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Au procès de Tyler Vilus, l'obsession de l'attentat en France

"Mettre Paris à feu et à sang." À quelques mètres du procès des attentats du 13-Novembre, la cour d'assises spéciale jugeant en appel le jihadiste français Tyler Vilus, arrêté en 2015 au retour de Syrie, s'est confrontée mercredi à son obsession de commettre un attentat sur le sol français.

Au troisième jour d'audience sur l'île de la Cité à Paris, où se tient en parallèle le titanesque procès des attentats du 13 novembre 2015, un enquêteur de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) retrace les velléités de Tyler Vilus de "tuer", "brûler", "égorger" des Français.

Dès l'été 2013, quelques mois seulement après son arrivée en Syrie, le jeune converti incite déjà sur les réseaux sociaux les musulmans de France à frapper leur propre pays, dispensant des suggestions de cibles ou des conseils pour maximiser la violence.

"À cette époque, les messages (de propagande jihadiste) sont plus orientés sur les appels aux musulmans à rejoindre l'EI en Syrie. M. Vilus est le seul à appeler à tuer et +brûler un commissariat et les flics qui sont dedans+", déclare à la cour l'enquêteur identifié par le matricule "949SI", dont seule la silhouette apparaît sur l'écran de visioconférence.

Dans le silence lugubre de la salle, le témoin égrène un florilège des propos fanatiques tenus par Tyler Vilus sur internet ou dans des interviews à des journalistes: "comme une envie de tuer des juifs", "je rêve de faire une vidéo où j'égorge un Français", "je rentre à Paris et je tue tout le monde"...

À la fois combattant, chef d'escouade, prosélyte en ligne, recruteur et membre de la police du groupe État islamique, selon l'accusation, ce "jihadiste intégral" de 31 ans doit répondre de crimes commis entre 2013 et 2015 en Syrie. En première instance, il a été condamné à trente ans de prison.

À travers le parcours de Tyler Vilus, c'est tout le microcosme des jihadistes francophones en Syrie qui se retrouve radiographié devant la cour d'assises. Une galaxie où évoluent de nombreux combattants qui se feront connaître par la suite pour des attentats ou tentatives d'attentats en Europe occidentale.

On y croise notamment son "pote" Mehdi Nemmouche, auteur de l'attentat du musée juif de Bruxelles en 2014, le coordinateur du 13-Novembre Abdelhamid Abaaoud, les assaillants du Bataclan Samy Amimour et Ismaël Omar Mostefaï, l'artificier Najim Laachraoui, etc.

- Infiltrations jihadistes -

En 2015, l'EI commence à projeter de manière organisée des jihadistes en Europe pour y perpétrer des tueries de masse.

D'une part, l'organisation extrémiste enrôle des sympathisants tout juste arrivés en Syrie, qui présentent l'avantage d'être encore inconnus des services de renseignements. Après une formation express, elle les renvoie sur le continent avec ordre de frapper - comme pour l'auteur de l'attentat raté du Thalys.

Mais en contrepoids à ces "bras cassés", selon Tyler Vilus, l'EI infiltre aussi clandestinement des combattants nettement plus aguerris, forts de leur expérience du feu en Syrie, plus dangereux. Des profils comme Tyler Vilus et ses frères d'armes...

Le 2 juillet 2015, quelques mois en amont du 13-Novembre, le Français est interpellé à l'aéroport d'Istanbul par des policiers turcs suspicieux du passeport suédois avec lequel il voyage. Empêché de prendre son vol, il est placé en détention.

En centre de rétention administrative, avant son expulsion vers la France, il prévient Abdelhamid Abaaoud. Des textos supprimés que les enquêteurs ont cependant réussi à exhumer: "ils ne vont pas m'enfermer indéfiniment, ça ne change rien. Quand je sors, j'agis."

Pendant toute l'instruction, Tyler Vilus dément être rentré pour y réaliser un attentat. Aux enquêteurs, il affirme avoir quitté la Syrie pour déserter l'EI et vouloir s'installer en Mauritanie. Avant de finalement admettre, à son procès en première instance en 2020, être revenu en Europe pour "mourir les armes à la main".

Si les services de renseignements français n'ont jamais réussi à déterminer l'éventuelle cible de Tyler Vilus, explique "949SI", ils ont cependant acquis la conviction qu'il "revenait pour commettre un attentat sur le territoire français, et plus précisément à Paris. Le but était, pour reprendre ses termes, de +mettre Paris à feu et à sang et de tuer tout le monde+".

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