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Box sécurisés dans les tribunaux: Belloubet revoit sa copie

Chiffon rouge pour les avocats, la généralisation des box vitrés dans les tribunaux est remise en cause : après le gel des installations, la garde des Sceaux a annoncé des "adaptations" notamment dans le tout nouveau palais de justice de Paris.

Quelques heures à peine après un avis critique du Défenseur des droits Jacques Toubon, Nicole Belloubet a ainsi concédé mercredi des aménagements pour ces dispositifs de sécurité prévus dans les salles d'audience.

"L'utilisation de box vitrés fermés permet d'assurer une sécurité adaptée lors de certains procès, comme les procès d'assises, les audiences liées au terrorisme ou la criminalité organisée", argue la garde des Sceaux dans un communiqué publié mercredi.

Mais elle concède que "dans d'autres situations, notamment dans la plupart des audiences de comparution immédiate, le recours à un box sécurisé ne s'impose pas". Pour la ministre, "ce choix doit appartenir au président d'audience".

En août 2016, un arrêté ministériel imposait l'installation de box en verre renforcé dans les salles d'audience susceptibles d'accueillir des prévenus ou des accusés détenus, pour éviter les évasions ou les actes de violence. Une mesure prise dans le cadre d'un renforcement de la sûreté des palais de justice décidées en 2015 pour répondre à la menace terroriste.

Mais l'installation de tels box a suscité dès l'été 2017 une levée de boucliers des avocats et de magistrats, qui se sont mobilisés partout en France pour dénoncer une atteinte aux droits de la défense.

Pour les opposants, ces "cages vitrées" ou "cellules de salle d'audience" remettent en cause les fondements du procès équitable en posant des problèmes de communication entre l'avocat et son client, en portant atteinte à l'oralité des débats et à la dignité des personnes poursuivies, présumées innocentes.

Face au tollé, la garde des Sceaux a gelé son projet le 22 décembre 2017, en attendant le résultat d'expertises. La ministre a, depuis, demandé le démontage des box munis de barreaux, selon le barreau de Paris.

- Démontage des box à Paris ? -

L'ouverture du nouveau palais de justice de Paris le 16 avril, symbole proclamé d'une justice moderne et ouverte, a de nouveau focalisé les mécontentements. Sur ses 90 salles d'audience, dont 27 consacrées au pénal, 13 devaient initialement être équipées de box vitrés. Mais les chefs de juridiction ont indiqué qu'ils souhaitaient en réduire le nombre à 9.

"Si les choses restent en l'état, le tribunal de Paris sera celui de la honte, pas celui du XXIe siècle", a tweeté jeudi Me Emmanuel Daoud.

"9 salles, c'est encore trop", a abondé la bâtonnière de Paris, Marie-Aimée Peyron, pour qui les vitres ne doivent être installées que dans des situations exceptionnelles liées à la dangerosité d'un prévenu ou d'un accusé.

Lundi, les avocats ont décidé de se mobiliser pour la première audience de comparutions immédiates dans le nouveau tribunal. "Je suis presque certaine qu'elle se tiendra dans une salle sans box vitré", a toutefois affirmé la bâtonnière.

Selon la représentante des avocats parisiens, le président du tribunal Jean-Michel Hayat a demandé, en plein accord avec le ministère, le démontage des box des deux sections de la 23e chambre consacrée aux comparutions immédiates.

Reste, selon elle, au ministère de la Justice d'aller au bout de cette logique, en démontant l'ensemble des box déjà installés dans les tribunaux français.

Une directive européenne de 2016 précise que les autorités doivent s’abstenir de présenter les personnes poursuivies comme des coupables à l'audience par des mesures de contrainte physique, telles que (...) box vitrés" sauf pour les "empêcher (...) de nuire à (elles-même) ou à autrui, d'"endommager tout bien (...) de prendre la fuite ou d'entrer en relation avec des tiers, comme des témoins ou des victimes".

Dans son avis, le Défenseur des droits juge que "l'actuel dispositif des box sécurisés" représente bien "une restriction aux droits de la défense, une atteinte à la présomption d'innocence" et contrevient "au droit de l'Union européenne". Il demande en conséquence l'abrogation des "dispositions réglementaires en vigueur".

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