Palais Bourbon, rendre la démocratie palpable aux visiteurs

Des centaines de personnes de tous âges découvrent chaque jour l'Assemblée nationale et sont souvent sans concession à l'égard des élus. Des visites qui rendent la démocratie concrète et, qui sait, peuvent donner envie de voter en 2022.

Luc Castéra, cadre de 47 ans de la région parisienne, a toujours voté aux élections locales mais a eu sa période de "doute" où il ne s'est plus déplacé pour les échéances nationales: marre des "combats de coqs", "des hommes et femmes politiques assurant qu'ils feraient mieux que les autres".

Sa femme originaire de Belgique, où le vote est obligatoire, l'a incité à retourner aux urnes, contre "la montée des extrêmes". Ils visitent tous deux le Palais Bourbon, ce qui "redonne la dimension du sujet", à six mois de la présidentielle et huit des législatives, où une forte abstention est redoutée.

Entre cour d'honneur, salons et jardins, les guides de l'Assemblée exposent comment travaillent les 577 députés. Les mêmes questions reviennent en boucle, reflet de la défiance ambiante mais aussi d'une méconnaissance.

Pourquoi ne sont-ils souvent pas nombreux dans l'hémicycle? Il y a en parallèle le travail en commission sur les textes, et en circonscription auprès des administrés et acteurs de terrain. Est-ce que la buvette parlementaire est payante? Oui, ce n'est pas "open bar". Combien coûte l'Assemblée? Le budget de quelque 560 millions d'euros en 2021 représente 8 euros par Français et par an - le "prix de la démocratie".

"Tout ça avec notre pognon!", lâche un retraité du Pas-de-Calais devant les gardes républicains qui ouvrent la voie au président de séance. Le rituel a deux cents ans et montre que "la force armée est au service de la Nation", commente la guide dans cet espace chargé de symboles.

Par l'intermédiaire de leur député, des dizaines de milliers de personnes se rendent chaque année dans le "temple de la loi" - 148.000 en 2019, dernière année pleine.

- Danse sur le marbre -

Après une pause de 18 mois due au Covid-19, le bal des visites a repris fin septembre. Il cessera fin février pour une pause durant la campagne des élections législatives, afin qu'il n'y ait pas de rupture d'égalité entre les candidats.

Souvent accompagnées par le député lui-même, ces déambulations ne sont cependant pas conçues pour faire passer des messages politiques ou partisans: "il s'agit de voir l'institution vivre, ces visites sont civiques, avant d'être patrimoniales", expliquent les services de l'Assemblée.

Le coeur de cible, ce sont les plus jeunes, du primaire au lycée, qui représentent plus de la moitié des visiteurs et bénéficient ici d'une sorte de stage pratique de leurs cours d'enseignement moral et civique.

Mathilde, venue avec les délégués de classe de son collège parisien, ressort convaincue du "gros travail des députés", avec l'appui de "beaucoup de monde", 2.000 collaborateurs et 1.200 fonctionnaires. Voter, en "signe de respect", sera une évidence pour cette jeune fille déjà engagée.

"Si on ne vote pas, ça ne fait pas vivre la France", renchérit un camarade, entre selfies et esquisses de pas de danse sur le marbre.

Pourtant, constate à ses côtés Emma, si "les jeunes générations manifestent davantage, par exemple contre le sexisme, le racisme, elles vont moins voter". Quel que soit le type de scrutin, le taux d'abstention des 18-24 ans a été ces dernières années supérieur de dix points en moyenne à celui de l'ensemble de la population: au premier tour de l'élection présidentielle de 2017 notamment, seul un petit tiers avait glissé un bulletin de vote.

Venue de Nantes, Ombline Derville, étudiante en infocom de 19 ans, a voté pour la première fois aux régionales l'année dernière: "j'essaie de motiver autour de moi mais c'est difficile. Beaucoup se passe sur les réseaux sociaux, où Eric Zemmour (candidat putatif à la présidentielle) fait un gros buzz", constate-t-elle en invitant "la politique à s'adapter si elle veut rallier les jeunes".

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