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Christiane Taubira, l'électron libre très populaire de la gauche

Figure de "la gauche morale", Christiane Taubira, qui s'est déclarée samedi à Lyon candidate à la présidentielle de 2022, fait office d'électron libre à gauche avec un parcours et une personnalité qui la rendent très populaire, sans faire pour autant l'unanimité.

Cette petite femme de 69 ans au regard perçant, sanglée dans ses tailleurs pantalons, tressée de près, a toujours cultivé le "mystère", entre prises de parole remarquées et un certain mutisme.

Cette fois, celle qui se partageait depuis quelques années entre sa Guyane natale et son appartement parisien, revient sur la scène politique et se lance, comme en 2002, dans la bataille présidentielle, pour tenter, dit-elle, de rassembler une gauche dans "l'impasse".

"Si moi qui peux tenir debout je capitule, tout s’effondre. (...) Si moi je ne prends pas mes responsabilités, alors qui le fera ?", a expliqué à L'Obs celle qui disait en 2019 "ne pas aimer la routine".

Considérée par certains comme une "icône" de gauche, elle fait l'objet de solides haines à droite et à l'extrême droite, et même parfois dans son propre camp.

Connue pour son caractère bien trempée, elle a cependant "une vraie capacité à entraîner les sympathies et les soutiens", affirme l'ex-frondeur PS Christian Paul, qui fait campagne à ses côtés.

Née à Cayenne le 2 février 1952 dans une famille guyanaise modeste de onze enfants, elle est diplômée en sciences économiques, en agro-alimentaire, en sociologie et en ethnologie afro-américaine.

Sympathisante des thèses indépendantistes dans sa jeunesse, elle fait ses débuts en politique en remportant en 1993 les législatives avec son mouvement le Walwari (divers gauche), créé avec son mari Roland Delannon, dont elle aura quatre enfants et dont elle a divorcé. Elle est également élue députée européenne de 1994 à 1999, sur la liste du Parti radical de gauche (PRG) de Bernard Tapie.

Son nom reste associé à une loi votée en 2001 qui reconnaît la traite et l'esclavage comme crime contre l'humanité.

L'année suivante, elle se présente à la présidentielle, sous les couleurs du PRG. Elle ne recueille que 2,32% des voix, mais se voit accusée d'avoir contribué à la chute du candidat socialiste Lionel Jospin.

Au PS, certains lui en tiennent toujours rigueur. "C'est une personnalité totem de la gauche, mais pas une pure social-démocrate", dit un cadre, qui la voit "encore comme un facteur de division".

En 2012, au lendemain de la victoire de François Hollande, elle intègre le gouvernement Ayrault I comme ministre de la Justice.

- "Libre" -

Les Français découvrent sa combativité lorsqu'elle défend le projet de loi de "mariage pour tous" face à l'opposition féroce de la droite.

La loi est adoptée en avril 2013. La gauche ovationne la ministre.

Malgré ce succès personnel, cette bonne oratrice extrêmement lettrée perd ensuite ses arbitrages sur la réforme pénale, l'un de ses projets phare, et la réforme de la justice des mineurs, qu'elle veut moins répressive, s'enlise.

L'extrême droite vise directement sa couleur de peau, elle encaisse.

Début 2016, elle remet sa démission à François Hollande, désapprouvant publiquement sa proposition polémique de déchéance de nationalité.

"Elle pouvait attendre (...) mais elle a préféré partir, contribuant pour partie à fragiliser" François Hollande, critique l'ancien député PS Bernard Poignant dans une tribune à Libération.

"C'est une femme d'Etat, libre, avec un parcours républicain", loue Guillaume Lacroix, président du PRG, pour qui "elle incarne la gauche morale". Il la juge "inclassable. C'est ce qui fait sa force mais aussi les angles sur lesquels ses adversaires tapent en permanence".

Pour Christian Paul, c'est "une candidate très centrale à gauche, un point de rencontre de la gauche et de l'écologie", rappelant qu'elle a notamment combattu l'exploitation aurifère en Guyane.

Mais pour un membre de la direction d’EELV, il lui manque "un corpus idéologique écologiste très développé" pour convaincre les électeurs de gauche.

"Sur beaucoup de sujets, je ne sais pas ce qu'elle pense réellement", confie aussi le député LFI Alexis Corbière.

Fin septembre, Son refus d'appeler à la vaccination anti-Covid contre le Covid en Guyane, avait provoqué un tollé. Depuis, elle l'a défendue à plusieurs reprises.

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