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Aux assises, la mémoire à ellipses de la compagne d'un homme d'affaire russe assassiné

Elena Pravoslavnova a reçu une balle dans la tête. Aux assises de Paris, la mémoire de cette journée du 4 mars 2011 où son compagnon russe est assassiné sur commande, pense-t-elle, d'un escroc débiteur, lui revient par "flash".

Ce jour-là, elle arrive à Paris avec Mikhaïl Lanin par un vol d'Aeroflot. Le couple, qui prévoit de se rendre à Nice pour acheter une villa, est pris en charge à l'aéroport par un certain "Anatoli" et un chauffeur, à bord d'une vieille BMW.

Lanin sera retrouvé, tué d'une balle dans la tête, dans une impasse de Villepinte (Seine-Saint-Denis). Elena, touchée aussi, a miraculeusement survécu. Lui a toujours une montre à 100.000 dollars -avec la signature incrustée de Vladimir Poutine au poignet-, leurs bagages ont disparu.

Deux réfugiés tchétchènes sont accusés du crime, à la solde de commanditaires introuvables. Yazid Arsaliev (28 ans) affirme n'avoir fait que conduire la voiture - la BMW de sa mère - contre 200 euros. Rouslan Bersanov (30 ans), alias Anatoli, dont l'ADN a été retrouvé sur une douille percutée, répète qu'il a laissé le couple en vie dans l'impasse et qu'il a été "piégé".

Elena Pravoslavnova est sûre du contraire. Pour elle, le tireur est "forcément" Bersanov, qui les a récupérés et conduits à Villepinte. Elle explique par de prétendus "problèmes avec la voiture" ce détour imprévu sur le chemin du prestigieux hôtel Ritz dans une banlieue "très moche".

- "Le poids d'un corps" -

Presque maigre dans des jeans et blouson léger, elle se souvient d'être descendue du véhicule avec son compagnon, sans contrainte, puis plus rien. Tout juste un "flash": le "poids d'un corps qui chute" sur le trottoir. Elle suppose qu'elle s'est précipitée vers Mikhaïl Lanin avant d'être elle-même atteinte d'une balle dans le crâne qui n'a laissé aucune trace apparente après une opération, mais de sévères migraines.

Le souvenir suivant est celui de la table d'opération et du scanner. La panique. Elle ne parle pas un mot de français.

Mais elle a des certitudes: son inquiétude avant ce voyage, sa crainte d'un règlement de comptes. Elle est persuadée que Akhmad Khamidov, un ami de longue date de Lanin qui lui devait 1,2 millions d'euros, a "tué l'homme de (sa) vie" pour effacer sa créance.

"J'ai dit à Mikhaïl: Avec tout l'argent qu'il te doit, c'est plus facile de t'éliminer. Mais Mikhaïl a dit qu'il fallait absolument être en France le 4" pour l'achat de la villa, a-t-elle expliqué à la barre.

L'enquête menée en Russie appuie cette hypothèse. Khamidov se serait allié d'autres escrocs - dont Valid Lourakhmaev qui a été en contact avec Bersanov -, connus pour avoir soutiré des millions à des députés de la Douma en leur faisant miroiter de prétendus juteux contrats liés au transit du pétrole russe en Ukraine.

Au bout de la chaîne se trouveraient les deux accusés du crime.

Un temps en conflit avec Boris, le fils de Mikhaïl Lanin, elle partage avec lui le banc des parties civiles, pour réclamer "la justice" pour Mikhaïl.

Mais Boris Lanin maintient, alors qu'elle nie farouchement, qu'elle a rencontré Khadimov, le commanditaire présumé, quelques semaines après le crime.

Les accusés seront interrogés dans l'après-midi, le verdict est attendu vendredi soir.

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