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Soupçons de maltraitance sur des enfants: cinq prêtres traditionalistes du Pas-de-Calais en garde à vue

Secouée l'an dernier par des affaires d'agressions sexuelles et de maltraitance, la discrète communauté traditionaliste de Riaumont à Liévin (Pas-de-Calais) se retrouve de nouveau dans la tourmente avec la garde à vue de cinq prêtres dans une enquête sur des violences physiques sur enfants.

L'enquête, menée par l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) et la police judiciaire de Lille, concerne des faits de violences "non sexuelles" qui "remontent" dans le temps mais qui "ont pu perdurer", a déclaré à l'AFP une source proche de l'enquête, confirmant une information de M6.

Selon une autre source proche de l'enquête à Lille, il s'agirait de violences commises "entre 2008 et 2014" contre de jeunes pensionnaires. Quatre prêtres étaient interrogés mercredi dans les locaux de la police judiciaire de Lille.

Un cinquième prêtre, l'ancien prieur mis en examen en avril 2017 pour détention d'images pédo-pornographiques, était également en garde à vue dans le sud. Il avait été éloigné par l'institution dans un monastère près de Toulouse après la découverte de ces images dans son ordinateur.

La communauté de la Sainte-Croix de Riaumont, qui lutte contre "les idéologies anti-chrétiennes et anti-morales", ne faisait guère parler d'elle jusqu'à la révélation début mai 2018 de plusieurs enquêtes de grande ampleur pour agressions sexuelles et maltraitance.

Plus de 200 témoins et victimes ont été auditionnés par la police dans plusieurs pays depuis 2013, pour des faits remontant aux années 1990 et 2000. "C'est incroyable que ce truc-là ne soit pas encore fermé", a déploré une source proche du dossier.

- "Tout le monde savait" -

Fondée par le père Albert Revet vers 1960, la communauté comprend une école hors contrat qui dispense des cours de la 6e à la 3e, encadrés par des religieux de spiritualité bénédictine célébrant la liturgie en latin, et un mémorial national des scouts morts pour la France, entre autres.

Cet ordre de droit pontifical relève directement de la commission romaine Ecclesia Dei, qui a autorité sur les communautés traditionalistes restées dans le giron de Rome.

Dans le village d'enfants, les religieux accueillent une trentaine de garçons. On y prône le "rejet absolu de toute médiocrité, compromission et bavardages stériles".

En 1982, le financement de l'Etat au titre des enfants placés par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) a pris fin. Les fonds proviennent désormais à 17% des pensions versées par les parents et à 83% de dons.

"Il n'y a pas de lien institutionnel entre le département et cette structure", a assuré à l'AFP Maryline Vinclaire, responsable du pôle solidarité du Conseil départemental, précisant que ce sont "les parents qui font le choix de confier leurs enfants" à cette association.

"Les enfants ont l’air d’être élevés à la dure, on les voit parfois en short et uniforme tôt le matin, même en plein hiver", a déclaré à l'AFP une voisine, qui vit en face depuis plus de 20 ans. "Ils ont très peu d’interactions avec le voisinage."

Selon Charline Delporte, présidente du Centre national d’accompagnement familial face à l’emprise sectaire (Caffes), "depuis les années 1970-1980, tout le monde connaissait le profil de cette institution".

"Tout le monde savait! La police, la justice, le maire... (...) Comment explique-t-on, en 2019, que cette institution n'ait jamais été interdite ?", a-t-elle lancé à la pressz, affirmant qu'en "en 2001, une grand-mère avait déposé plainte pour signaler les sévices subis dans ce centre par son petit-fils", qui "s'est suicidé quelques semaines plus tard".

Cette année-là, le parquet de Béthune avait ouvert une enquête pour déterminer les circonstances exactes de la mort de cet adolescent de 14 ans, retrouvé pendu dans l'institut. Un non-lieu avait finalement été prononcé.

Côté éducation, deux inspections pédagogiques ont été diligentées, une en 2017 et l'autre en 2018, a affirmé à l'AFP le cabinet du recteur de Lille, sans plus de précisions.

La préfecture du Pas-de-Calais avait procédé à des contrôles à l'été 2018 qui "n'ont pas permis d'identifier des manquements sur la sécurité publique" alors qu'en 2017, des "observations avaient été formulées".

L'avocat de la communauté Eric Morain n'a pas souhaité s'exprimer tant que les gardes à vue ne sont pas terminées.

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